Vendée Globe : "Ils pourraient compter jusqu'à six jours d'avance"... Pourquoi le record d'Armel Le Cléac'h est-il en danger ?

Charlie Dalin et Yoann Richomme ont franchi le Cap Horn, mardi, avec trois jours et demi d'avance sur le record de la course, établi en 2017.
Article rédigé par Othélie Brion
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Charlie Dalin (Macif), au départ du Vendée Globe, le 10 novembre 2024, aux Sables-d'Olonne. (CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP)

Ils sont inarrêtables. Lancés dans un mano à mano depuis samedi 21 décembre, Charlie Dalin (Macif) et Yoann Richomme (Paprec-Arkéa) ont atteint le Cap Horn, mardi 24 décembre, après 43 jours et plus de 11 heures de mer. Une performance qui met plus que jamais en danger le record de la traversée du Vendée Globe (74 jours, 3 heures, 35 minutes et 46 secondes), établi lors de l'édition 2016-2017 par Armel Le Cléac'h. A l'époque, celui qu'on surnomme "le Chacal" avait atteint le point le plus austral de l'Amérique du Sud, au 47e jour de course.

Il y a un peu plus d’un mois, difficile de croire que ce record serait menacé. En prise avec un vent faible (quatre à sept nœuds de moyenne), les skippeurs se traînaient dans la descente de l’Atlantique. "On va être le plus lent des quatre derniers Vendée Globe", s'exclamait Yoann Richomme, le 19 novembre.

Des conditions optimales depuis l'entrée dans l'océan Pacifique

Mais depuis leur arrivée dans le Pacifique, le skippeur de Paprec-Arkéa et Charlie Dalin survolent la course. En quelques jours, ils ont rattrapé leurs 48 heures de retard sur le record et même pris de l’avance à compter du 19 décembre. "Au niveau de la Tasmanie [au sud de l’Australie], il y a eu un anticyclone qui a permis aux trois premiers bateaux d'avoir une route rapide vers le Cap Horn", analyse pour franceinfo: sport Hubert Lemonnier, le directeur de course. "On a eu un scénario météo incroyablement efficace. [...] Qu’est-ce qu’on est rapides !", confirmait Yoann Richomme, le 21 décembre.

Les deux hommes de tête, qui comptent aujourd'hui 1347 milles nautiques soit 2494 km d'avance sur le record, ont aussi pu emprunter une trajectoire plus directe dans le Pacifique, grâce à l'abaissement de la zone d’exclusion antarctique (une zone que les skippeurs ne doivent pas franchir pour éviter les collisions avec des icebergs) dont le niveau évolue régulièrement sur décision de la direction de la course. Un gain de temps qui ne devrait pas avoir une grosse influence à l'arrivée. En 2016, Armel Le Cléac’h avait, lui, pu être plus direct au large de l’Australie, grâce à une ZEA plus basse que cette année.

Des bateaux plus performants pour des skippeurs très affûtés

Pour le directeur de la course, c’est aussi la qualité des bateaux "plus rapides et fiables" qu’en 2016, qui expliquent l’avance prise par les deux concurrents. Il y a huit ans, c'est en effet sur l’un des premiers Imoca dotés de foils, le Banque populaire VIII, qu’Armel Le Cléac'h s'était imposé. Depuis, les monocoques - comme ceux de Dalin et Richomme, construits en 2022 - n'ont cessé de se perfectionner. "Aujourd'hui, les bateaux peuvent voler dans des conditions plus difficiles. Il n'y a aucun doute : les machines sont plus performantes", reconnaissait, avant le départ auprès de l'AFP, Armel Le Cléac'h, conscient que son record serait en danger.

Ajoutez à cela deux skippeurs "très préparés" et déjà vainqueurs d'une transat cette année (la New York Vendée pour Dalin, The Transat CIC pour Richomme), toutes les conditions pour un record sont réunies. "S’ils continuent sur leur lancée, ils pourraient reprendre trois jours sur le temps de référence et compter six jours d’avance sur le record à l’arrivée", avance Hubert Lemonnier.

Encore des pièges à éviter

Mais avant de rallier le port des Sables-d’Olonne, la route est encore longue. "La remontée du Brésil est assez piégeuse. Les prévisions ne sont pas toujours fidèles à la réalité de la mer", prévient le directeur de course. Lors de la précédente édition, le vainqueur, Yannick Bestaven (Maître Coq), s'était englué dans une zone sans vent dans cette partie du parcours et avait vu ses concurrents lui reprendre plus de 100 milles nautiques en 24 heures.

Viendra ensuite le passage du Pot au noir - redouté par les marins pour ses conditions difficiles - puis la remontée de l’Atlantique Nord, "très coriace voire dangereuse, avec des dépressions qui peuvent s'enchaîner", souligne Hubert Lemonnier.

Pour le Rochelais, l'émulation entre les deux hommes de tête pourrait aussi s'avérer "piégeuse". "Pour l'instant, ils tiennent mais il faut savoir ménager son bateau et il y a un facteur fatigue qui va rentrer en compte", avertit le directeur de course.

Autant d'éléments qui laissent encore planer le doute sur la suite. Peu après le départ, Armel Le Cléac'h le déclarait lui-même"Le record est fait pour être battu et est largement battable [...]. C’est un peu une affaire d’alignement des planètes". Rendez-vous autour du 20 janvier, et peut-être même quelques jours avant, pour avoir le dénouement.

Lancez la conversation

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.