Tour de France 2023 : deux leaders en dix secondes après 15 étapes, rarissime mais pas sans précédent dans l'histoire de la Grande Boucle
Ils ont inventé le marquage au cuissard. Jonas Vingegaard (Jumbo-Visma) et Tadej Pogacar (UAE Emirates) nous font vivre un Tour de France 2023 fou après deux semaines de course. Alors que les deux hommes font tout sauf se cacher en tête de la course, seules dix secondes les séparent mardi 18 juillet au départ de la 16e étape. Un pécule épais comme un boyau, pas plus qu'une bonification en cas de victoire d'étape. Comme si l'on n'avait jamais vécu un duel aussi serré après 15 étapes. L'histoire du Tour dit pourtant le contraire… et pas forcément quand on l'imaginerait.
1959, le premier thriller
Le Tour des forçats de l'avant-guerre avait offert des écarts fleuves, comme la longueur des étapes de l'époque l'imposait presque naturellement. Pour la première fois depuis 1925, première édition dépassant les 15 étapes, 1959 voit un affrontement à coups de secondes pour le maillot jaune. Dans les Pyrénées, l'outsider belge Jos Hoevenaers prend les commandes du classement général. Mais n'étant pas un pur grimpeur, il voit son écart fondre jour après jour : de 3'43" après la 13e étape, à neuf secondes le lendemain, puis quatre après un contre-la-montre achevé au Puy-de-Dôme. Ce jour-là, Federico Bahamontes assomme la concurrence et se replace idéalement comme dauphin.
Jos Hoevenaers recula irrémédiablement dans la hiérarchie pour finir 8e, à plus de onze minutes. Federico Bahamontes prit, lui, le pouvoir lors de la 17e étape à Grenoble, avec quatre minutes d'avance sur ses principaux concurrents. L'écart tiendra jusqu'au Parc des Princes.
2008, le Tour le plus serré ?
De tous les scénarios au couteau en cent ans de Grande Boucle, aucun ne fait mieux que les deux premières semaines du Tour de France 2008. L'après-Lance Armstrong et le parcours plutôt "clément" durant les 14 premières étapes aide à rebattre les cartes. Aucune différence n'est faite après les Pyrénées : l'Australien Cadel Evans (Silence-Lotto) compte une petite seconde d'avance sur le Luxembourgeois Frank Schleck (CSC) après 14 étapes. Le final de la 15e étape est du même acabit : les leaders se tiennent dans la même minute, Schleck prend le maillot jaune pour sept secondes devant Bernhard Kohl (Gerolsteiner, qui sera par la suite déclassé pour dopage) et huit sur Evans, le top 6 se tient alors en quarante-neuf secondes.
Tout se joue lors de la dernière journée de montagne, à l'Alpe d'Huez. Carlos Sastre (CSC), quatrième au départ de cette 17e étape, s'en va dès les premiers lacets, et n'est plus jamais repris. Vainqueur avec deux minutes d'avance, il prend le maillot jaune, puis résiste dans le contre-la-montre à la veille de l'arrivée, avec 1'05" d'avance sur Cadel Evans.
Et LeMond-Fignon dans tout ça ?
Dans la mémoire collective, c'est le face-à-face absolu. Le Tour de France 1989 vibre au rythme du duel Laurent Fignon-Greg LeMond, qui s'échangent à toi, à moi la tête du classement général depuis la 5e étape. Mais le suspense le plus total des annales de l'épreuve, avec la victoire finale de l'Américain dans l'ultime chrono à Paris, n'en était pas encore à de pareils sommets après quinze jours de course. LeMond reprend alors le paletot doré à Fignon à Orcières-Merlette pour quarante secondes. Pour le final historique des huit secondes qui manqueront au Français à l'arrivée sur les Champs-Elysées.
Outre 1959 et 2008, deux autres éditions ont connu un écart inférieur aux dix secondes qui séparent Jonas Vingegaard et Tadej Pogacar après 15 étapes. A la suite de la suppression de Lance Armstrong des palmarès, l'histoire réécrite voit l'Allemand Jan Ullrich devancer Joseba Beloki (Festina) de deux secondes en 2000, puis le regretté Andreï Kivilev (Cofidis) de huit secondes l'année suivante. Mais aux deuxième et troisième rang, le premier restant vacant.
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