Deux intrusions en quelques heures dans des centrales nucléaires françaises
Après l'intrusion d'un militant de Greenpeace ce matin sur le site de la centrale du Bugey (Ain), un individu a réussi à pénétrer dans la centrale de Civaux, dans la Vienne. Voici ce que l'on sait de ces actions.
Nouvelle opération coup de poing de Greenpeace : un militant de l'organisation écologiste a survolé avec un parapente à moteur la centrale nucléaire du Bugey (Ain) puis s'est posé sur le site, mercredi 2 mai à 7h40. Quelques heures plus tard, c'est Hervé Couasnon, qui se présente comme un "poète-escaladeur", qui a réussi à pénétrer dans la centrale de Civaux, dans la Vienne.
FTVi revient sur ces événements.
• Que s'est-il passé au Bugey ?
Après avoir survolé la centrale avec son parapente à moteur, le militant d'origine allemande s'est posé dans le périmètre grillagé et interdit du site. Auparavant, il avait déposé deux fumigènes sur l’un des réacteurs puis un troisième sur le sol, a précisé Greenpeace. Le pilote a ensuite été interpellé.
Un second militant de l'ONG a été interpellé à l'extérieur du site. Selon la gendarmerie, il "pourrait avoir servi de guide au pilote de l'engin".
• Que s'est-il passé à Civaux ?
Hervé Couasnon a pénétré mercredi dans l'enceinte de la centrale nucléaire de Civaux (Vienne).Il "a été interpellé, saisi dans un buisson situé juste à côté de l'entrée" du site, a indiqué un porte-parole d'EDF, précisant qu'il s'était introduit dans la zone dite "surveillée", la plus éloignée des bâtiments de la centrale. Comment a-t-il réussi son coup ? "Il a profité de la présence d'un camion de livraison pour déjouer la surveillance des vigiles", explique la gendarmerie.
Alors qu'Hervé Couasnon venait d'entrer dans la zone surveillée, "le garde de faction à la sortie des camions l'a vu et s'est mis à le poursuivre. Il lui a couru après mais il avait pris un peu d'avance, il s'est faufilé derrière un bâtiment et s'est caché" dans un fourré, a précisé EDF. Les procédures habituelles ont aussitôt été mises en place, à savoir la fermeture de tous les accès au site, l'évacuation des bâtiments de la zone surveillée, et l'intervention des gendarmes qui ont procédé à l'arrestation, a ajouté le porte-parole du groupe, en précisant que l'intrusion avait duré en tout environ une heure. Selon la gendarmerie, le "poète-escaladeur" n'a revendiqué "aucune action coordonnée avec Greenpeace".
Hervé Couasnon est célèbre pour avoir approché de près en 2002 l'ex-Premier ministre Jean-Pierre Raffarin à la tribune de l'Assemblée nationale. Le "poète-escaladeur", qui s'était lancé dans la course à la présidentielle le 1er avril 2011 avant d'abandonner en février, a indiqué qu'il souhaitait ainsi demander aux "candidats qui débattront ce soir qu'ils tiennent leurs promesses (…) car les Français en ont marre de la société dans laquelle ils vivent".
• Quel était l'objectif de l'opération de Greenpeace ?
"Illustrer la vulnérabilité des installations à la menace aérienne" à quelques jours du second tour de la présidentielle, précise Greenpeace à FTVi. Il faut "que nos candidats prennent conscience que le nucléaire sûr n'existe pas", a ajouté l'ONG sur France Info.fr. Dans son communiqué, Greenpeace appelle les deux finalistes à s'engager "à lancer une analyse approfondie des risques d’agressions extérieures d’origine humaine sur les centrales nucléaires, dont la chute d’avion fait partie".
François Hollande, le candidat PS, a réagi sur RMC et BFMTV, déclarant "faire confiance à l'Autorité de sûreté nucléaire" qui a la responsabilité de "toutes les informations sur la protection de nos centrales".
• Que répondent les autorités et EDF ?
La sûreté des installations "n'a à aucun moment été remise en cause" au Bugey, a réagi EDF. Selon l'entreprise, "les mesures de sécurité qui ont été renforcées en fin d'année 2011 ont permis une détection et une appréhension immédiate de l'auteur de l'intrusion".
Le parapente à moteur était suivi "avant même qu'il ne survole la centrale", a déclaré pour sa part le porte-parole du ministère de l'Intérieur, précisant avoir eu connaissance "qu'il s'agissait d'un militant écologiste menant une action médiatique".
De son côté, le directeur de la centrale du Bugey, Alain Litaudon, a estimé que l'intrusion de Greenpeace avait montré que le "dispositif de protection [était] efficace". "L'interpellation a eu lieu en huit minutes" après la détection, a-t-il souligné.
• Y a-t-il des précédents ?
Selon l'ONG, c'est la première fois qu'une opération de ce type est menée en France. En novembre 2011, un survol de l'usine de retraitement de La Hague (Manche) a été effectué par l'ONG, qui publie également mercredi des images aériennes du site filmées à cette occasion. "Une autre preuve, selon Greenpeace, que rien n’a été fait pour prendre sérieusement en compte la menace d’une attaque aérienne sur les installations nucléaires françaises".
• Comment le risque aérien est-il évalué ?
"En France, le risque de chute d'avion ou d'attaque aérienne n'est pas pris en compte dans les audits ou les stress tests, contrairement à l'Allemagne", souligne un membre de Greenpeace joint par FTVi. L'organisation publie mercredi un rapport (en PDF) commandé fin novembre à un expert britannique sur la vulnérabilité des centrales françaises face au risque de chute d'avion. Résultat, selon l'ONG : "Les confinements primaires des 58 réacteurs français seraient confrontés à un risque de défaillance".
De même, relève Greenpeace, "les bâtiments abritant les piscines de refroidissement des combustibles irradiés seraient soumis à un risque de perforation ou d’effondrement de leur structure. Ces piscines, qui contiennent souvent plus de combustibles radioactifs que les réacteurs eux-mêmes, peuvent être à l’origine d’un accident nucléaire majeur."
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