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Cinq questions sur la vaccination obligatoire voulue par la ministre de la Santé

Agnès Buzyn dit réfléchir "à rendre obligatoire, pour une durée limitée, les onze vaccins destinés aux enfants", dans une interview au "Parisien".

Article rédigé par Benoît Zagdoun
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, le 7 juin 2017 à la sortie de l'Elysée, à Paris. (BERTRAND GUAY / AFP)

Y aura-t-il bientôt onze vaccins obligatoires pour les enfants et non plus trois ? La question polémique revient dans le débat public depuis des années. Ce dossier avait été engagé par la précédente ministre de la Santé, Marisol Touraine. Lors de la passation de pouvoirs avec Agnès Buzyn, en mai, elle avait ainsi rappelé avoir "préparé un texte de loi" en ce sens. Vendredi 16 juin, la nouvelle ministre déclare dans une interview au Parisien qu'elle réfléchit "à rendre obligatoire, pour une durée limitée, les onze vaccins destinés aux enfants". Un projet qui soulève quelques questions.

Quels sont les vaccins obligatoires actuellement ?

Aujourd'hui, seuls trois vaccins infantiles sont obligatoires en France : contre la diphtérie depuis 1938, contre le tétanos depuis 1940 et contre la poliomyélite depuis 1964. Ils font l'objet de trois injections groupées (Diphtérie-Tétanos-Polio ou DTP) : deux à l’âge de 2 et 4 mois, suivies d’un rappel à l’âge de 11 mois.

Des rappels sont obligatoires pour la poliomyélite jusqu’à l’âge de 13 ans. Ils ne sont que recommandés pour la diphtérie et le tétanos à l’âge de 6 ans, puis entre 11 et 13 ans, selon l'édition 2017 du calendrier des vaccinations et recommandations vaccinales (PDF).

Quels sont les vaccins recommandés ? 

Huit vaccins infantiles sont recommandés : coqueluche, pneumocoque, hépatite B, méningocoque C, rougeole, oreillons, rubéole et Haemophilus influenzae. Celui pour la tuberculose n'est recommandé que pour les enfants exposés à un risque élevé.

Un vaccin trivalent contre la rougeole, les oreillons et la rubéole peut être administré à 12 mois, puis à 18 mois, et peut être associé au vaccin anti-méningocoque C. Le vaccin contre la coqueluche peut, lui, être conjugué au vaccin quadrivalent DTCaPolio.

La vaccination par le BCG est recommandée dès la naissance, et celle contre l’hépatite B chez tous les nourrissons.

Quels vaccins deviendraient obligatoires ?

La ministre de la Santé indique qu'elle réfléchit "à rendre obligatoires les onze vaccins (poliomyélite, tétanos, diphtérie, coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque C) pour une durée limitée, qui pourrait être de cinq à dix ans".

Agnès Buzyn suit ainsi les recommandations d'un comité de "concertation citoyenne" sur la vaccination, rendues en décembre à la précédente ministre de la Santé, Marisol Touraine. Ce comité préconisait de rendre obligatoires –et gratuits– les vaccins aujourd'hui seulement recommandés pour les enfants de moins de 2 ans. Et ce, de façon temporaire. 

Pourquoi la ministre de la Santé veut-elle rendre ces vaccins obligatoires ?

Le comité sur la vaccination estimait en décembre, dans ses conclusions, que cette vaccination obligatoire temporaire permettrait de remédier à la "baisse de la couverture vaccinale" liée à la "perte de confiance" des Français dans les vaccins. Des vaccins obligatoires d'un côté, d'autres seulement recommandés... "Ce double système est une exception française. Cela pose un vrai problème de santé publique", estime aujourd'hui la ministre de la Santé dans Le Parisien

Ainsi, "la rougeole réapparaît" et a causé la mort de 10 enfants depuis 2008, pointe la ministre de la Santé. "Le taux de couverture est de 75% alors qu'il devrait être de 95%", souligne-t-elle. Et "on a le même problème avec la méningite". "Il n'est pas supportable qu'un ado de 15 ans puisse mourir parce qu'il n'est pas vacciné."

Selon une enquête, parue en septembre 2016  dans la revue EBioMedicine, la France est le pays européen qui a le plus de réticences face aux vaccins. Un Français sur quatre émet des doutes sur la sécurité des vaccins et 17% doutent de leur efficacité. Des parents refusent la vaccination obligatoire de leurs enfants et des médecins anti-vaccins fournissent de faux certificats de vaccinations.

D'où l'idée du comité sur la vaccination : agir en deux temps. D'abord élargir l'obligation vaccinale, en prévoyant une possibilité de refus des parents. Puis, à terme, supprimer l'obligation vaccinale comme ailleurs en Europe.

Car en levant maintenant l'obligation vaccinale, "on peut craindre qu'une fraction non négligeable de la population renonce aux vaccins y compris aux trois vaccins obligatoires de base, Diphtérie-Tétanos-Polio (DTP)", expliquait alors le professeur Alain Fischer qui coprésidait le comité. "Il n'y a pas d'autres solutions pour lutter contre la recrudescence des maladies infantiles. C'est un mal transitoire pour un bien sur le long terme", affirmait-il.

Pourquoi ce projet est-il critiqué ?

Pour les détracteurs des vaccins, tel Jacques Bessin, président de l'Union nationale des associations citoyennes de santé (UNACS), interrogé dans Le Parisien, la vaccination obligatoire, même temporaire, "serait une hérésie". Selon lui, "les vaccins ont des effets secondaires neurologiques, musculaires mal mesurés et parfois irréversibles". Et de promettre : "On ne laissera pas faire."

L'association E3M dénonce, elle, "la dangerosité" supposée des adjuvants comme l'aluminium utilisés dans certains vaccins. Elle les accusent de provoquer une maladie neurologique rare : la myofasciite à macrophages, qui se manifeste par des douleurs musculaires, des douleurs articulaires, un épuisement chronique et des troubles cognitifs. Des conclusions que contestent les autorités médicales. Le vaccin contre l'hépatite B est, lui, suspecté d'accroître le risque de sclérose en plaques, bien qu'une enquête a conclu à un non-lieu en janvier 2016. 

Les critiques visent également les fabricants de vaccins. Certains suspectent les laboratoires d'avoir organisé la pénurie de vaccins pédiatriques de 2015, le vaccin hexavalent, qui protège contre six maladies. Il protège contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, la poliomyélite mais aussi certaines formes de méningite et l'hépatite B, coûtant plus cher. Selon les contempteurs des vaccins, cette décision ferait la part belle aux laboratoires pharmaceutiques. 

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