A Villeneuve-sur-Lot, le FN bouscule l'UMP
Plus offensif et entouré, Etienne Bousquet-Cassagne, le candidat du Front national, marque des points contre son rival de l'UMP, quitte à multiplier les déclarations péremptoires et les imprécisions. Reportage.
"Y'a 22% de chômage dans sa commune de Fumel et il se présente. Il a pas honte." Il est à peine 10 heures du matin, jeudi 20 juin, lorsque le point presse improvisé de Jean-Louis Costes, le candidat UMP à l'élection législative partielle de la 3e circonscription du Lot-et-Garonne, dégénère sur le marché de Monsempron-Libos.
Sylvain, 26 ans, et un petit groupe de partisans du candidat du Front national pour le second tour, Etienne Bousquet-Cassagne, alpaguent bruyamment le maire de Fumel. "Vous avez pactisé avec le diable, avec le Parti socialiste, c'est une honte", hurle Bernard, le père de Sylvain. "Je suis UMP et je vais déchirer ma carte", lance Gilbert devant les journalistes. Mais Jean-Louis Costes ne l'entend pas. Gêné, le candidat s'est éclipsé, laissant micros et caméras à ses détracteurs.
"Le FN se contente de crier, ce ne sont pas mes méthodes"
La scène peut sembler anecdotique, mais elle est révélatrice de cette dernière semaine de campagne sur les terres de Jérôme Cahuzac. Un FN gonflé à bloc face à une UMP sur la défensive, comme tétanisée par la crainte de perdre une élection qui lui semblait promise. "Le FN se contente de crier, d'asséner des contre-vérités. Moi, ce ne sont pas mes méthodes", se justifie Jean-Louis Costes, avant d'expliquer que le chiffre de 22% est faux (en réalité, selon les chiffres de l'Insee, le chômage était bien de 22,8% à Fumel en 2009, d'après les dernières données disponibles).
De fait, même si Sylvain s'en défend, en assurant qu'il est sur le marché pour acheter un canard, l'altercation ne doit pas grand-chose au hasard. Mercredi, le jeune homme et son père étaient à Monflanquin, pour accueillir le vice-président du FN, Florian Philippot. Et Gilbert, l'adhérent UMP qui veut déchirer sa carte, arrive de Dordogne, le département voisin. Quelques minutes après l'incident, nous retrouvons tout ce petit monde autour du candidat FN et de son visiteur du jour.
Un face-à-face tendu sur les ondes de Radio 4
Les sympathisants du FN ne sont pas les seuls à malmener Jean-Louis Costes. La veille, lorsque les deux candidats se sont retrouvés sur les ondes de Radio 4 pour un débat, Etienne Bousquet-Cassagne a cogné sur son adversaire. "Qu'avez-vous fait pendant dix ans ?" n'a cessé de marteler le jeune frontiste de 23 ans, qualifiant son rival de "député socialiste".
Se réfugiant derrière le fait que le Front national n'a jamais exercé le pouvoir, l'étudiant multiplie les déclarations de bonnes intentions, sur les retraites agricoles, la construction de prisons et le nombre de gendarmes. Estomaqué par le culot du jeune homme, qui n'hésite pas à couvrir de sonores "blablabla" les propos de son adversaire, Jean-Louis Costes peine à répondre.
Et lorsqu'il attaque sur l'absence dans l'hémicycle des deux députés du Front national lors du débat, mardi, sur la loi sur la transparence dans la vie politique, Etienne Bousquet-Cassagne réplique : "Ils étaient en commission." Et tant pis si les deux commissions auxquelles appartiennent Gilbert Collard et Marion Maréchal-Le Pen, la commission des lois et la commission des affaires culturelles, ne se sont pas réunies ce jour-là.
Une campagne VIP pour le FN
La présence de Gilbert Collard, en visite jeudi sur le marché de Monsempron aux côtés du candidat FN, est une autre illustration de la différence stratégique entre les deux campagnes. Pour cette législative partielle, le FN a mis les grands moyens. La candidate historique du Front à Villeneuve a été écartée, au profit d'Etienne Bousquet-Cassagne, plus jeune et moins incontrôlable. Le parti a même décidé de dépêcher Michel Guiniot, son Monsieur élections, pour le cornaquer. Et les personnalités du parti, comme Marine Le Pen, Marion Maréchal-Le Pen, Florian Philippot et Gilbert Collard, se pressent dans la vallée du Lot.
En face, l'UMP a préféré investir un élu du cru, peu à l'aise devant les caméras, plutôt qu'un jeune loup originaire du coin. Et seuls Jean-François Copé et Bruno Le Maire ont fait le déplacement depuis Paris pour aider leur candidat. Jean-Louis Costes a d'avantage misé sur les élus locaux, qui composent son équipe de campagne. Il était d'ailleurs accompagné du maire de Monsempron sur le marché, jeudi matin.
"Il fait campagne comme il a toujours fait campagne, il n'a pas mesuré que cela allait prendre une telle ampleur médiatique (...), alors que le FN a eu le nez creux", analyse un observateur de la politique locale, proche de la droite. D'ailleurs, le chef de cabinet de Jean-Louis Costes se plaint de l'intérêt des journalistes pour l'élection. "Cette médiatisation, on ne peut pas dire que ça nous aide, elle surmobilise l'électorat frontiste. On a l’impression d’être à une élection présidentielle", s'agace Sébastien Maurès.
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