"Aborder le thème du suicide dans une rédaction est une bonne idée"
Le psychiatre Didier Lauru revient pour francetv info sur l'affaire du professeur suspendu pour avoir donné une rédaction sur le suicide à ses élèves de 3e.
SOCIETE – Suspendu à "titre conservatoire" pour avoir donné une rédaction sur le suicide à ses élèves de 3e. C'est ce qui est arrivé lundi 10 décembre à un professeur de français en Charente. Il avait demandé à ses élèves de se mettre dans la peau d'un suicidaire de 16 ans prêt à passer à l'acte et livrant les raisons de son geste. L'énoncé a choqué les parents. Didier Lauru, psychiatre, coauteur de l’ouvrage L’énigme du suicide à l’adolescence, revient sur cette affaire pour francetv info.
Francetv info : Comprenez-vous la réaction des parents d'élèves ?
Didier Lauru : Ce qui est choquant, c’est la manière dont est posée la question. Proposer à des adolescents de se mettre dans la peau d’un suicidaire qui va passer à l’acte est maladroit. Il aurait plutôt fallu leur proposer de se mettre dans la peau d’un adolescent qui confie ses pensées suicidaires à un autre. Mais aborder le thème du suicide dans une rédaction, c’est une bonne idée.
Parler du suicide peut-il faire office de prévention ?
Oui. Cela permet de dédramatiser, désacraliser le suicide. Les adolescents sont de bonnes ressources entre eux, ils s’entraident beaucoup. On l’observe par exemple sur les forums comme Fil Santé jeunes. C’est pourquoi il est important d’aborder ce sujet. Beaucoup de parents sont choqués dès qu’on parle du suicide des jeunes, mais c’est une réalité. Dix à quinze pour cent des adolescents ont déjà eu des pensées suicidaires. Le suicide est la première cause de mortalité des adolescents. Suspendre le professeur, c’est peut-être un peu démesuré car son idée de base, faire travailler les élèves sur le suicide, n’est pas bête.
Est-ce qu’il n’y a pas un danger à mettre ce genre de sujet dans la tête des adolescents sensibles ?
Cet énoncé de rédaction peut effectivement choquer les adolescents les plus sensibles. S’ils ont déjà pensé au suicide, cela les place dans une position particulière. Et s’ils n’y ont jamais pensé par eux-mêmes, cela peut leur donner des idées. Mais cela n’a pas forcément d’impact réel, cela ne veut pas dire qu’ils vont passer à l’acte.
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