Ce qui est reproché à Monsanto
Le procès qui s'est ouvert à Lyon (Rhône), cet après-midi, relance les accusations contre le géant de l'agrochimie.
Paul François, un agriculteur charentais de 47 ans, s'est lancé dans un combat de taille. Depuis le lundi 12 décembre, il affronte la firme américaine Monsanto devant le tribunal de grande instance de Lyon (Rhône). Paul François affirme que le Lasso, un puissant herbicide produit par le géant de l'agrochimie et interdit en France depuis quatre ans, est responsable de son intoxication survenue en 2004. Des accusations qui s'ajoutent aux nombreux reproches formulés à l'encontre de Monsanto depuis des décennies, dont voici la liste.
1. Commercialiser des herbicides toxiques comme le Roundup
Dans sa plainte, Paul François met en cause la toxicité du Lasso. Pourtant, c'est le Roundup, le plus connu et le plus utilisé des herbicides de Monsanto, qui est souvent pointé du doigt pour ses effets néfastes.
Depuis le milieu des années 2000, plusieurs études mettent en avant la dangerosité du glyphosate, le principe actif du Roundup. Le dernier rapport en date, publié en juin 2011 par l'ONG britannique Earth open source (EOS), affirme que le produit serait tératogène, c’est-à-dire responsable de malformations fœtales. De son côté, Monsanto réfute ces conclusions.
Il faut maintenant attendre la réévaluation du Roundup par la Commission européenne. Elle était prévue en 2012, mais le retard accumulé par Bruxelles va repousser ce nouvel examen à 2015, rapporte Le Monde (article payant).
2. Dissimuler la nocivité de ses produits
Les critiques les plus virulentes à l'égard de Monsanto viennent de Marie-Monique Robin, journaliste-réalisatrice et auteure d'un enquête sur la firme américaine. Sorti en 2008, son documentaire Le monde selon Monsanto retrace l'histoire de la compagnie et démonte point par point le discours du géant en faveur de l'environnement, tel qu'il est présenté notamment sur son site internet.
Dans son enquête, Marie-Monique Robin revient également sur la dangerosité des PCB (polychlorobiphényles), un polluant chimique que Monsanto produit à une échelle mondiale. La journaliste rapporte qu'en 2002, la firme américaine a été condamnée à verser 700 millions de dollars aux habitants d'Anniston, en Alabama (Etats-Unis) pour avoir dissimulé pendant des décennies les effets néfastes des PCB.
3. Entraîner les cultivateurs d'OGM dans un cercle vicieux
Le 29 novembre, le Conseil d'Etat a annulé l'interdiction de cultiver du maïs OGM Monsanto 810, ordonnée en février 2008. Malgré cette décision, le gouvernement français s'y oppose. En cultivant du maïs OGM Monsanto 810, il existe un risque que la toxine BT contenue dans le maïs touche plusieurs types d'insectes, pas seulement les ravageurs, a expliqué le même jour la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet.
"Il y a aussi des risques de développer des résistances sur les insectes ravageurs du maïs, ce qui est très embêtant", a-t-elle ajouté. Effectivement : dans ce cas, il faut racheter des pesticides et pulvériser davantage pour tenter de sauver les récoltes. Cela a un coût plus important pour les agriculteurs, qui se retrouvent alors dans un cercle vicieux. Ils doivent payer plus alors que la valeur de leurs récoltes baisse. Endettés, certains se suicident. C'est ce qui s'est passé en Inde pour les paysans cultivateurs de coton.
Autre problème lié à la culture du maïs de Monsanto : avec le vent, les graines peuvent contaminer d'autres champs. Ainsi, aux Etats-Unis, 270 000 agriculteurs bio ont porté plainte contre la multinationale en mars 2011 pour ce motif.
4. Tuer des abeilles
La culture du maïs OGM de Monsanto n'a pas seulement des conséquences pour les hommes. Elles en ont aussi pour les abeilles, selon dix-sept organisations apicoles, agricoles et environnementales.
"L'abeille est un atout incontournable pour la pollinisation de nombreuses cultures, et l'apiculture (...) pourrait tout bonnement disparaître des campagnes européennes par décision politique, ou être accusée de disséminer les pollens OGM", affirment les associations. Pour protester contre cela, elles ont lancé vendredi 2 décembre une pétition en ligne.
5. S'être enrichi pendant la guerre du Vietnam au détriment de 4 millions de personnes
Certaines accusations portées contre Monsanto sont plus anciennes. Entre 1961 et 1971, en pleine guerre du Vietnam, l'armée américaine a déversé des litres de défoliant fourni pour l’essentiel par quelques grosses entreprises, dont Monsanto, dans le centre et le sud du pays.
Le but de l’opération était de protéger les militaires américains contre les attaques des Vietcongs et de détruire les récoltes censées les approvisionner. Mais la dioxine, composant principal de l'agent orange, un des défoliants utilisés, provoque des effets destructeurs : cécité, cancer de la prostate et des poumons, malformation des bras et des jambes.
Des anciens combattants américains touchés par ces problèmes de santé ont porté l'affaire devant les tribunaux dans les années 1980. Un règlement à l'amiable a permis de les indemniser, mais ce n'est pas le cas des victimes vietnamiennes. Elles subissent encore les conséquences de cette "guerre chimique", selon un article du Monde diplomatique publié en 2002.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.