"Notre heure est venue" : la réalisatrice indienne Kiran Rao représentera son pays aux Oscars

Bollywood, première industrie cinématographique au monde, n'a jamais décroché la précieuse statuette dans la catégorie meilleur film étranger.
Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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La cinéaste Kiran Rao s'exprime durant le Manthan Samvaad 2024, au Shilpakala Vedika, à Hyderabad (Inde), le 2 octobre 2024. (SUMAN REDDY D / THE TIME OF INDIA / AFP)

L'Inde a choisi le film Lost Ladies (Laapataa Ladies) de Kiran Rao pour concourir dans la catégorie meilleur film international aux Oscars. "C'est un moment spécial pour les femmes indiennes. Enfin, notre heure est venue", a confié à l'AFP la cinéaste et productrice indienne. "J'espère que c'est le début d'un mouvement qui mettra en lumière de nombreuses autres histoires venues d'Inde, racontées par des femmes. Nous sommes restées silencieuses trop longtemps."

Malgré sa popularité, la gigantesque industrie de Bollywood, le cinéma indien en langue hindi, n'a pas encore réussi à s'imposer lors de la cérémonie américaine. Elle n'a collecté que dix statuettes depuis 1957. Alors que sa production dépasse celle de Hollywood en volume, le cinéma indien n'a jamais remporté d'Oscar dans la catégorie du meilleur film international (film produit hors des États-Unis dans une langue autre que l'anglais) où il a seulement été nommé trois fois. Même le gros succès indien, Devdas de Sanjay Leela Bhansali – avec les stars Shahrukh Khan, Madhuri Dixit et Aishwarya Rai –, présenté par l'Inde en 2002 n'avait pas réussi à retenir l'attention de l'Académie des Oscars.

"La participation de l'Asie aux Oscars s'est renforcée" ces dernières années, souligne Kiran Rao auprès de l'AFP, citant le triomphe du film sud-coréen Parasite (6 Oscars dont celui de meilleur film en 2019) ou le sacre de l'actrice malaisienne Michelle Yeoh dans Everything Everywhere All at Once en 2023.

Mais les films du sous-continent indien, région qui inclut l'Inde et le Pakistan notamment, "n'ont pas eu autant de représentation", alors "que nous avons beaucoup à offrir au monde avec nos histoires et nos genres cinématographiques", défend la réalisatrice de 50 ans.

Sensibiliser aux conditions de vie des Indiennes

Tourné en hindi et disponible sur Netflix, son film raconte l'histoire de deux jeunes mariées d'une région rurale, qui se perdent dans un train bondé et se retrouvent par erreur avec le mari de l'autre, au début des années 2000. Leurs arrivées dans des familles qui ne sont pas les leurs vont pousser les personnages de cette comédie à s'interroger sur le mariage, la condition féminine et les normes conservatrices de l'Inde.

Produit par Kiran Rao et son ex-mari Aamir Khan, star de Bollywood, la fiction suit le voyage de ces femmes "pour rentrer chez elles, mais aussi pour se trouver elles-mêmes et trouver le sens qu'elles veulent donner à leur vie", explique la cinéaste. La réalisatrice veut également faire de son film un outil de sensibilisation sur les conditions de vie et les luttes des femmes dans l'Inde d'aujourd'hui.

Kiran Rao espère que son récit pourra "ouvrir une petite fenêtre" dans l'esprit des spectateurs, et arrivera à "changer des mentalités très anciennes". "Les histoires des femmes doivent être plus visibles, et les réalisatrices ont besoin de davantage d'encouragements", plaide la réalisatrice, originaire de Bangalore.

Des films qui ont le vent en poupe

Longtemps boudées par les Oscars, trois femmes seulement ont remporté le prix de la meilleure réalisation depuis la création de la cérémonie il y a près d'un siècle, et moins de 2% des personnes nommées ont été des femmes de couleur, selon une étude de l'université californienne USC Annenberg.

Quelques mois avant la sélection de Lost Ladies, All We Imagine as Light, un film en langue malayalam de la réalisatrice indienne Payal Kapadia, qui dépeint l'amitié de deux infirmières à Mumbai, a remporté le Grand Prix du Festival de Cannes.

Pour concourir aux Oscars dans la catégorie du meilleur film étranger, le Royaume-Uni a retenu Santosh, un polar en hindi de la réalisatrice anglo-indienne Sandhya Suri, qui raconte l'histoire d'une jeune veuve devenant policière à la place de son mari tué lors d'une émeute dans le nord de l'Inde.

L'Académie des Oscars annoncera le 17 janvier 2025 quels sont les pays nommés dans cette catégorie, avant la cérémonie en mars 2025.

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