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Camille Kouchner, Christine Angot, Catherine Allégret, Claude Ponti : le livre, un briseur du tabou de l'inceste

Dans "La familia grande", Camille Kouchner accuse son beau-père, l'ancien député européen Olivier Duhamel, d'avoir violé son frère jumeau quand il était adolescent.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
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Couverture du livre de Camille Kouchner, "La familia grande" (Seuil), publié le 7 janvier 2021 (THOMAS SAMSON / AFP)

Un an après le livre de Vanessa Springora qui révélait au grand jour ce qui allait devenir l'affaire Matzneff, un pavé qui a bousculé le monde littéraire, c'est de nouveau un récit en librairie qui brise un tabou, celui de l'inceste, par la voix de Camille Kouchner.

La fille de l'ancien ministre Bernard Kouchner et l'universitaire Evelyne Pisier publie jeudi La familia grande (Seuil), titre en espagnol qui reprend le surnom que se donnait une bande d'amis fascinés par la révolution cubaine.

"En ne désignant pas ce qui arrivait, j'ai participé à l'inceste"

L'homme accusé est une figure politique et médiatique : Olivier Duhamel, 70 ans, ancien député européen. Lui qui a immédiatement mis fin à toutes les fonctions qu'il occupait est visé par une enquête judiciaire.

>>  Affaire Olivier Duhamel : cinq questions sur les accusations d'inceste portées par sa belle-fille Camille Kouchner

Tout au long du récit, l'autrice de 45 ans ne lui donne qu'un nom : "mon beau-père". Elle modifie le prénom de la victime, son frère, fils de Bernard Kouchner âgé de 14 ans quand commencent les faits, pour l'appeler "Victor".

L'inceste lui-même dure peu dans ce témoignage autobiographique, une dizaine de pages sur 200. Il surgit brusquement vers le milieu du livre, quand Victor dit : "Il m'a caressé et puis tu sais..." Et sa soeur de déplorer : "En ne désignant pas ce qui arrivait, j'ai participé à l'inceste". Ce témoignage a été tenu secret jusqu'à trois jours avant sa publication, l'exclusivité réservée au Monde et à L'Obs lundi.

"Je ne révèle rien"

Si cette histoire remontant à la fin des années 1980 est portée à la connaissance du grand public, elle n'était pas complètement ignorée. "Je ne révèle rien dans ce livre. Tout le monde sait" au sein de cette famille, a affirmé l'autrice au Monde.

"Tu verras, ils me croiront mais ils s'en foutront complètement", prédisait le frère de Camille Kouchner, quand il a commencé à faire connaître son histoire pour protéger d'autres enfants de son beau-père. "Il avait raison", constate-t-elle.

Le silence qui semble avoir protégé Olivier Duhamel, si les faits sont avérés, rappelle fortement celui que décrivait Vanessa Springora, un an auparavant, dans Le Consentement, sur sa relation avec l'écrivain Gabriel Matzneff, 49 ans quand elle en avait 14.

Que le livre de Vanessa Springora ait été bien reçu lors de sa parution en janvier 2020, "cela m'a fait un bien fou, oui", a confié Camille Kouchner à L'Obs. "L'écho public, ce n'est pas ce que je souhaitais, mais il m'a paru nécessaire pour donner de la visibilité aux incestes qu'on cache, qu'on tait".

Lever l'omerta par le livre

Passer par l'écriture d'un livre pour lever l'omerta n'est pas une première. Avant Camille Kouchner, d'autres célébrités avaient déjà brisé ce tabou de l'inceste.

L'actrice Catherine Allégret, en 2004, juste après le premier procès de l'affaire d'Outreau, avait raconté dans Un monde à l'envers les attouchements, enfant, et la tentative de viol, adulte, de son beau-père "abusif" Yves Montand. Le livre est largement oublié, et on avait beaucoup reproché à son autrice d'accuser un mort qui ne pouvait se défendre.

Claude Ponti, auteur de livres jeunesse, avait évoqué sous forme de fiction, dans Les Pieds bleus en 1995, les sévices sexuels qu'il avait subis enfant. Il ne nommait pas de coupable mais a désigné ensuite son grand-père.

Enfin Christine Angot avait fait des viols commis par son père le sujet de trois de ses romans, L'Inceste (1999) et Une semaine de vacances (2012) et Un amour impossible (2015), dans lequel elle traçait la génèse du crime, et peignait elle aussi le silence.

"Il faut lire Camille Kouchner. Il faut la lire parce que c'est la seule consolation possible de ce qui ne se consolera jamais", a écrit sur Twitter la romancière et journaliste Tristane Banon.

Elle avait dénoncé pendant des années, sans être entendue, une agression sexuelle d'un autre homme célèbre, Dominique Strauss-Kahn.

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