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Alain Chamfort, un "Dandy Symphonique" tout en élégance et en émotion sur la scène du Grand Rex à Paris

Mercredi soir, Alain Chamfort présentait à Paris, sur la scène du Grand Rex, l'album "Symphonique Dandy" dans lequel il revisite certains de ses plus grands succès avec un orchestre. La magie était au rendez-vous, portée par la simplicité et l'authenticité de l'artiste, le talent de l'orchestre Lamoureux et les très beaux arrangements du musicien Nobuyuki Nakajima.

Article rédigé par Annie Yanbekian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Alain Chamfort sur scène à Paris le 15 novembre 2018, au Trianon (SADAKA EDMOND / SIPA)

En décembre 2021, Alain Chamfort a sorti un nouvel album, Symphonique Dandy (Tessland), dans lequel il réinterprète des pépites de sa discographie avec l'Orchestre symphonique national de Montpellier-Occitanie. Vivre une telle expérience, pour un musicien, c'est "un rêve caché", confiait-il à Franceinfo en février. Quelque dix-sept chansons, de Manureva aux Microsillons, ont ainsi été entièrement réorchestrées par Nobuyuki Nakajima, compositeur, pianiste et arrangeur japonais. Après une captation à Montpellier fin octobre 2020, sans public (pour cause de confinement), immortalisée pour les caméras de Canal Plus (diffusée en 2021), Alain Chamfort, compositeur et chanteur à la longévité rare - plus de cinquante ans de carrière -, aurait dû présenter au public ce répertoire revisité le 11 mars dernier à Paris. Mais le Covid-19 l'en a empêché. La date parisienne a été repoussée de douze jours.

Mercredi 23 mars, le concert a pu finalement être donné sur la scène du Grand Rex avec une phalange parisienne, l'Orchestre Lamoureux, placée sous la direction de Gwennolé Rufet, et avec le concours de Nobuyuki Nakajima, l'arrangeur des nouvelles versions des chansons, au piano. Pour entendre ce répertoire en région, trois dates sont programmées pour l'instant entre juin et décembre à Vannes, Mâcon et Bressuire, avec des formations symphoniques locales. Un quatrième concert prévu à Rennes a dû être annulé.


Mercredi soir à Paris, après un artiste prometteur en première partie (le chanteur Jules Jaconelli en guitare-voix), l'heure des retrouvailles avec le public sonne enfin pour Alain Chamfort. Il est 20h42 et l'orchestre entame, seul, l'introduction mystérieuse de la première chanson. Quelques secondes plus tard, Alain Chamfort, 73 ans (depuis le 2 mars) fait son entrée sous les acclamations et entame le dialogue fictif de la chanson Ce n'est que moi, dans laquelle il relate une rencontre avec une jeune femme. Veste grise aux imprimés satinés brillant sous les projecteurs, pantalon noir, lunettes à verres légèrement fumés, nœud papillon noir (qu'il dénouera pendant le concert) sur chemise blanche... Le plus élégant des vétérans de la chanson pop française ferait presque penser à un célèbre agent secret, porté par les arrangements cinématographiques de l'orchestre, entre nappes de cordes et cuivres entretenant un climat de suspense.

Chamfort chanteur et conteur, porté par l'orchestre

Respectant l'ordre de l'album sorti en décembre, Chamfort enchaîne avec Exister, l'une des cinq chansons de son merveilleux disque précédent Le Désordre des choses (2018) qu'il a reprises pour cette expérience orchestrale (avec la chanson éponyme, le très beau En regardant la mer, Les Salamandres et Les Microsillons). Rythme plus animé, paroles plus graves, et un refrain instrumental totalement transformé pour la version symphonique. Très vite, on se réjouit de constater combien l'écrin d'un orchestre, avec ses arrangements finement ciselés, convient à un interprète comme Alain Chamfort. L'artiste français a confié la réorchestration de ses chansons à Nobuyuki Nakajima après avoir observé le travail qu'il avait réalisé pour Jane Birkin. Comme cette dernière, Chamfort n'est pas un chanteur à voix, il en est le premier conscient, mais son timbre et son expressivité font merveille sous la voûte lumineuse du Grand Rex.

Le chanteur ne s'aventure plus dans les notes aiguës, qu'à cela ne tienne, il se mue en conteur et donne de nouvelles couleurs, de nouvelles intentions, aux textes. Sa vulnérabilité sert son propos et insufle un climat de confidence. Parfois il alterne chant et récitatif, parfois il paraphrase des passages en utilisant des notes plus graves, parfois il chante simplement une octave plus bas, toujours avec cette constante délicatesse. On repère ces variations dans des chansons comme L'Ennemi dans la glace dont il offre une version somptueuse, Manureva, éternel temps fort de ses concerts, ou encore le mélancolique Palais Royal, chanson très applaudie et occasion immanquable pour les groupies de s'exprimer : "Je t'aime !", lancent quelques voix féminines quand Chamfort chante "Dis-moi que tu m'aimes"...

Tout au long du concert, on s'amuse à essayer de reconnaître les introductions instrumentales, parfois longues et empreintes de lyrisme comme celle de Géant, une ode à l'une de ses filles, un autre moment fort. "Elle a trois ans, je suis fou d'elle" sont les premiers et les derniers mots de la chanson de 1979. Sur scène, Chamfort aime la conclure par une actualisation : "Elle a 44 ans, je suis toujours fou d'elle..." Après toutes ces années, ce titre conserve toute sa force émotionnelle, palpable dans la voix de son compositeur et auprès du public. Et à l'autre bout de ce cheminement musical et personnel, le message des Microsillons, l'un des titres-phares de l'album de 2018, n'en est que plus poignant, avec ses mots sur le temps implacable répétés plusieurs fois, comme une question lancée - aussi - au public : "Lorsque la vie m'aura coupé le son, les chanteras-tu, toutes les chansons ?"

"Personne n'aime personne comme je vous aime"

Entre-temps, les chansons les plus rythmées du programme conservent toute leur vitalité sous la baguette du chef Gwennolé Rufet et de l'orchestre, percussions et soufflants à l'appui. Sur Bambou et Manureva - qui suscite de longues acclamations -, tubes mythiques cosignés avec Serge Gainsbourg, et sur La Fièvre dans le sang, Chamfort ne se prive pas de danser avec son fameux déhanché. La dernière chanson du programme officiel, Personne n'aime personne, s'achève sur un nouveau message destiné au public : "Personne n'aime personne comme je vous aime..." Il est 22h07. Alain Chamfort quitte la scène sous les ovations, l'orchestre salue le public. Puis le chanteur revient remercier les protagonistes du projet symphonique et les auteurs des textes des chansons revisitées : Jean-Michel Rivat, Serge Gainsbourg, Jacques Duvall, Pierre-Dominique Burgaud.

En guise de rappel, Manureva est repris dans un climat effervescent. Puis, le public n'étant toujours pas disposé à partir, Alain Chamfort se dirige vers l'extrême gauche de la scène, où il remplace au piano l'arrangeur de ce beau projet symphonique. Seul, en piano-voix, éclairé par un simple projecteur orangé, il interprète une délicate chanson inédite, Par inadvertance. De bon augure pour ses admirateurs qui craignaient que Le Désordre des choses était son tout dernier disque de chansons originales... Le temps de cet ultime cadeau, un groupe de fans s'est rassemblé au pied de la scène, à quelques pas du piano. Chamfort se lève enfin, se penche et serre quelques mains, traverse la scène sous les acclamations, salue une dernière fois le public enchanté. Souriant, il prend le temps de signer, avec simplicité, quelques autographes. Puis il s'éclipse pour de bon.

La set-list

Ce n'est que moi
Exister
L'Ennemi dans la glace
J'entends tout
Palais Royal
La Fièvre dans le sang
Géant
Sinatra
Chasseur d'Ivoire
Bambou
Le Désordre des choses
En regardant la mer
Manureva
Les Salamandres
Le Temps qui court
Les Microsillons
Personne n'aime personne

[Rappel]
Manureva
Par inadvertance (Chamfort seul en piano-voix pour cette chanson nouvelle)


Alain Chamfort en concert "Symphonique Dandy"
Vendredi 3 juin 2022 : Vannes, Scènes du Golfe, avec l'Orchestre national de Bretagne
Samedi 9 juillet : Mâcon, Esplanade Lamartine
Samedi 17 décembre : Bressuire, Bocapole
(NB : la date du 2 juin à Rennes est annulée)

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