De Daft Punk à Didier Wampas, The Cure et Martial Solal, neuf livres sur la musique à offrir ou à se faire offrir
Besoin d'une idée de dernière minute pour vos présents de fin d'année ? Entre les mémoires cash du punk Didier Wampas ou celles du rappeur d'Assassin Solo, soucieux de remettre quelques pendules à l'heure, il y a le choix. Les détails fourmillants d'anecdotes et de photos de la trajectoire de Daft Punk, l'analyse des chansons de The Cure une par une, une somme de témoignages inédits et éclairants sur David Bowie, un documentaire dessiné sur le punk alternatif français, une BD en forme d'hommage au géant du jazz Martial Solal et un délicieux ouvrage écrit par un rock critic amoureux de l'Angleterre, choisissez celui que vous déposerez au pied du sapin.
"Daft Punk, une vie de robots" de Disco Pogo : un livre éclairant, drôle et bourré d'infos sur le duo casqué
Les débuts, les albums, les concerts, les clips, les films, les influences : la trajectoire des Daft Punk est véritablement passée au crible dans ce livre définitif sur le duo casqué séparé depuis 2021. Fourmillant d'interviews, notamment les premières données par le duo outre-Manche, d'analyses et de témoignages – de l'équipe de son premier label écossais Soma, de son manager Pedro Winter, du prothésiste de Hollywood qui a réalisé leurs fameux casques ou de musiciens comme James Murphy –, l'ouvrage nous a bluffé par sa richesse. Mais ce livre, dense en photos et anecdotes, nous a aussi plu pour son humour – anglais l'humour, les auteurs étant issus de l'équipe du défunt magazine british de la club culture Jockey Slut. Si vous êtes fans du duo, c'est le livre qu'il vous faut. Lire la critique complète (Éditions Marabout, 238 pages, 35 euros)
"The Cure" de Paul Convard : une analyse minutieuse de toutes les chansons du groupe où les propos de Robert Smith sont rois
Alors que le retour discographique cet automne de The Cure après seize ans d'absence avec Songs of a Lost World s'avère somptueux, cet ouvrage sur le groupe de Robert Smith tombe à pic. Il s'agit de l'analyse minutieuse des 235 chansons du groupe, ici décortiquées et éclairées grâce aux propos des musiciens eux-mêmes glanés dans la presse durant quatre décennies. Un travail de fourmi où la parole de Robert Smith, l'âme torturée de ce groupe exigeant et intranquille, tient la première place. Une voix précieuse, dont on suit l'évolution au fil du temps, qui vaut ce livre à elle seule. L'entendre dire combien l'avait bouleversé la mort de Kurt Cobain auquel il pensait en écrivant Numb, ou que la liberté de Jimi Hendrix lui a donné envie d'être chanteur et guitariste, alors qu'il voulait jusque-là être... footballeur, est un délice. (Éditions du Layeur, 288 pages, 36 euros)
"Punk ouvrier" de Didier Wampas : les mémoires cash d'un anti-héros déjanté
Personnage haut en couleur, connu pour ses prestations scéniques flamboyantes, brailleur patenté et musicien amateur pour l'éternité (il joue toujours la guitare avec deux doigts et refuse d'apprendre à mieux jouer), auteur d'une poignée de tubes, dont Petite fille et Manu Chao, Didier Wampas, 62 ans, publie ses mémoires. Dans Punk ouvrier, cet anti-héros parle cash. Il se livre sans détour sur son enfance "dans une famille ouvrière communiste de base", sa jeunesse punk, son job à la RATP où il est resté trente ans, mais aussi ses influences (punk et chanson française) et ses méthodes de travail hors norme (il écrit toujours ses textes au dernier moment). Il commente surtout une à une chaque chanson des Wampas au fil des pages et vous n'êtes pas au bout de vos surprises. Lire la critique complète. (Éditions Harper Collins, 192 pages, 19,90 euros)
"Rainbow+" de Jérôme Soligny : témoignages et confidences pour (re)découvrir le fascinant Bowie
Jérôme Soligny est sûrement le meilleur connaisseur de Bowie en France. Avec ce troisième tome de la biographie de l'artiste mutant, il plonge une fois encore dans l'univers fascinant de L'Homme qui venait d'ailleurs. Dans ce livre de presque 200 pages, ils sont une grosse trentaine à parler de lui, tous de la planète Bowie : amis ou collaborateurs, musiciens ou fans. Parmi eux, Iggy Pop, Peter Framptom, Chrissie Hynde ou Françoise Hardy. Durant quatre décennies, l'auteur a recueilli leurs propos, méticuleusement. À travers ces témoignages, se dégage une image d'un Bowie fascinant, mais loin de l'icône. Ce que confirme l'auteur à franceinfo Culture : "Le Bowie que j'ai connu, c'est quelqu'un qui est l'antithèse de tout ce qui a pu être décrit dans la presse par des gens qui ne le connaissaient pas, mais qui s'arrêtaient à son image. Ce n'était absolument pas un calculateur, ce n'était pas quelqu'un qui avait des plans. C'est quelqu'un qui pensait que l'art reposait sur l'accident et qu'il l'a pensé jusqu'à la fin de sa vie." Lire la critique complète (GM Éditions, 216 pages, 29,90 euros)
"Note mon nom sur ta liste" de Solo : le premier B-Boy français et fondateur du groupe Assassin raconte "son" histoire des débuts du hip-hop en France
Il était là dès les débuts du hip-hop en France, et est un des passeurs numéros un de cette culture entre New York et Paris au début des années 1980. Athlète fondu de break, fondateur du groupe Assassin, producteur, rappeur, proche de NTM dont il a accompagné l'ascension, il a tout vu et tout vécu, fait des faux pas et trébuché plusieurs fois. Aujourd'hui champion de ju-jitsu et armé du recul nécessaire, il prend la plume pour dire "sa" vérité face à la multiplication de ce qu'il considère comme des réécritures et des falsifications de l'histoire. Il ne se donne pourtant pas toujours le beau rôle dans ses mémoires et révèle par ailleurs avec courage avoir été victime à 17 ans d'agression sexuelle de la part d'Afrika Bambaataa qui l'hébergeait à New York. [Fondateur de la Zulu Nation, Bambaataa a eu un rôle d'unification et de structuration du hip-hop, et il a longtemps été considéré comme un demi-dieu par le mouvement… jusqu'en 2016 où ont émergé aux États-Unis les premières accusations d'agressions sexuelles pédophiles à son encontre.] Solo donne aussi la parole dans son livre à plusieurs figures des débuts du mouvement, de Gigi sa compagne d'alors proche du milieu de la mode, à Sophie Bramly, Laurence Touitou, à l'artiste Jonone et au danseur pionnier Mr Freeze. Une lecture indispensable pour tous les amoureux du hip-hop. (Éditions Massot, 356 pages, 22,90 euros)
"Martial Solal, une vie à l'improviste" de Vincent Sorel : une BD en forme d'hommage personnel à un géant du jazz
L'auteur, qui est aussi musicien et adore le jazz, a voulu avec ce roman graphique réaliser "un portrait personnel et subjectif" de son héros Martial Solal, pianiste virtuose et géant du jazz, né à Alger il y a quatre-vingt-dix-sept ans. Sa longue et riche carrière entamée dans les clubs de Saint-Germain-des-Prés l'a mené très tôt aux États-Unis où il a joué avec les plus grands, mais il a aussi œuvré dans la musique de films (À bout de souffle de Godard). En parallèle aux éléments biographiques, Vincent Sorel exprime son point de vue (en dessins aussi) sur la musique de ce grand improvisateur à l'esprit libre. Martial "on ne sait jamais ce qu'il va faire la seconde suivante, il ne se répète jamais (…) Quand il joue un standard (…) il a l'air de chercher jusqu'où il peut déformer une mélodie sans la perdre de vue", écrit-il. Vincent Sorel se met aussi en scène, lorsqu'il va interviewer son héros chez lui en banlieue parisienne et n'en mène pas large. Avec sa BD, il cherchait à retrouver un peu de la liberté du jazz. Il y parvient dans ce bel hommage à l'attachant Solal, qui l'a autorisé à broder sur ce qu'il savait de lui. (Éditions du Layeur, 224 pages, 28 euros)
"Vivre libre ou mourir – Punk et rock alternatif en France 1981-1989" d'Arnaud Le Gouëfflec et Nicolas Moog : un document passionnant en BD
Cet album dessiné est un véritable document sur une décennie de scène rock alternative française, aussi riche qu'un bouquin de 300 pages. Il raconte l'histoire du punk rock français par la voix de ceux qui ont vécu et porté ce mouvement de la jeunesse durant les années 1980. Les auteurs Arnaud Le Gouëfflec (scénario) et Nicolas Moog (dessin) ont rencontré pour cette BD d'innombrables acteurs de ce mouvement, de Jean-Yves Prieur, fondateur de Bondage Records, à Marsu, manager de Bérurier Noir, en passant par l'écrivaine et réalisatrice Virginie Despentes, le documentariste et journaliste David Dufresne, Éric Debris de Metal Urbain, Olivier des Sheriff, ou Éric Sourice des Thugs. Tous fouillent ici leurs souvenirs pour raconter cette histoire bouillonnante, sans langue de bois et avec recul, sans jamais tomber dans la nostalgie. La genèse, l'avènement et la fin du groupe phare Bérurier Noir constituent le fil rouge de ce récit choral chronologique, mais les auteurs font de la place à l'ensemble de la scène et à ses formations moins connues. Le dessin, précis et inventif, sert idéalement ce récit qui palpite à chaque page. Indispensable. Lire la critique complète. (Editions Glénat, 176 pages, 22,50 euros)
"Farewell Yellow Brick Road, souvenirs d'une vie en tournée" d'Elton John : une bête de scène raconte cinquante ans sur la route
"Obsédé par la musique live" depuis toujours, Elton John s'est produit en concert des milliers de fois durant ses plus de cinquante ans de carrière. Dans tous les pays du globe, la flamboyance et la générosité scéniques du chanteur et musicien ont partout enchanté les foules. "Toutes ces nuits passées sur scène à partager mes chansons avec un public sont devenues une partie de moi-même", assure la star. Sa tournée d'adieu, le Farewell Yellow Brick Road Tour, se devait d'être à la hauteur et elle l'a été. La setlist, les musiciens, les décors, la scénographie, les tenues extravagantes (signées Gucci) : rien n'avait été laissé au hasard pour cette série de 330 concerts euphoriques sur cinq ans qui s'est achevée le 8 juillet 2023 à Stockholm après avoir sillonné la planète. Dans ce livre épais et riche en photographies d'hier et d'aujourd'hui, cette bête de scène raconte en détail ce "départ en fanfare" mais revient aussi sur ses souvenirs, sans regret ni nostalgie. D'ailleurs, Elton John, 77 ans, y est très clair : les tournées, c'est terminé, mais pas les concerts. (Éditions Michel Lafon, 256 pages, 39,95 euros)
"Mind The Gap, une vie en Angleterre" de JD Beauvallet : grandeur et bizarreries d'un peuple insulaire par un rock critic et fin observateur
Écrit par le journaliste et cofondateur des Inrockuptibles JD Beauvallet, ce livre entre un peu au chausse-pied dans cette sélection : il ne s'agit pas à proprement parler d'un livre de musique. Il en contient néanmoins nombre d'échos et de références, puisque l'auteur y raconte sa vie de petit Français mordu de sonorités anglaises – il lui arrivait de voir 4 groupes dans 4 salles différentes le même soir – , exilé volontaire outre-Manche durant plusieurs décennies afin de n'en louper aucune miette. De Manchester à Brighton, Liverpool et Londres, il décortique avec délices et analyse avec malice (et une mauvaise foi assumée) les us et coutumes des habitants de ce pays, "où les excentriques forment la norme" derrière "les formes civilisées" et où "le football détermine la météo" mentale. Il tord ce faisant le cou à quelques clichés. La reine Elisabeth, les écureuils roux, l'humour anglais – cet "humour d'allure lugubre mais résolument tordant" – les spécialités culinaires douteuses, telles le toad in the hole, le hooliganisme, les skinheads, tout est passé au crible de son regard tendre ou acéré, souvent drôle. Après quarante ans d'amour, auquel le Brexit, cette "maladie honteuse", a mis un coup d'arrêt, certains rituels de cette île adorée lui restent malgré tout impénétrables, comme celui qui régit la vie au pub, central dans la société anglaise. Normal pour quelqu'un qui assure n'avoir jamais bu une bière de sa vie. (Éditions Braquage, 222 pages, 22 euros)
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