Franck Bauer, dernier speaker français de Radio Londres, est mort à l'âge de 99 ans
Il s'agissait de l'ultime survivant de l'équipe de speakers français qui se relayaient sur les ondes de la BBC. Il avait diffusé des centaines de messages codés à ceux qui luttaient contre l'occupant.
"Ici Londres... Les Français parlent aux Français." Voix de la résistance à l'occupation nazie, Franck Bauer a prononcé cet indicatif à 578 reprises. Il est mort à l'âge de 99 ans, vendredi 6 avril, annonce son fils, l'artiste Axel Bauer. Il s'agissait de l'ultime survivant de l'équipe de speakers français de Radio Londres durant la seconde guerre mondiale. Né en juillet 1918 à Troyes, Franck Bauer est décédé dans sa centième année, à l'hôpital du Cateau-Cambrésis (Nord).
Un timbre de voix censé résister au brouillage allemand
Simple batteur de jazz, il s'était engagé au sein de la France libre dès juin 1940. Après avoir été occupé à des missions de propagande, il avait été engagé comme speaker à Radio Londres par son patron, Jacques Duchesne, qui jugeait que son timbre de voix avait les caractéristiques nécessaires pour résister au brouillage allemand.
Entre mars 1941 et avril 1943, Franck Bauer avait donc fait partie de cette petite équipe de journalistes français qui, sur les ondes de la BBC, se relayaient pour porter l'espoir durant les heures les plus sombres de l'histoire de France. Il avait à ce titre diffusé des centaines de messages codés à ceux qui luttaient contre l'occupant, dont certains étaient restés gravés dans sa mémoire, comme : "Le crabe va rencontrer les serpents" ou "Le cheval envoie ses vœux à Polydore, sa filleule et ses amis".
Outre ces messages secrets qui aident à coordonner les actions des résistants, les speakers de Radio Londres, dont les émissions débutaient par quelques célèbres notes au ton grave issues de la 5e symphonie de Beethoven, relayaient aussi des "messages personnels" et des chroniques destinées à soutenir le moral des Français. A l'époque, pour ces millions de Français qui écoutaient en cachette Radio Londres, "j'étais l'équivalent de PPDA", avait-il raconté en 2009 au quotidien Le Parisien.
"La voix et l'image du speaker de Radio Londres"
Comme il l'avait raconté dans 40 à Londres, la voix de la liberté, livre paru en 2004 aux éditions Bayard, Franck Bauer avait fini par démissionner quelques mois après le débarquement de novembre 1942 en Afrique du Nord, pour ne pas, selon lui, cautionner les messages entérinant la prise de contrôle à Alger de l'amiral Darlan et du général Giraud, au détriment du général de Gaulle.
Il avait alors été envoyé à Madagascar, pour y prendre en main la radio des Français libres. Mais avant d'accepter, il avait fait promettre à Maurice Schumann, autre camarade de Radio Londres, de le prévenir à temps pour pouvoir prendre part au Débarquement en France. Une promesse tenue, mais après des étapes à Alger et en Ecosse, Franck Bauer ne touchera le sol normand qu'en juillet 1944.
Après la libération, il travaille comme reporter de guerre aux Nouvelles du matin, puis à l'AFP, et entre au ministère de la Culture. Il fut par la suite secrétaire général de la Comédie-Française, fondateur du premier cabinet de relations publiques en France, professeur à la Sorbonne et commissaire de l'Exposition universelle de 1967, à Montréal.
Dernier survivant de cette équipe, "c'est de lui dont on retient la voix et l'image du speaker de Radio-Londres" dans les archives de l'époque, et il avait participé à d'importantes commémorations, notamment en 2010 à Londres pour le 70e anniversaire de l'appel du général de Gaulle, a rappelé son fils, Axel Bauer.
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