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Ayrault présente son plan d'investissements : comment investir sans creuser le déficit ?

C'est le défi que doit relever le Premier ministre avec son plan d'investissements pour dix ans, orienté vers les secteurs d'avenir. 

Article rédigé par Marie-Adélaïde Scigacz
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Un TGV passe sur le viaduc de Verberie, dans l'Oise.  (LIONEL LOURDEL / PHOTONONSTOP / AFP)

La promesse date de mai 2013. Au moment de fêter sa première année à l'Elysée, François Hollande avait indiqué que son quinquennat se déroulerait en deux étapes. Celle "des réformes difficiles mais indispensables", puis "une phase de dépassement, pour permettre de changer de modèle et de vivre mieux". Cette nouvelle ère, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, doit l'inaugurer mardi 9 juillet en détaillant le contenu de son plan d'investissements sur dix ans, doté d'une enveloppe de 10 milliards d'euros. Mais cette bouffée d'air frais à destination de l'économie, censée à terme encourager la croissance, ne signifie en rien la fin du serrage de ceinture.

Alors que la dette publique de la France doit atteindre 94,3% du produit intérieur brut (PIB) en 2014 (un record), le gouvernement doit relancer la croissance sans creuser davantage le déficit. Comment investir en gardant le cap du sérieux budgétaire ?

Savoir faire des choix 

"Le numérique, la transition énergétique, la santé et les grandes infrastructures de transport", sont les secteurs désignés dès le mois de mai par François Hollande. Outre des chantiers déjà engagés, comme le haut-débit ou le Grand Paris, l'Etat devrait investir 400 millions d'euros supplémentaires par an dans le budget de l'Agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF). 

Dans le même temps, de nombreux projets devraient passer à la trappe. Dans le domaine des transports, le plan présenté par Jean-Marc Ayrault devrait remettre à 2030, voire à plus tard, les investissements colossaux (250 milliards d'euros sur vingt ans) prévus par le gouvernement précédent. Conformément aux recommandations du rapport Duron, remis le 27 juin à Jean-Marc Ayrault, le plan préconise la sortie du tout TGV (seule la construction de la ligne Bordeaux-Toulouse reste à l'agenda) au profit de l'entretien et de la rénovation du réseau existant. Pour cela, 28 à 30 milliards d'euros doivent être investis d'ici 2030. 

Miser sur l'attractivité et la compétitivité 

Il est primordial de relancer la croissance. Les Echos ont révélé lundi que la principale mesure de ce plan serait de "'réabonder' le programme d'investissements d'avenir (PIA) issu du 'grand emprunt' de Nicolas Sarkozy", en 2010 : concrètement, il s'agit de débloquer entre 10 et 12 milliards d'euros pour prendre le relais des 35 milliards du plan précédent. 

"Un plan comme celui-ci, s'il est tourné vers le développement d'infrastructures, vers l'éducation, la recherche etc., devient un argument en faveur de la compétitivité et de l'attractivité d'un pays : par exemple, les investisseurs étrangers citent systématiquement la qualité des infrastructures françaises, résume pour francetv info Mathieu Plane, économiste à l'OFCE. Un pays qui n'a pas de dettes, mais pas d'infrastructures, n'est pas attractif."

Dans un contexte de crise, le défi consiste à continuer d'investir : "La France est un pays qui a une tradition d'investissement public assez importante, notamment de la part des collectivités locales. Pour servir à quelque chose, ce plan doit donc s'ajouter aux investissements publics déjà budgetés," précise l'économiste. D'ailleurs, "rien n'indique qu'il est mauvais de s'endetter dans le cadre d'investissements, poursuit-il. Le but d'un investissement est de rapporter plus qu'il n'a coûté. Il génère une dette tout en constituant un actif."

De plus, par sa structure, le recours au PIA génère peu de dettes : et pour cause, les sommes sont distribuées au compte-gouttes et se composent en partie de financements en "dotations non consommables", rappellent Les Echos. C'est à dire que l'argent est placé sur un compte du Trésor. "Seuls les intérêts sortent réellement des caisses de l’administration et viennent alourdir la dette et le déficit au sens de Maastricht", expliquait en 2011 L'Express. 

Trouver de l'argent hors des caisses de l'Etat

A l'époque du grand emprunt, en 2010, la France avait levé 22 milliards d'euros. Mais cette fois, hors de question d'alourdir la dette. Et ce, alors que "la France a l'avantage d'avoir des taux d'intérêt relativement bas, indique Mathieu Plane. Nous avons toujours cette épée de Damoclès au-dessus de la tête, cette peur de franchir un seuil au-delà duquel les marchés considéreraient que la France n'est plus raisonnable." Ainsi, si emprunt il y a, il devrait ne concerner qu'une partie minime du financement de ce plan, "ne serait-ce que pour ne pas effrayer les marchés".

Côté financement, le gouvernement privilégierait la vente de participations de l'Etat dans des entreprises. Ce processus a déjà commencé : début juillet, l'Etat français et le Fonds stratégique d'investissement (FSI) ont décidé de céder 9,5% du capital d'Aéroports de Paris à Predica, filiale d'assurance de Crédit agricole, et à Vinci pour un montant total de 738 millions d'euros. En avril dernier, l'Etat a récupéré 700 millions d'euros en vendant des titres EADS. Il "pourrait continuer à se délester d'une partie de son portefeuille composé entre autres de titres Air France, Thales, EDF, GDF ou Orange", poursuit BFMTV. Pour le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, interrogé fin juin sur i-Télé, cette stratégie ne présume d'ailleurs pas du "retour des privatisations mais [d'] une gestion fine du capital de l’Etat, en conservant son rôle d’Etat stratège".

BFMTV rappelle que François Hollande a déjà évoqué d'autres pistes, telles "puiser dans le Livret A, et faire intervenir la Banque publique d'investissement. Le chef de l'Etat veut aussi s'appuyer sur le secteur privé [et] a prévenu que des fonds étrangers pourraient participer (...)", poursuit la chaîne. 

Ne pas perdre de vue les objectifs de réduction du déficit

Selon les orientations présentées mardi dernier à l'Assemblée nationale, la France consentira un effort de 20 milliards d'euros en 2014 pour réduire ses déficits publics. "A côté de cela, on évoque des investissements à hauteur d'un milliard par an sur dix ans. Nous ne sommes pas dans le même ordre de grandeur", relativise Mathieu Plane.

En autorisant plusieurs pays à repousser leurs objectifs de retour à l'équilibre budgétaire, et en consentant à ce que la Banque européenne d'investissement mette 120 milliards pour la croissance, l'Union européenne a quant à elle "lâché du lest". Mais elle reste déterminée à pousser les pays vers la réduction de leur déficit.

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