Les œuvres d'art dans l'ISF, le débat en 4 adjectifs
Les œuvres d'art ne seront finalement pas incluses dans l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune. FTVi vous dit tout sur l'amendement mort-né.
POLITIQUE – La proposition d'intégrer les œuvres d'art dans le calcul de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) a fait long feu. Alors que les députés entament mardi 16 octobre l'examen du projet de budget 2013, Jean-Marc Ayrault a vivement écarté cette idée au micro d'Europe 1, expliquant que "la position du gouvernement" à ce sujet était "très claire". Quelques heures après, les députés PS se sont rangés à son avis.
Les positions sur la question dépassent pourtant le clivage droite-gauche traditionnel. FTVi a décidé de récapituler les arguments des uns et des autres. Selon les points de vue, l'intégration des œuvres d'art à l'ISF est donc...
... juste
C'est l'avis du rapporteur général du Budget à l'Assemblée nationale, Christian Eckert (PS), à l'origine de cette proposition. Il la défend dans un entretien aux Echos le 9 octobre, expliquant ne pas vouloir "taxer la culture mais proposer une mesure d'équité", avant de la détailler le lendemain lors de l'examen du projet de loi de finances.
"Je propose d'assujettir à l'ISF les œuvres d'art dont la valeur est supérieure à 5 000 euros [après débat, ce seuil a été rehaussé à 50 000 euros], si elles ne sont pas exposées dans un lieu accessible au public pendant une durée et dans des conditions définies par décret", explique-t-il en commission. Les œuvres d'art prêtées à des musées, ou simplement exposées temporairement lors d'évènements comme les Journées du patrimoine, échapperaient ainsi à la taxation.
Il s'agirait en outre, comme l'indique le député UMP Marc Le Fur lors du débat en commission, d'éviter que certains se servent de l'art comme d'une "valeur refuge". "Alors que la résidence principale est incluse dans l'assiette de l'ISF, comment comprendre que les œuvres d'art en soient exclues ?", s'interroge le parlementaire, favorable à la mesure.
Reste que l'idée, estime Eckert, est de montrer que les efforts sont partagés par tous en temps de crise. "Une telle mesure, souvent proposée", explique-t-il lors de la même commission, "prendrait tout son sens en cette période où nous demandons des efforts à certains de nos concitoyens". Mais il reconnaît dans les couloirs de l'Assemblée qu'elle ne rapporterait tout au plus à l'Etat que "quelques dizaines de millions, en tout cas en dessous de 100 millions d'euros".
Cette proposition rapporterait si peu d'argent essentiellement parce qu'il est "plus que probable qu'une grande partie [des œuvres] ne seraient pas déclarées", explique Libération mardi 16 octobre. Quant à celles qui le seraient, encore faudrait-il pouvoir estimer leur valeur de manière objective.
"Comment imaginer que des inspecteurs des impôts, qui devraient être experts en art, procèdent à de tels contrôles au sein de toutes les résidences concernées ?" s'était ainsi exclamé le député de l'UDI Charles de Courson lors de l'examen de l'amendement en commission.
C'est l'avis de plusieurs directeurs d'établissements prestigieux, rejoints par plusieurs maires socialistes de grandes villes comme Bertrand Delanoë (Paris), Martine Aubry (Lille) ou encore Gérard Collomb (Lyon). Dans une lettre envoyée à la ministre de la Culture vendredi 12 octobre, les président du Louvre, du Château de Versailles, ou encore du Centre Pompidou s'insurgent contre ce qu'ils estiment être une "menace", qui planerait "sur la poursuite de l'enrichissement de [leurs] collections et la diffusion au plus grand nombre des œuvres d'art publiques et privées".
Ils redoutent en fait que cette réforme nuise au dispositif de la dation, "qui permet le paiement de certains impôts en nature, sous forme d'œuvres d'art", et participe ainsi à l'enrichissement de leurs collections. "Il est à craindre qu'une taxation (...) n'entraîne un départ des œuvres pour l'étranger", s'étaient-ils alarmés.
Ils redoutent en outre "que pour faire face au paiement de l'impôt beaucoup de propriétaires, qui n'ont pas nécessairement d'autre fortune que ces œuvres d'art, ne les vendent". Leurs arguments ont semble-t-il achevé de convaincre le gouvernement d'abandonner ce projet.
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