"Valls savait qu'il n'aurait pas de majorité" sur la loi Travail, affirme un ex-conseiller d'El Khomri
Pierre Jacquemain a démissionné de son poste de conseiller de la ministre du Travail en mars, affichant son hostilité au "virage libéral" pris par le texte.
Le 1er mars dernier, il a décidé de claquer la porte bruyamment. Le 4 mai, dans les colonnes du Parisien, il a choisi de parler. Pierre Jacquemain, l'ancienne plume de Myriam El Khomri, y affirme que c'est Matignon, et non la ministre, qui a pris les commandes de l'élaboration de la loi Travail actuellement en examen à l'Assemblée.
Selon lui, Manuel Valls est "prêt depuis la première heure au 49.3" : "Dès le moment où le gouvernement a décidé de construire un texte particulièrement libéral et droitier, qui renonce aux fondamentaux de la gauche, ce scénario [de l'utilisation de l'article 49.3] était sur la table, déclare Pierre Jacquemain. Manuel Valls savait qu'il n'aurait pas de majorité sur ce texte. Et il n'a d'ailleurs jamais cherché à obtenir une majorité de gauche."
Le conseiller, qui se revendique de gauche sans appartenir à aucun parti, explique qu'avant de quitter le ministère, certains de ses collègues conseillers, et même certains ministres, lui disaient : "Tu travailles pour la ministre du 49.3."
Une interview aux "Echos" modifiée par Matignon
L'ex-conseiller affirme que le Premier ministre est en fait, "depuis janvier, le véritable instigateur du projet de loi actuel". Selon lui, la feuille de route de Myriam El Khomri n'était pas "celle qui crée aujourd'hui autant de crispations". Cela devait être un "tournant social du quinquennat", basé principalement sur le compte personnel d'activité. La ministre aurait même gagné des arbitrages contre Emmanuel Macron, notamment sur les licenciements économiques et le plafonnement des indemnités prud'homales.
C'est mi-février que Matignon aurait définitivement repris les rênes du texte. Pour Pierre Jacquemain, cette prise en main date de l'interview de Myriam El Khomri publiée dans Les Echos. La ministre "y expliquait qu'elle ne souhaitait pas recourir au 49.3, qu'elle croyait au débat parlementaire, décrit l'ancien conseiller. Lors de la relecture de cette interview avant parution, (...) Matignon avait corrigé : 'Nous prendrons nos responsabilités.' Sous-entendu, le recours au 49.3 était clairement affiché."
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.