Pierre Gattaz contre la CGT : retour sur la polémique en quatre actes
Le numéro 1 du Medef est revenu, mercredi, sur l'utilisation du mot "terroriste" pour qualifier les militants de la CGT à l'origine des blocages liés au conflit autour de la loi Travail.
Après avoir essuyé les critiques d'une grande partie de la classe politique, dont le Premier ministre, et après avoir été l'objet d'une plainte en diffamation, le président du Medef regrette finalement d'avoir qualifié de "terroristes" les méthodes de la CGT dans la contestation contre la loi Travail. Un rétropédalage de Pierre Gattaz qui intervient, mercredi 1er juin, trois jours après la publication de son interview au Monde. Retour sur cette polémique en quatre actes.
Acte 1 : Pierre Gattaz allume la mèche et compare la CGT à "des voyous, des terroristes"
Deux mois et demi après le début de la contestation contre le projet de loi Travail, le patron des patrons tape du poing sur la table, dans une interview publiée lundi 30 mai par Le Monde. Pierre Gattaz exprime le"ras-le-bol" des dirigeants d'entreprise, pénalisés selon lui par les blocages (qui ont notamment provoqué des pénuries d'essence pour les artisans). Il fustige la CGT qui, selon lui,"dérive", "se radicalise", "se politise". "Pour moi, le sigle CGT est égal à chômage", assure-t-il encore.
Faire respecter l’Etat de droit, c’est faire en sorte que les minorités qui se comportent un peu comme des voyous, comme des terroristes, ne bloquent pas tout le pays.
"Quand le syndicat du Livre-CGT empêche la parution de quotidiens au motif que ceux-ci ont refusé de publier le tract de Philippe Martinez, il me semble que l'on est dans une dictature stalinienne. C'est très grave", estime le président du Medef, qui appelle aussi le gouvernement à ne surtout "pas toucher à l'article 2" du projet de loi Travail, qui fait prévaloir les accords d'entreprises sur la convention collective.
Acte 2 : une grande partie de la classe politique se démarque de ses propos
Le gouvernement, la CFDT, syndicat concurrent de la CGT, mais aussi des élus de l'opposition... La condamnation des propos tenus par le patron du Medef est quasi-unanime. Myriam El Khomri, ministre du Travail, "ne partage absolument pas ces mots de Pierre Gattaz". La ministre dénonce "l'outrance" de ces propos, les jugeant "choquants, bien évidemment", tout en soulignant qu'il y avait "eu aussi parfois de [la part de] Philippe Martinez des mots qui ont été durs de la même manière".
Pour le Premier ministre, les déclarations du président du Medef ne sont "pas acceptables".
J'ai appelé chacun, dans ce moment où il y a des tensions, à être au niveau du débat et c'est pour ça que j'ai fermement condamné les propos de Pierre Gattaz.
"Les propos tenus cet après-midi sont inacceptables", a également dénoncé Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT. "Tout le monde sait ce que c'est, un terroriste, malheureusement, dans ce pays (...). Il ne faut pas confondre les choses", a-t-il ajouté. A droite aussi, on se démarque de Pierre Gattaz. "Il y a des termes qu'il ne faut pas employer. (...) Ce n'est pas la peine de jeter de l'huile sur le feu. Je regrette ces paroles", explique mardi Dominique Bussereau, député des Républicains et ancien secrétaire d'État aux Transports sur BFMTV. Même son de cloche pour Brice Hortefeux, député européen Les Républicains et ancien ministre de l'Intérieur. "Chacun s'exprime avec son tempérament, avec son histoire et les mots prononcés ne sont pas ceux que j'aurais spontanément utilisés", réagit ce proche de Nicolas Sarkozy sur Europe 1.
Acte 3 : la CGT va porter plainte contre Pierre Gattaz
Mardi, la CGT riposte. Dénonçant des propos "scandaleux", Philippe Martinez "a décidé de porter plainte pour diffamation". "C'est un appel à l'insurrection contre la CGT, en tout cas à des violences contre la CGT", estime le secrétaire général du mouvement syndical.
Acte 4 : Pierre Gattaz finit par esquisser un mea culpa
Face au tollé suscité par ses propos, Pierre Gattaz revient finalement, mercredi, sur l'utilisation du mot "terroriste" pour qualifier les militants de la CGT. Une reculade, mais pas d'excuses. "Ce mot a été mal compris et peut choquer, notamment les personnes qui ont été touchées par les événements récents qui ont endeuillé notre pays", écrit le numéro un du Medef. "Ce n'était évidemment pas mon intention. Le mot 'terrorisme' était donc inadapté dans ce contexte", reconnaît-il.
Toutefois, Pierre Gattaz insiste : "Mais les méthodes de voyous employées par la CGT doivent cesser." "Menacer les salariés et les chefs d'entreprise, chanter que 'les patrons, ça ne mérite que la pendaison', revendiquer de 'bloquer l'activité économique' d'une région ou d'un pays, parler de 'terrorisme patronal' dans ses tracts... Ce sont des actes qu'il faut dénoncer et qui démontrent une conception affligeante du dialogue social", estime-t-il.
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