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Télétravail : ce qu'il faut retenir de l'étude de la CGT, qui pointe les inconvénients de ce nouveau mode d'organisation

Il est plébiscité par les salariés. Mais il s'est souvent accompagné d'une hausse du temps de travail et de stress supplémentaire, selon une étude de la centrale syndicale.

Article rédigé par franceinfo
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Une salariée télétravaille depuis son domicile de Montaigu-Vendée, en Vendée, le 30 juin 2021. (MATHIEU THOMASSET / HANS LUCAS)

Oui, mais... Plus de 10 000 salariés ont répondu à un questionnaire de l'Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens de la CGT sur le télétravail, avec des appréciations en demi-teinte. Quels sont les principaux enseignements à retenir de cette étude ? "Le télétravail en mode dégradé du premier confinement reste la norme", affirme la centrale syndicale.

Si le télétravail est plébiscité par les salariés de manière générale, il suscite aussi des réserves. Il est notamment jugé chronophage, d'autant plus qu'une majorité d'entreprises ne respectent pas le droit à la déconnexion. Voici ce qu'il faut retenir de cette enquête réalisée de mai à juin 2021 avec l'aide de statisticiens du syndicat travaillant pour les statistiques publiques.

Il est essentiellement exercé par l'encadrement

Le télétravail reste d'abord exercé par les cadres, confirme cette étude. Les télétravailleurs "sont à 51% des cadres et 31% des professions intermédiaires", relèvent les auteurs, pour qui "le télétravail devient un marqueur de l’encadrement au sens large". "Loin d'être une pratique étendue à l'ensemble des salariés, le télétravail a été généralisé aux catégories socioprofessionnelles qui en bénéficiaient auparavant", estiment-ils.

Il est plébiscité par les salariés

"Malgré des conditions dégradées, relève l'étude, le télétravail est plébiscité comme vecteur de temps libéré et d'autonomie au travail." Il répond en effet "à une forte aspiration à l’autonomie et permet à 71% des répondants d’avoir davantage de souplesse sur leurs horaires et de gagner ainsi une meilleure articulation des temps".

"Une majorité de répondants se dit moins fatiguée, notamment du fait de la disparition des temps de trajets et d’un temps de travail non contraint."

L'UGICT-CGT

dans sa "Grande enquête sur le télétravail"

Conclusion logique, "presque toutes les personnes interrogées souhaitent continuer à télétravailler mais pas à temps plein". Enfin, "70% des répondants s’estiment plus efficaces", ce qui confirme les gains de productivité attestés par certaines études.

Il se traduit par une augmentation du temps de travail

Sérieux bémol à ce point positif : "L'enquête démontre une forte augmentation du temps, de la charge et de l'intensité du travail des salariés en télétravail."  

"Les frontières vie professionnelle-vie personnelle sont toujours plus floues. Deux tiers des répondants déclarent recevoir des sollicitations durant leurs périodes de congé, dont 10% tout le temps !"

L'UGICT-CGT

dans sa "Grande enquête sur le télétravail"

"Une large majorité d’employeurs n’a pas mis en place les dispositifs prévus par le Code du travail" , selon le syndicat, qui aligne quelques chiffres : "60% d'entre eux n’ont pas mis en place de dispositif pour garantir le droit à la déconnexion, 55% n’ont pas défini les plages horaires durant lesquelles les salariés en télétravail sont joignables, 75% n’évaluent ni la charge de travail, ni le temps de travail des salariés en télétravail."

L'étude relève que, dans ce domaine, "les inégalités se renforcent entre les petites entreprises, avec peu ou pas de représentants du personnel, et les plus grosses", qui ont davantage signé des accords. Deux tiers des personnes ayant répondu au questionnaire jugent qu’avec le télétravail, leur fonction est "plus chronophage, plus stressante et entraîne davantage de charge mentale".

Les salariés paient tout ou partie des frais

Autre problème largement soulevé : "La prise en charge des équipements et des frais de télétravail par l’employeur reste minoritaire et limitée à l’ordinateur portable."

"Près de 7 répondants sur 10 disent que leur employeur ne participe pas, même partiellement, aux frais engendrés par le télétravail."

L'UGICT-CGT

dans sa "Grande enquête sur le télétravail"

Seuls "40% ont un écran adapté financé par leur employeur", seuls  "10% des répondants dispose d’un siège ergonomique financé par l’employeur", seuls "8% des répondants indiquent que l’employeur prend en charge l’intégralité des consommables (ramettes de papier, cartouches d’encre…)", énumère l'étude.

Pour 19% des répondants, le télétravail s’est traduit par une remise en cause de la participation de l’employeur aux frais de repas existants en présentiel (tickets restaurants…)"Depuis plus d’un an, nous avons dû nous battre pour obtenir des remboursements de frais liés au travail à domicile", témoigne une enquêtrice par téléphone pour un institut de sondage. Enfin, un tiers des salariés disent ne pas avoir d’espace dédié et isolé pour télétravailler. Dans ce tiers, les femmes sont surreprésentées.

Parallèlement, ceux qui retournent en présentiel estiment que leurs conditions se détériorent. "Le télétravail relance les réorganisations de locaux : plus d’un tiers des répondants disent qu’un passage en open space et/ou flex office est en cours, une majorité la considérant négativement", selon l'étude.

Son bilan sur la santé au travail n'est pas bon

Quelque 40% des salariés interrogés se plaignent de troubles musculo-squelettiques ou de migraines oculaires.

"Les troubles musculo-squelettiques augmentent en cas de fréquence élevée du télétravail : 34% des salariés qui télétravaillent 1 jour ou moins par semaine ressentent des douleurs, 36% pour celles et ceux qui télétravaillent 2 ou 3 jours, mais 41% parmi ceux qui télétravaillent 4 ou 5 jours."

L'UGICT-CGT

dans sa "Grande enquête sur le télétravail"

La santé mentale est également affectée : "45% des répondants sont en alerte dépressive et 19% présentent un symptôme dépressif, d'après l'échelle définie par l'Organisation mondiale de la santé", analysent les auteurs. En 2021, "deux personnes sur trois disent avoir déjà senti de l'isolement au télétravail".

La situation est "particulièrement dégradée pour les femmes, les agents de la fonction publique et des petites entreprises", ainsi que lorsque le droit à la déconnexion n'est pas respecté, conclut l'étude. Les femmes sont d'ailleurs plus pénalisées par le télétravail, notamment parce qu'il leur incombe plus souvent d'assumer également la garde des enfants et qu'elles sont moins libres de leurs horaires au travail.  

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