Départ de Barkhane de Tombouctou : "On s'est engagés mais on n'est pas allés au bout du processus", estime un spécialiste de la sécurité internationale
La France réduit sa présence au Mali. Les soldats de la force Barkhane ont quitté Tombouctou au Mali ce mercredi. La fin de neuf ans de présence.
"On s'est engagés mais on n'est pas allés au bout du processus", a estimé sur franceinfo Peer De Jong, vice-président de Themiis, une société de formation militaire et de police qui travaille notamment au Sahel, et ancien aide de camp de Jacques Chirac, alors que la force Barkhane a quitté Tombouctou, au Mali, après neuf ans de présence.
franceinfo : Que représente ce départ ?
Peer De Jong : C'est symbolique parce que c'est la grande ville du Nord qu'on va abandonner. C'est logique parce que depuis qu'on a quitté Tessalit et Kidal cela fait partie d'un dispositif qui va se concentrer principalement sur la région des trois frontières. On se recentre sur Gao pour les forces terrestres et les forces aériennes vont se positionner à N'Djaména.
Est-ce le bon dispositif que prend la France avec plus d'activités de renseignements, moins d'effectifs conventionnels ?
Le regard qu'ont les Africains sur nous s'est transformé. On s'est engagés mais on n'est pas allés au bout du processus. Il aurait fallu tripler les effectifs pour pouvoir être plus efficaces. Il n'y a pas le choix quand vous avez 2 000 hommes de moins. La jauge prévue pour l'année prochaine c'est à peu près 3 000 hommes donc 1 000 au Mali et 2 000 à N'Djaména, donc cela fait partie d'un dispositif qui s'est rétracté et qui va encore évoluer en fonction des discussions que le président va avoir la semaine prochaine. Si le Mali engage des discussions sérieuses avec Aqmi à ce moment-là la France reverra son objectif et on pourra aller très vite vers un départ du Mali. Aujourd'hui, les Africains comprennent mal pourquoi on ne va pas au bout du processus et ils cherchent des alternatives, comme négocier avec les Russes.
La France mise sur une montée en puissance des armées locales. Est-ce que vous les accompagnez avec Themiis ?
On est sur des discussions extrêmement sérieuses avec les Maliens qui ont une armée dynamique, qui fonctionne relativement bien. Le problème c'est qu'ils sont confrontés à une situation qui est incontrôlables dès lors que vous avez l'ensemble des campagnes, du moins dans le Nord, qui sont tenues par des forces terroristes ou antigouvernementales, c'est extrêmement compliqué. C'est une armée qui fait ce qu'il faut et je pense que la future mission de l'armée française sera l'appui, le renseignement, l'intervention et le coaching.
Est-il possible de vaincre totalement les jihadistes au Sahel ?
Quand vous avez 2 000 ou 3 000 hommes, il est hors de propos d'imaginer que vous pouvez contrôler l'ensemble de ces pays. Donc c'est incontrôlable par la surface. Il faut absolument mettre en place des dispositifs de sécurité et de développement et il faut que les populations éloignées de la capitale puissent avoir le bénéfice d'une amélioration. Il faut amener de l'eau, mettre en place des soins, de l'éducation. L'armée peut y participer.
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