: Vidéo Harcèlement dans l'armée : "Le jour où on arrive, on entend gueuler : 'Ah, un nouveau jouet !'"
Bizutages violents, harcèlement, traitements dégradants, coups… contrairement à ce que prône son ministère de tutelle, l'armée ne serait pas toujours exemplaire. "Complément d'enquête" a recueilli de nombreux témoignages qui dénoncent des faits graves. Tel celui de Franck, ancien mécanicien sur la base aérienne de Nancy-Ochey... où il n'est pas le seul à avoir porté plainte.
Malgré les déclarations officielles et en contradiction avec les valeurs prônées par l'armée de l'air, les bizutages violents, parfois suivis de brimades sur le long terme, n'y seraient pas rares. Depuis quelques années, une base aérienne est particulièrement décriée : celle de Nancy-Ochey, en Meurthe-et-Moselle. Six de ses militaires ont déposé plainte au pénal pour des faits de violence physique, de harcèlement moral et sexuel.
Dans cet extrait de "Complément d'enquête" du 6 janvier 2022, un ancien mécanicien témoigne sous couvert d'anonymat. A 19 ans, major de sa promotion, il avait choisi Nancy-Ochey comme première affectation. Après quatre années sur la base, Franck souffre d'une grave dépression, au point d'avoir envisagé le suicide. Le calvaire aurait commencé dès son arrivée, raconte-t-il.
"Le premier jour où on arrive, on entend gueuler dans le hangar : 'Ah, un nouveau jouet !' (...) C'était moi : j'étais jeune, j'étais le jouet, j'étais celui avec qui on va pouvoir s'éclater, on va pouvoir rigoler…"
Franck, ancien mécanicien dans l'armée de l'airà "Complément d'enquête"
Moqueries et insultes homophobes s'enchaînent, selon lui. Quelques semaines plus tard, une randonnée d'intégration en montagne aurait viré au cauchemar. Des sacs à dos remplis d'alcool, et pour Franck, interdiction de manger mais obligation de boire du rhum pur. Il se retrouve vite à moitié nu, les jambes de son pantalon découpées par l'un des sergents. Puis jeté dans un camion. "On est 20 dans la benne, et là, je me fais frapper de tous les côtés, poursuit-il. Des coups de pied, des baffes, des fessées… Je sais plus où j'en suis, je suis paumé (...). Et ça fait rire. Ça fait rire, c'est marrant."
Une hiérarchie complice ?
Arrivé à destination, au chalet, les choses auraient encore empiré pour Franck. En présence de dizaines de militaires, son "parrain", un sergent-chef, lui aurait ordonné d'insulter les mécaniciens-armuriers, les "pétafs" dans le jargon de l'armée. Il finit par s'exécuter. "Et là, il y a une dizaine de mecs qui viennent me frapper, me tabasser, affirme-t-il. Ils m'ont baissé le pantalon, le caleçon, j'ai pris des fessées, des coups de pied dans la tête, dans les bras, les jambes… Et beaucoup, ça les fait marrer. Il y en a plein qui regardent parce que c'est marrant. Je parle de toute la hiérarchie, hein. Que vous soyez sergent ou adjudant-chef, il y en a certains, ça les fait marrer, c'est rigolo."
Selon Franck, un lieutenant-colonel aurait fini par intervenir pour faire cesser les violences. Joint par "Complément d'enquête", ce dernier dit n'avoir aucun souvenir de cette journée. L'ancien mécanicien a fini par saisir la cellule Thémis, dédiée à la lutte contre le harcèlement sexuel dans l'armée. Une enquête est actuellement en cours pour des faits de harcèlement et violences volontaires.
Extrait de "Harcèlement dans l'armée : des militaires brisent le silence", un document à voir dans "Complément d'enquête" le 6 janvier 2022.
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