Dépôts de plaintes pour violences conjugales : "Nous avons des marges de progression dans l'accueil des victimes"
Michel Lavaud, chef du service d'information et de communication de la police nationale reconnait qu'il peut y avoir des dysfonctionnements dans l'accueil des victimes.
"Nous avons évidemment, comme toutes les institutions, des marges de progression dans l'accueil, l'accompagnement des victimes", a concédé le commissaire Michel Lavaud, chef du service d'information et de communication de la police nationale mardi 3 septembre sur franceinfo, alors que le Grenelle des violences conjugales s'ouvre ce jour et jusqu'à la fin novembre.
"Il faut se mettre à la place des victimes", a dit le commissaire. "Ce que demande la victime, c'est de parler et d'être entendue. Les victimes qui ont reçu un accueil qui ne correspondait pas à ce qu'elles attendaient peuvent écrire au chef du commissariat de police, au procureur de la République, peuvent saisir l'IGPN pour indiquer dans quelles conditions elles ont été reçues", explique Michel Lavaud. Le commissaire a cependant rappelé que "83 % victimes des violences conjugales ne déposent pas plainte" aujourd'hui en France.
franceinfo : Est-ce la police qui détient la clé du problème aujourd'hui ? Est-ce à la police et la gendarmerie de changer pour que les choses changent ?
Michel Lavaud: Nous sommes une partie des intervenants, mais nous ne sommes pas tous les intervenants. Une étude de l'Insee de 2018 a montré que 83 % des victimes de violences conjugales ne déposaient pas plainte. Cela souligne l'ampleur du phénomène.
Peut-être que les femmes ne portent pas plainte car l'accueil n'est pas à la hauteur aujourd'hui dans les commissariats ?
Lorsqu'une victime de violences conjugales se présente dans un commissariat, c'est la rencontre entre un drame absolu, un drame de l'intime, qui se déroule dans un appartement ou une maison, avec un policier, qui lui est dans la technique, dans la procédure. Le policier est déjà en train d'imaginer une enquête, donc vous avez une technicité qui peut paraître froide.
Quand un policier pose une question à une victime de violences conjugales, cela ne veut pas dire qu'il doute de la victime, cela veut dire qu'il est en train de raisonner en termes d'enquête, car il sait que dans le cadre du principe contradictoire, la déclaration de cette victime sera soumise à d'autres éléments... Donc il est important que les premiers contacts soient effectivement techniques, procéduraux.
Les dysfonctionnements, quand ils existent, ne doivent pas occulter l'extrême engagement des policiers et des policières, je pense notamment à ceux qui sont dans les brigades locales de protection de la famille et qui sont spécialisés en la matière.
Allez-vous développer les services dédiés dans tous les commissariats ?
Il faut se mettre à la place des victimes. Quand vous êtes victimes de violences conjugales, que vous habitez une grande métropole, vous allez vous retrouver devant les commissariats de Nantes, de Bordeaux, de Toulouse, ce sont des gros bâtiments. Vous vous demandez alors à qui vous allez parler et comment vous allez parler. C'est là qu'est utile tout le travail d'accompagnement. Il y aussi un grand nombre d'associations qui luttent contre les violences faites aux femmes qui ont des permanences dans nos commissariats, il y en a plus de 400. Ces associations facilitent la verbalisation, facilitent le fait de raconter l'enfer vécu. C'est cette libération de la parole qui est facilitée par nos partenaires sociaux, psychologues dans les commissariats, les assistantes sociales.
Le policier doit ensuite avoir suffisamment de formation juridique, relationnelle, technique, pour essayer aussi d'aider la victime à se libérer, car bien souvent, les victimes ont du mal à verbaliser.
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