Logement : près de la moitié des agences immobilières accèdent aux exigences discriminatoires des propriétaires, selon SOS Racisme
Trois ans après la précédente, SOS Racisme a mené une nouvelle campagne de testing. L'association constate que les discriminations raciales pour les locations sont encore très répandues.
Un nouveau testing réalisé par SOS Racisme, publié lundi 21 mars et auquel franceinfo a eu accès, révèle que 48,50% des 136 agences immobilières testées accèdent aux exigences discriminatoires des propriétaires dont elles gèrent le logement. Pour réaliser cette opération, les militants de SOS Racisme ont contacté par téléphone des agences immobilières de plusieurs villes de France en se faisant passer pour des propriétaires réclamant ces discriminations.
Sur l’échantillon testé, les personnes d’origine maghrébine ou subsaharienne, alors même qu’elles rempliraient toutes les conditions de solvabilité, "ont une chance sur deux de contacter une agence qui accepterait de pratiquer ou de laisser pratiquer une discrimination à leur endroit", déplore SOS Racisme.
Car dans le détail, une agence sur quatre refuse de faire la sélection elle-même mais laisse le propriétaire choisir ses futurs locataires en ne retenant pas "les profils dits arabes ou noirs afin d'éviter les problèmes de voisinage", soit 32 agences sur 136. Une sur quatre accepte d’effectuer directement une sélection des potentiels locataires sur la base d’un critère discriminatoire racial, soit 34 agences sur 136.
"On n’a pas le droit de le faire mais je le fais déjà dans la sélection de mes rendez-vous."
Une directrice d'agence immobilièreà SOS Racisme
La directrice de l'une des agences immobilières testées a admis pratiquer elle-même ce genre de discriminations. "On est dans un quartier assez aisé et on ne peut pas placer n’importe qui … Voilà je comprends complètement ce que vous voulez dire".
Enfin, une agence sur deux refuse d’opérer une sélection sur la base d’un critère discriminatoire racial, soit 70 agences sur 136. Sur l’ensemble des tests réalisés, les trois quarts des agences immobilières rappellent que la loi interdit toutes les formes de discriminations. Ces agences appartiennent notamment au réseau de la FNAIM, mais aussi à Century 21, Guy Hocquet, Stéphane Plaza ou encore Orpi. Jean-Marc Torrollion, le président de la FNAIM (la Fédération nationale de l’immobilier) a reconnu lundi matin sur franceinfo que les résultats pour lutter contre cet état de fait étaient "insuffisants" : "51,5% ne discriminent plus et ce n'était pas le cas auparavant", a-t-il toutefois pointé. Il estime "encourageant" que "la formation obligatoire mise en place récemment" produise "progressivement ses effets. Il y a 6 200 administrateurs de biens en France. Il y a 100 000 personnes qui s'occupent de la location dans nos agences immobilières, il y a du turn over. C'est long mais je suis persuadé que nous sommes sur un chemin vertueux", plaide-t-il. Évidemment, on ne peut qu'être en colère quand on constate ce résultat-là. Mais je crois que les progrès sont là et ils sont significatifs", insiste Jean-Marc Torrollion.
Certaines agences ont déjà été épinglées par SOS Racisme
Il y a trois ans, un testing similaire réalisé par SOS Racisme sur les agences immobilières situées en Île-de-France avait montré que 51% d’entre elles acceptaient l’ordre discriminatoire ou s’en faisaient les complices. Pour SOS Racisme ce testing "démontre que les pratiques discriminatoires dans le secteur de l'immobilier perdurent".
C'est une situation inacceptable pour l'association car certaines des agences épinglées dans ce testing l'avaient déjà été lors de l'opération menée en 2019. À l'époque un dialogue avait été amorcé pour notamment mettre en place des formations. SOS Racisme réclame donc un "renforcement des sanctions pénales en cas de discriminations", mais aussi la "mise en place d'un ordre disciplinaire" en rétablissant "la fonction disciplinaire du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilière, supprimée par la loi Elan de 2018". La discrimination à la location est punie jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende.
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