"Il n'y a pas d'emploi, nulle part" : les saisonniers des stations de ski en grande difficulté
Les remontées mécaniques fermées, l'activité est au ralenti dans les stations de ski françaises. Pour les nombreux saisonniers, la précarité n'est pas loin.
À 28 ans, Paul est un habitué des saisons à la montagne. Cela fait huit ans qu’il les enchaîne, dans le secteur de la restauration. Cet hiver, il avait décroché un beau contrat : "Je devais être responsable de la restauration d'un hôtel cinq étoiles qui devait se créer à Tignes. Du coup, on a du décaler l'ouverture au fur et à mesure des différentes annonces gouvernementales, pour au final, prendre la décision assez récemment que nous n'ouvrirons pas de la saison."
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Comme Paul, les 140 000 saisonniers de la montagne sont dans la tourmente. Les remontées mécaniques n'ont pas ouvert depuis le début de la saison en raison de l'épidémie de Covid-19, et pourraient bien rester fermées encore longtemps. Les personnes qui travaillent habituellement dans les hôtels, les restaurants, qui animent les activités sportives des stations, n’ont donc aucune assurance de pouvoir retravailler et beaucoup ne bénéficient pas d’une embauche avec chômage partiel.
En prévision de ce travail, Paul a loué en septembre un appartement à l’année. Aujourd’hui, il est en difficulté : "Je me retrouve avec un loyer d'environ 700 euros, pour moins de 1 400 euros de chômage environ. J'aide aussi ma maman, qui est dans le besoin, encore plus que moi. Donc c'est une situation relativement précaire quand même."
"Les revenus changent mais les factures ne changent pas"
Paul n’a pas pu bénéficier d’une embauche avec activité partielle, c’est également le cas de Damien, qui travaille en station avec sa compagne, elle aussi saisonnière : "Je n'ai pas de travail depuis mi-septembre, il n'y a pas d'emploi, nulle part. Je suis encore au chômage pendant deux mois, mais ça risque d'être compliqué, si d'ici là on ne peut pas travailler ne serait-ce qu'un petit peu." Damien peut heureusement compter sur ses proches : "On a nos familles qui nous soutiennent, si elles n'étaient pas là, ça ferait longtemps qu'on n'aurait plus grand-chose. On ne peut pas non plus dépendre d'elles, on a quand même 30 et 32 ans."
"Actuellement, je songe à vendre ma voiture. Si je n'ai pas de revenu, il faut bien qu'on ait de l'argent pour faire des courses, et payer le loyer."
Damien, saisonnierà franceinfo
Sofiane se trouve dans une situation encore plus critique. Avec les saisons écourtées et la réforme de l’assurance chômage, il n’a pas pu recharger suffisamment de droits. Aujourd’hui, il est au RSA : "C'est difficile ! C'est très difficile, parce que les revenus changent mais les factures ne changent pas. J'ai des retards de paiement à droite à gauche, c'est dur. J'aide ma mère et je suis aidé par ma mère, en fait on s'aide mutuellement."
Face à des situations dramatiques, Eric Becker, en charge des saisonniers au syndicat Force ouvrière, demande au gouvernement d’agir : "Il faudrait déjà que dans un premier temps, tous ceux qui sont détenteurs de promesses d'embauches et dont l'employeur ne souhaite pas ou ne peut pas les basculer en activité partielle, soient pris en charge directement par l'État. Parce que de toute façon, cette activité partielle aurait été versée aux employeurs s'ils en avaient fait la demande. Il faut que l'État permette à ceux qui ont ces promesses d'embauche déjà en main de survivre." Le syndicaliste affirme avoir reçu près d’un millier de témoignages de saisonniers en grande difficulté.
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