Trois questions sur la grève du personnel hospitalier à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe
Le mouvement de grève a débuté le 23 juillet pour protester contre les conditions de travail au sein de cet établissement, en partie ravagé par un incendie le 28 novembre 2017.
Plusieurs milliers de personnes ont défilé, jeudi 1er août, dans les rues de Pointe-à-Pitre. Un mouvement de soutien au personnel du centre hospitalier universitaire de Guadeloupe, en grève générale depuis le 23 juillet. Les manifestants dénoncent les conditions de travail du personnel depuis l'incendie survenu le 28 novembre 2017. Ce jour-là, quelque 1 200 personnes avaient dû être évacuées et un "hôpital de campagne" avait été déployé. Le "plan blanc" avait été déclenché.
Franceinfo fait le point sur ce mouvement social qui touche le plus grand hôpital de cette région d'Outre-mer de près de 400 000 habitants.
Pourquoi l'hôpital est-il en grève ?
La grève a débuté le 10 juillet aux urgences et à la maternité, pour dénoncer le manque de moyens humains et matériels, ainsi que la vétusté et l'exiguïté des locaux. Le mouvement a pris de l'ampleur pour concerner l'ensemble du CHU de Guadeloupe à partir du 23 juillet. Les négociations entre la direction de l'hôpital et les autorités sanitaires n'ont pas permis de parvenir à un accord. Mercredi 31 juillet, le dialogue s'est tendu. Le directeur du CHU, Gérard Cotellon, a menacé d'assigner en justice les organisations syndicales qui bloqueraient l'entrée du site jeudi.
Selon un sondage Qualistat réalisé en juillet 2019, 82% de la population guadeloupéenne estime que ce mouvement social est justifié. Quelque 6 000 personnes auraient suivi le mouvement de grève, selon les syndicats (2 500, selon les autorités). Une autre mobilisation est prévue le 13 août.
Quelles sont les répercussions pour les patients ?
Le fonctionnement du CHU est fortement perturbé. L'offre de soins a été éclatée et plusieurs services ont été délocalisés dans des locaux transitoires inadaptés et exigus, selon le personnel en grève. Les grossesses pathologiques sont par exemple suivies à la polyclinique des Abymes, située à côté du CHU mais dont l'entrée ne dispose pas de rampe d'accès pour les lits et les fauteuils, comme le montre une vidéo publiée sur Facebook le 11 juillet.
Photos et vidéos à l'appui, des membres du personnel de l'hôpital publient régulièrement des images montrant l'état déplorable de certains locaux. Plafonds et robinetterie moisis, fuites d'eau quand il pleut… Le Collectif de défense du CHU pointe les problèmes de sécurité : non-respect des règles d'hygiène, retard dans la prise en charge des patients... Des grévistes racontent aussi devoir acheter eux-mêmes certaines fournitures.
En mars 2018, le collectif de défense du CHU avait comptabilisé 43 décès suspects en deux mois et demi. Europe 1, dans une enquête, citait l'exemple d'une "jeune femme de 22 ans, opérée pour une banale infection du rein et qui est morte parce qu'il n'y avait plus qu'une seule bouteille d'oxygène dans le bâtiment".
Quelles sont les aides apportées par l'Etat ?
Dans un premier temps, la "réhabilitation des premiers services aux urgences" est prévue "d'ici la fin de l'année" et les "blocs seront de nouveau opérationnels au 1er semestre 2020", avait assuré Agnès Buzyn, la ministre de la Santé. Un financement de 54 millions d'euros pour la construction d'un nouveau pôle parents-enfants est prévu pour 2020.
Parallèlement, l'établissement faisait face à des difficultés budgétaires importantes, notamment une dette à ses fournisseurs qui "avoisine les 49 millions d'euros". C'est pourquoi "il ne peut pas assumer dans de bonnes conditions l'approvisionnement des denrées et des médicaments pour les patients", explique le sénateur Dominique Théophile.
Mercredi 31 juillet, Gérard Cotellon, directeur du CHU, a annoncé qu'une aide de 20 millions d'euros accordée par l'État, initialement remboursable, ne sera finalement pas à rembourser. Une bouffée d'oxygène pour l'hôpital, même si elle ne suffira pas à rétablir la situation.
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