Crise de l'énergie : piscines, patinoires, stations de ski... Faut-il s'attendre à d'autres fermetures cet hiver ?
Les élus, représentants d'associations et acteurs des délégations de service public interrogés par franceinfo redoutent des fermetures partielles ou totales cet hiver en raison de la hausse des prix de l'énergie.
Dans l'esprit du maire de Bourg-en-Bresse (Ain), le débat n'existe pas vraiment. "Aucune décision n'a été prise, mais on n'a pas de tabou. Si, au milieu de l'hiver, il y a un risque de pénurie [d'électricité et de gaz] et qu'il faut décider entre fermer des usines ou fermer des piscines, ma décision est prise", explique Jean-François Debat.
Dans une trentaine de piscines de France, la décision a été inéluctable. La société Vert Marine, qui exploite ces équipements par délégation de service public (DSP), a décidé de fermer ces équipements en raison des "hausses du coût de l'énergie". "Entre juillet et septembre, on est passé de 250 euros le mégawattheure (MWh) à 1 000 euros, c'est intenable", s'est justifié dans un communiqué le président de Vert Marine, Thierry Chaix. Cette décision contrevient pourtant au principe de continuité de service public, puisque les collectivités peuvent gérer directement leurs services publics en régie ou en confier la gestion à un tiers via une concession ou une DSP.
Des piscines fermées un jour par semaine
La tendance des fermetures, partielles ou totales, est-elle amenée à se poursuivre cet automne, puis durant l'hiver ? Les différents élus et représentants interrogés par franceinfo expliquent que ce scénario est à craindre. L'association France urbaine, qui représente l'ensemble des métropoles, communautés urbaines, communautés d'agglomération et grandes villes de France, rapporte que "10% des 108 territoires qu'elle représente envisagent ou imaginent une fermeture partielle ou totale d'une piscine sur leur territoire cet hiver", ajoutant que "les patinoires pourraient également être concernées".
Dans l'agglomération de Montpellier (Hérault), par exemple, les piscines de Lansargues, Palavas-les-Flots, Mauguio et La Grande Motte "ferment un jour par semaine" ainsi qu'un à deux mois pour les vidanges. Une mesure qui permet à "la collectivité de faire 300 000 à 320 000 euros d'économies", fait savoir la communauté de communes du Pays de l'Or.
Une eau un peu plus froide à Paris ?
A Paris, la mairie ne compte pas en arriver là, même si la piscine Pailleron située dans le 19e arrondissement est fermée, à la suite de la décision de Vert Marine."Pour l'instant, nous voulons laisser ouvertes toutes nos piscines", assurait mardi sur franceinfo Pierre Rabadan, adjoint à la maire de Paris en charge du sport. Ces ouvertures ont pourtant un prix : "Cela nous coûte plusieurs millions d'euros en plus. Pour les piscines, cela fait doubler le prix de l'énergie." La mairie de Paris envisage, plutôt que des fermetures, de diminuer la température de l'eau par exemple.
Le coût de fonctionnement moyen des piscines est estimé à 1 073 euros/m²/an pour les communes, selon le dernier rapport de l’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL) publié en 2021. Les dépenses d'énergie représentaient 15,2% du budget dans le cas d'une piscine communale.
L'ouverture de la patinoire de Niort décalée
Au-delà des piscines, les patinoires et les stations de ski pourraient également être concernées par la hausse du prix de l'énergie. A Niort (Deux-Sèvres), la mairie a décalé à octobre l'ouverture de sa patinoire pour amortir la hausse des factures, alors que la patinoire de Grenoble (Isère), l'une des plus grandes de France qui héberge notamment le club champion de France de hockey-sur-glace, redoute l'hiver.
"On nous demande d'étudier la faisabilité technique de fermetures journalières mais aussi d'automatiser le délestage."
Martial Rodrigues, responsable technique de la patinoire de Grenobleà franceinfo
Le complexe, géré en régie par la métropole, a déjà fermé l'une des deux salles du complexe cet été, avec pour conséquence une réorganisation des équipes et des réductions de personnel. "On est très inquiets pour les semaines à venir. On était bien repartis après le Covid-19, et là, on se reprend cet événement dans les gencives", souffle Martial Rodrigues au sujet de cette facture d'électricité qui s'affole.
"Généralement, on a une augmentation annuelle entre 1 et 4%, mais en janvier la première facture a été multipliée par trois." Une note conséquente pour un équipement qui consomme 4 000 MWh par an. Sachant que fin septembre, le prix de gros de l'électricité avait ainsi atteint plus de 1 000 euros le mégawattheure contre environ 85 euros il y a un an.
Une augmentation des tarifs des forfaits de ski ?
En montagne, les stations de ski subissent aussi la hausse des prix de l'énergie. Certaines pourraient-elles fermer en pleine saison lors des grands froids ? "Lorsque l'on vous demande de payer deux fois votre chiffre d'affaires pour payer votre consommation d'électricité, ça va être très compliqué. En l'état, si on ne trouve pas de solution, des stations ne pourront pas ouvrir, c'est certain", confie Anne Marty, présidente déléguée des Domaines Skiables de France, à France 3 Occitanie.
Le maire des Orres, une station de ski des Hautes-Alpes, a vu la facture de son domaine exploser, lui aussi. "Il y a un surcoût énergétique de deux millions d'euros entre 2019 et 2022", explique Pierre Vollaire, également vice-président de l'association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM).
"Pour l'instant, on n'envisage pas de fermetures, mais on va réduire de 20% notre consommation énergétique, réduire la vitesse des télésièges et on va être obligés d'augmenter un peu le tarif des forfaits, de l'ordre de 7%", explique l'élu, qui était mardi au ministère de l'Economie pour évoquer les conséquences de la hausse de l'énergie.
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