TotalEnergies, Stellantis, LVMH... Cinq questions sur les bénéfices colossaux des entreprises françaises du CAC 40 en 2022
"Ma grosse entreprise ne connaît pas la crise." A l'aune des résultats de l'année 2022, les patrons du CAC 40 pourraient revisiter la célèbre chanson d'Alain Bashung. Alors que la guerre en Ukraine a déstabilisé certains secteurs et que l'inflation bat des records en France, les entreprises du CAC 40 affichent des profits colossaux.
Au total, ces sociétés ont enregistré pas moins de 142 milliards d'euros de bénéfices cumulés en 2022, grâce notamment aux records du luxe et de l'énergie, d'après le résultat d'un calcul de l'AFP publié jeudi 9 mars. C'est légèrement moins que le sommet de 2021, mais cela augure néanmoins d'une année faste pour les actionnaires. Retour sur le sujet en cinq questions.
1 Quelles sont les entreprises du CAC 40 ?
Avant de s'intéresser à leurs résultats, petit rappel sur les entreprises qui composent l'indice boursier du CAC 40. Il ne s'agit pas des quarante plus grosses entreprises du pays en termes de chiffre d'affaires ou de salariés, mais d'un panachage de très grandes sociétés qui représentent les différentes branches d'activité de l'économie française. Leurs résultats permettent ainsi de refléter la tendance globale de l'économie française.
Parmi les grands secteurs représentés, on retrouve spécifiquement l'énergie (TotalEnergies, Engie), le luxe (LVMH, Hermes, Kering), l'industrie (Alstom), la distribution (Carrefour), l'agroalimentaire (Danone), l'automobile (Renault, Stellantis), la pharmacie (Sanofi) ou encore la banque et les assurances (BNP Paribas, AXA, Société générale).
2 Quels sont les résultats de ces sociétés en 2022 ?
Le chiffre d'affaires des entreprises du CAC 40 a atteint 1 729 milliards d'euros en 2022, selon le décompte de l'AFP. Un chiffre en hausse de 19% sur un an, grâce entre autres aux ventes gonflées par l'inflation pour de nombreux groupes.
Le bénéfice net cumulé de ces sociétés a lui atteint 142 milliards d'euros en 2022, grâce aux records du luxe et de l'énergie. Un montant colossal, mais en légère baisse par rapport à 2021, lorsque les bénéfices nets avaient atteint un record, portés notamment par le résultat hors norme de près de 25 milliards de Vivendi en raison de la cession d'Universal Music.
A noter que ces chiffres ne prennent pas en compte deux groupes, Pernod Ricard et Alstom, dont les exercices comptables sont décalés.
3 Quelles sont les entreprises qui ont réalisé le plus de bénéfices ?
Les résultats globaux des entreprises du CAC 40 cachent en réalité quelques performances particulièrement notables. Sur la première marche du podium, on retrouve ainsi le groupe TotalEnergies, qui réalise à lui seul près de 20 milliards d'euros de bénéfice net en 2022. Sur la deuxième marche, le constructeur automobile Stellantis (fusion du groupe PSA et de Fiat Chrysler) affiche un profit de 16,8 milliards d'euros. Enfin, la troisième marche est occupée par le géant du luxe LVMH avec plus de 14 milliards d'euros de profit en 2022.
Au total, le secteur de l'énergie réalise 23,2 milliards d'euros de bénéfice en 2022, un chiffre en augmentation de 14% par rapport à 2021. Si la guerre en Ukraine a provoqué de nouvelles charges à supporter pour ces entreprises, elle a aussi alimenté la hausse des prix de l'énergie dans le sillage de la reprise post-Covid-19.
Le luxe (LVMH, Kering, Hermès, L'Oréal) tire aussi son épingle du jeu avec des profits en hausse de 23%, soit 4,5 milliards d'euros de plus sur un an et une progression de 80% comparé à 2019. Le secret de sa réussite ? Le secteur n'a pas pâti de la répercussion de la hausse des coûts de production sur les prix de vente.
Les plus fortes progressions de bénéfice reviennent à Orange et au fabricant de semi-conducteurs STMicroelectronics, qui a profité de la forte demande mondiale pour la denrée rare des puces électroniques. A noter que le plus gros profit d'une entreprise française en 2022 n'est pas dans cette liste. Il s'agit du groupe CMA-CGM, troisième armateur mondial, qui a engrangé quelque 24,9 milliards de dollars de bénéfice en 2022 et qui n'est pas côté en bourse.
4 Quelles entreprises ont perdu de l'argent ?
Quelques rares ombres viennent ternir ce tableau très favorable aux grandes entreprises françaises. Deux sociétés affichent des pertes en 2022. Tout d'abord, Vivendi, qui après une année record en 2021 passe dans le rouge, affichant avec un milliard d'euros la pire perte du CAC 40. Cette contre-performance est principalement due à l'arrêt de la comptabilisation des résultats de l'opérateur Telecom Italia dans le groupe dirigé par Yannick Bolloré, écrivent Les Echos.
L'autre fleuron français en difficulté est Renault. Le constructeur affiche la deuxième perte nette du CAC 40, de 338 millions d'euros. En cause : sa cession du fabricant russe des Lada, Avtovaz, décidée après le déclenchement de la guerre en Ukraine, qui lui a coûté 2,3 milliards d'euros de charge comptable. En dehors de cet accroc, les nouvelles sont plutôt bonnes pour le constructeur : son chiffre d'affaires a bondi de 11,4% et sa marge opérationnelle a doublé par rapport à 2021.
5 Quelles répercussions pour les actionnaires... et les salariés ?
Comme les bénéfices, les versements effectués aux actionnaires progressent. Aucun groupe du CAC 40 n'a annoncé baisser ses dividendes, alors que ceux-ci avaient déjà atteint un record en 2022 en France et dans le monde. A l'inverse, certaines entreprises ont fait savoir qu'elles rémunéreraient davantage leurs actionnaires.
Le groupe LVMH, qui a payé 5 milliards d'euros d'impôts sur les sociétés dans le monde, devrait ainsi verser au total quelque 6 milliards d'euros à ses actionnaires, dont près de 3 milliards reviennent directement… à la famille de son PDG Bernard Arnault. Les quelque 39 000 salariés français du groupe pourront, eux, se partager 400 millions d'euros de dividendes.
La Société Générale veut de son côté redistribuer 90% de son bénéfice aux actionnaires, malgré la chute de ses résultats sous l'effet de la cession de sa filiale russe Rosbank. Le groupe TotalEnergies va lui investir plus de 15 milliards d'euros tirés de ses profits, dont quatre dans des "énergies bas-carbone", et payer près de 9 milliards d'euros de dividendes.
Enfin, Stellantis va gratifier ses actionnaires de 4,2 milliards d'euros de dividendes et débourser 2 milliards en primes pour ses salariés. En France, les employés du constructeur bénéficieront à ce titre de 3 882 euros net de prime au minimum, soit 300 euros de plus qu'en 2022. Cette mesure d'intéressement vient s'ajouter à une augmentation de salaire de 5,3% pour l'année 2023, négociée en décembre avec les partenaires sociaux.
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