Santé : le CHU de Bordeaux en "mode dégradé", les patients seront "accueillis par des bénévoles"
Face aux burn out en cascade et manque de personnels, patients accueillis par des bénévoles aux urgences... Gilbert Mouden, infirmier anesthésiste et représentant du personnel Sud Santé Sociaux de l'établissement bordelais, était mardi sur franceinfo.
Aux urgences du CHU de Bordeaux, les patients seront "accueillis par deux bénévoles de la Protection civile" et "un agent de sûreté", a expliqué Gilbert Mouden, infirmier anesthésiste et représentant du personnel Sud Santé Sociaux. C'est le seul moyen trouvé par la direction pour "continuer à travailler et recevoir les patients." Par manque de personnels soignants, l'hôpital public a décidé de fonctionner en mode dégradé le soir et la nuit à partir de ce mercredi 17 heures. "On a environ 40% des médecins urgentistes qui sont sur le départ ou en arrêt de travail en lien avec des burn out", a-t-il expliqué à franceinfo.
franceinfo : Comment va fonctionner ce mode dégradé ?
Gilbert Mouden : Il va être testé déjà pendant une heure cet après-midi. On a eu un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ce matin. Le mode dégradé va être mis en place demain [mercredi] de 17 heures à 22 heures et ensuite de 22 heures à 8 heures du matin avec deux systèmes de fonctionnement gradué. Quand vous allez arriver aux urgences adultes du CHU de Bordeaux, entre 17 heures et 22 heures, vous serez accueillis par deux bénévoles de la Protection civile à qui on souhaite beaucoup de courage. Ils seront accompagnés d'un agent de sûreté parce ce qu'il y aura des situations assez tendues au niveau des urgences. S'ils n'ont pas eu de régulation, s'ils arrivent par leurs propres moyens à pied ou en voiture personnelle, ils seront mis en relation avec le 15, le SAMU, pour être régulés et voir s'ils entrent aux urgences. À partir de 22 heures, le système est encore plus dégradé parce que les portes des urgences adultes seront fermées pour ces personnes-là. Et ils trouveront face à eux un interphone qui les mettra en relation avec le médecin régulateur du 15.
Comment on en est en arrivé là ?
On en arrive là parce qu'on a épuisé totalement un système d'urgence. Cela fait plus de 5 ans qu'on tire le signal d'alarme. On n'a pas entendu les alertes de l'ensemble des professionnels médecins, paramédicaux, infirmiers ou aides-soignants où il manque des effectifs dans les organisations de travail où on fait travailler des gens à plein régime sur des gardes de 12 heures, voire même de 24 heures pour certains médecins. On les amène à l'épuisement ou au départ. Et j'ai vu des quantités de médecins urgentistes partir à cause de ce fonctionnement dégradé. Quand on n'a pas pris le problème à la base, quand il n'y a pas de personnes ressources en plus, on arrive à la rupture d'un système de fonctionnement.
Combien de temps va durer ce mode dégradé ?
Il est mis en place avec une information qui va être faite à la population. Il est prévu pour durer et être évalué. Aujourd'hui, c'est la seule arme que notre direction ait trouvé pour maintenir le système et qu'on puisse continuer à travailler et recevoir les patients. On a environ 40% des médecins urgentistes qui sont sur le départ ou en arrêt de travail en lien avec des burn out.
Les urgences pédiatriques vont fonctionner normalement ?
La problématique est exactement la même aux urgences pédiatriques. J'ai eu des retours sur ce week-end. Il y avait de jeunes enfants qui sont restés plus de 12 heures à attendre parce qu’il n'y avait qu'un interne de chirurgie pour les prendre en charge. Cet interne a sous sa responsabilité les urgences pédiatriques, il a sous sa responsabilité les enfants qui doivent aller au bloc opératoire. S'il est sur ces blocs opératoires, il n'est pas sur les urgences. Il y a des enfants en souffrance qui attendent plus de 12 heures et c'est encore le cas ce week-end. Et ça, c'est inadmissible. Un jeune interne a quitté son poste le samedi matin, les larmes aux yeux, après 24 heures de garde.
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