UMP et PS, deux stratégies opposées contre la crise du logement
Entre les deux camps, le constat n'est pas si éloigné. Mais les divergences sont nombreuses sur la manière de mettre fin à la hausse des loyers et au manque de logements.
Voilà un sujet qui devrait animer la campagne présidentielle. Face à l'UMP, qui a présenté mardi 15 novembre son projet pour le logement, les socialistes défendront le 8 décembre une proposition de loi "visant à faire du logement une priorité nationale" au Sénat, où ils sont désormais majoritaires. Avec des initiatives qui devraient faire bondir la droite.
• Un même constat, deux analyses différentes
Entre les deux camps, le constat est pourtant proche. Personne ne nie la réalité de la crise du logement. Dans son projet, l'UMP reconnaît que les dépenses de logement pénalisent le pouvoir d'achat des moins aisés, et que "le parcours résidentiel se grippe". Une observation qui ne va pas jusqu'à remettre en cause le bilan du mandat de Nicolas Sarkozy.
Bien au contraire : le parti présidentiel se targue d'avoir fourni "des efforts de construction sans précédent", notamment en matière de logement social. "Depuis 2007, nous avons financé 115 000 logements sociaux par an en moyenne, contre 50 000 sous le gouvernement Jospin", met en avant Marc-Philippe Daubresse, secrétaire général adjoint de l'UMP et ancien ministre en charge du dossier.
A gauche, Jean-Pierre Bel, auteur de la proposition de loi socialiste, fustige un "laisser-faire libéral". "L'effort de l'Etat en faveur du logement est à son niveau le plus bas depuis plus de trente ans alors que celui des collectivités territoriales a plus que doublé", écrit le président du Sénat. S'il n'a aucune chance d'être adopté à l'Assemblée nationale, son texte préfigure l'action de la gauche en cas d'arrivée au pouvoir.
• Logement social : durcir la loi ou l'adapter ?
Pour les socialistes, ce sont 150 000 logements sociaux qu'il faudrait construire chaque année. Un objectif "impérieux et incontournable" pour stopper la hausse des loyers. Mais surtout, le PS entend durcir la loi Solidarité et renouvellement urbains (SRU), qui impose 20 % de logements sociaux dans les villes de plus de 3 500 habitants. Le taux serait porté à 25 %, les petites communes devraient en disposer d'au moins 10 %, les sanctions seraient multipliées par cinq...
Ces mesures chocs risquent de faire siffler quelques oreilles à l'UMP, qui a toujours éprouvé une certaine gêne devant la loi SRU, votée en 2000 par la gauche. "Cette loi était un montage contre la droite pour des raisons électoralistes", critique Eric Raoult, député-maire du Raincy, îlot aisé dans une Seine-Saint-Denis défavorisée. Le programme de l'UMP projette donc d'"adapter les règles" de cette loi, en prenant en compte le revenu des habitants plutôt que le statut du logement. "Une population est sociale en fonction de ses ressources, pas parce qu'elle habite un logement social", plaide Marc-Philippe Daubresse.
Au-delà de la thématique du logement social, l'UMP envisage tout de même de récompenser les maires "bâtisseurs" grâce à un système de bonus-malus sur la dotation accordée par l'Etat à leur commune. Mais la proposition, qui tranche avec l'idéologie du parti, ne fait pas l'unanimité. "En débattre, pourquoi pas ? Mais ça va beaucoup crisper", prévient le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé.
• Droite et gauche d'accord pour libérer du foncier
Pour créer "un choc d'offre", c'est-à-dire construire davantage, l'UMP entend jouer sur la fiscalité des terrains, dont les prix ont eux aussi flambé ces dernières années. "Le foncier peut représenter jusqu'à 50 % du prix des logements neufs", se lamente Alain Dinin, PDG du promoteur immobilier Nexity. Le parti présidentiel envisage également la création d'une "société foncière publique" chargée de construire des logements sur des terrains inexploités appartenant à l'Etat. Des mesures comparables sont proposées par les sénateurs socialistes, qui veulent créer des "établissements publics fonciers régionaux".
• "France de propriétaires" contre encadrement des loyers
Pourtant, ce sont bien deux visions de la politique du logement qui s'affrontent. Alors que la gauche propose des mesures drastiques (encadrement des loyers à la relocation, surtaxation voire expropriation des logements vacants...), la droite compte poursuivre dans la voie tracée par Nicolas Sarkozy au début de son mandat – sans succès – en faveur d'une "France de propriétaires".
Pour ce faire, l'UMP veut continuer à encourager l'acquisition par les locataires du logement social qu'ils occupent, mais en changeant de logique : "Culturellement, les offices HLM n'ont pas envie de vendre. Nous proposons donc d'instaurer un droit à l'acquisition pour le locataire", détaille Marc-Philippe Daubresse.
• Comment financer efficacement en temps de crise ?
Mais les restrictions budgétaires risquent d'avoir raison des ambitions du parti majoritaire. Devant la convention de l'UMP, mardi, Benoist Apparu n'a pas reçu que des applaudissements lorsqu'il a dû défendre la suppression du dispositif Scellier (investissement locatif) et le recentrage du prêt à taux zéro (PTZ) sur les logements neufs, deux décisions contenues dans le plan de rigueur présenté par François Fillon le 7 novembre.
Selon le secrétaire d'Etat au Logement, il faudra "réadapter notre modèle économique et penser différemment l'intervention publique". Une position qui ne risque pas de séduire une gauche qui s'évertue à critiquer "le choix délibéré d'une politique de désengagement de l'Etat".
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