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Thomas Piketty : "Pour réduire les inégalités, il faut taxer le patrimoine"

Thomas Piketty était mardi matin l'invité de France Info. L'économiste, directeur d'études à l'EHESS, publie un livre où il annonce le retour d'une "société d'héritiers". Il explique que les niveaux de patrimoine, en constante augmentation depuis les années 50, sont revenus à leur niveau de la Belle Epoque. La conséquence ? Une hausse des inégalités, qu'il est possible de résoudre en taxant d'avantage le capital et moins le travail.
Article rédigé par Lucas Roxo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Franceinfo (Franceinfo)

La rentrée scolaire a accouché d'un livre pas tout à fait comme les autres. Le Capital au XXIe siècle , de Thomas Piketty, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales, retrace l'évolution des niveaux de patrimoine depuis un siècle, et déchiffre les changements économiques d'envergure qui traversent la société française. 

L'économiste français était l'invité de France Info, mardi matin, pour parler des résultats de sa démarche. 

Une "société d'héritiers"

"Le patrimoine reprend une importance qu'il a déjà eu dans le passé, du temps de Balzac, et qui avait diminué au XXème siècle ". Ce constat est le point de départ du livre de Thomas Piketty. Le patrimoine, cela correspond à la valeur totale de tout ce que les gens possèdent matériellement, après avoir déduit les dettes. 

En France, les gens possèdent en moyenne un patrimoine qui correspond à 6 années de revenus : c'est le même niveau que celui de la Belle Epoque. En 1950, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le patrimoine était redescendu à l'équivalent de 2 années de revenus. Il n'a pas cessé augmenter depuis. Cette progression, Thomas Piketty l'explique notamment par une hausse des héritages. "En 1950, c'est la reconstruction : il n'y a rien à hériter ", indique-t-il.

La hausse des inégalités

La France serait en revanche en passe de (re)devenir une "société d'héritiers ", c'est à dire une société où la richesse se transfère de famille en famille. 

Pour Thomas Piketty, cela ne correspond pas un problème en soi. Le souci, c'est que le patrimoine est toujours beaucoup plus concentré que les revenus, et cette évolution est donc facteur d'inégalités. "En France, les 10% les plus riches possèdent 60 % du patrimoine total. Les 50 % qui possèdent le moins ne possèdent que 5 % ", déclare-t-il. 

Et si le patrimoine moyen par adulte est de 50.000 euros, cela peut aller de beaucoup à très peu pour certains. "50 % des gens ne vont posséder que quelques mois de salaire devant eux, quand les 10 % les plus riches ont un patrimoine d'un million ou de plusieurs dizaines de millions ", selon Thomas Piketty. 

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La classe moyenne menacée 

Cette inquiétude touche avant tout la classe moyenne. Car l'apparition de cette dernière constitue la principale différence avec les années 20, période durant laquelle les niveaux de patrimoine étaient équivalents.

"La classe moyenne est coincée entre les 50% et les 10%. Est-ce que cette avancée va rester ? Je suis plutôt inquiet. L'augmentation des hauts patrimoines est bien plus rapide que la croissance " (respectivement 7-8% pour la hausse des patrimoines, contre 1-2% pour la croissance). 

Cette croissance donne une importance démesurée au patrimoine. "Les héritiers, avec des patrimoines qui viennent du passé, ont l'avenir pour eux ", explique l'économiste français. "Si vous ne partez de rien, vous ne pouvez pas devenir propriétaire ". 

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La solution : taxer le capital

Pour Thomas Piketty, la solution réside dans les impôts. "Il ne faut pas augmenter les impôts ", rassure-t-il toutefois. "Il faut réduire les impôts sur les salaires. Mais on a besoin d'autres recettes : ces recettes, ce sont les patrimoines. Lorsqu'on a une telle prosperité patrimoniale, ce serait fou de ne pas les taxer ". 

Il s'agit, en d'autres termes, d'arrêter de taxer le travail, pour lui permettre d'accumuler du capital. "J'insiste sur cette contradiction très forte ", conclut l'économiste, âge de 41 ans. La solution serait de plus taxer les 10 % pour permettre aux 50 % de les rattrapper. 

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