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Fiat-Chrysler / PSA : trois questions autour d'un éventuel rapprochement

Le groupe Fiat Chrysler et le groupe automobile français PSA ont confirmé mercredi 30 octobre la tenue de discussions en vue d'un rapprochement, voire d'une fusion entre les deux.

Article rédigé par franceinfo
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Un employé de l'usine PSA Peugeot Citroen à Mulhouse, le 9 avril 2019. (SEBASTIEN BOZON / AFP)

Quelques mois après sa fusion avortée avec Renault, le constructeur automobile italo-américain Fiat Chrysler discute d'un rapprochement avec l'autre grand groupe français du secteur, PSA, afin de donner naissance au numéro 4 mondial du secteur. Flavien Neuvy, économiste et directeur de l’Observatoire Cetelem de l’automobile, Loïc Tribot La Spière, économiste spécialiste du secteur du transport, délégué général du CEPS (Centre d’étude et de prospective stratégique), et Elie Cohen, économiste et chercheur au CNRS, reviennent sur franceinfo mercredi sur cette potentielle alliance.

Quel est l'intérêt pour ces deux groupes ?

"On assiste à une course au gigantisme dans le secteur de l'automobile", explique Loïc Tribot La Spière, pour qui ces rapprochements en augurent d'autres. Il était nécessaire pour le groupe PSA, après un passage à vide fort, de reprendre la main." Les nuages s’accumulent en effet au-dessus de l'industrie automobile : les ventes mondiales sont en recul,  les marchés chinois et américain sont en souffrance et les relais de croissance sont difficiles à trouver. Ensuite, la rentabilité des constructeurs a tendance à s'éroder. "Les affaires sont plus difficiles, explique Flavien Neuvyn, et les normes environnementales évoluent beaucoup et sont très difficiles à respecter."

 Aussi nécessiteront-elles d’énormes investissements en recherche et développement, qui supposent de vendre davantage de véhicules. "Quand un constructeur développe une nouvelle plateforme automobile, tout ce qui sert de base à la construction d'un nouveau véhicule représente au minimum un milliard d'euros, indique Flavien Neuvy. Vous l'amortissez plus facilement si vous vendez huit millions de voitures que si vous en vendez trois millions. C'est aussi simple que cela." En effet, l'industrie automobile est une industrie lourde et la taille critique des entreprise est un élément-clé. "Les choses évoluent tellement vite que la taille critique devient un élément déterminant, insiste Flavien Neuvy. C’est pour cette raison qu’effectivement les constructeurs qui font moins de 5 millions de véhicules par an cherchent des alliances. Elles peuvent consister en des fusions, mais aussi en alliances ponctuelles, technologiques."

Il s’agit par ailleurs, selon Loïc Tribot La Spière, d’envoyer un message fort à la Chine. "Le marché est gigantesque, note-t-il, mais pas du tout évident. Il y a une belle dynamique, mais on sent comme une sorte d'essoufflement." Enfin, un tel rapprochement permettrait, selon lui, de hisser PSA au rang d’acteur mondial susceptible de concurrencer, entre autres, Renault-Nissan.

Doit-on craindre des suppressions d'emplois ?

"Ce qui fait vraiment tourner les usines, indique Flavien Neuvy, au bout du compte, ce n'est pas tellement de savoir si des constructeurs ont fusionné ou pas, c'est de savoir si les gens achètent encore des voitures…" Ainsi, lorsque les ventes baissent, les usines sont moins sollicitées et nécessitent donc moins d’emplois. "Aujourd'hui, prévient cependant l’économiste, nous ne sommes pas du tout dans ce scénario-là. Il s’agit davantage d'unir des forces pour pouvoir réduire des coûts de recherche et développement. Cela a du sens et c'est préparer l'avenir."

"Dans un rapprochement, lui oppose Eric Tribot La Spière, vous avez toujours des restructurations. Cela sera nécessaire aux Etats-Unis, en Italie et bien sûr en France. Il va falloir redéfinir quelles sont les équipes de direction. C'est la dureté du monde économique."

Quel avenir pour l’industrie automobile française ?

Avec des besoins moindres en véhicule, le développement à venir de la voiture connectée et autonome, ainsi que la part grandissante du marché de la voiture électrique, l'économie industrielle des pays européens est bouleversée. "Serons-nous capables de reconvertir notre industrie automobile ?", s'interroge Elie Cohen. "L'industrie automobile est la base industrielle de l'Europe, note l'économiste. Or, il se trouve que l'industrie automobile fait face à plusieurs chocs simultanés."

Et notamment un choc écologique. "Nous allons vers la fin du moteur thermique et le passage aux véhicules électriques. Or, l'économie n'est pas du tout la même, selon que vous êtes dans une économie du moteur thermique ou du moteur électrique." "On va également, poursuit Elie Cohen, vers une révolution de ce qu'on appelle l'électromobilité et la construction du transport comme un service et non plus comme une industrie. On aura moins besoin de voitures et l'on va également vers la voiture connectée et autonome : toutes ces transformations sont en train de bouleverser l'économie industrielle des pays européens..."

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