"Je suis toujours au smic depuis 18 ans" : la branche coiffure, mauvais élève des revalorisations de salaires
Le ministère du Travail a demandé à certaines branches professionnelles de rendre leurs grilles salariales plus attractives. Épinglé par la ministre, le secteur de la coiffure, notamment, où les premiers niveaux de salaire sont en dessous du smic.
Priscillia est coiffeuse dans une enseigne du sud de la France et a commencé à travailler à 16 ans après un CAP et un brevet professionnel en tant que coiffeuse confirmée. Sur la grille des salaires de la convention collective, cela correspond à niveau 1, échelon 3. Depuis, elle n'a pas évolué : "Je suis dans la coiffure depuis 18 ans. Je suis toujours restée au smic."
La ministre du Travail a fait un point d'étape vendredi 17 décembre avec les organisations syndicales et patronales et cite nommément la branche de la coiffure parmi les plus mauvais élèves. En septembre déjà, Elisabeth Borne avait épinglé une quarantaine de branches dont les premiers niveaux de salaire sont en dessous du smic et leur a demandé de mettre fin à cette situation et de rendre leurs grilles salariales plus attractives. Dans le secteur de la coiffure, la situation est totalement bloquée. "Dans le salon où je travaille, on peut partir une fois tous les deux mois en formation si on veut s'améliorer sur la coupe homme, sur des mèches ou sur des couleurs.... Mais ce n'est pas parce qu'on a passé des formations que notre salaire va bouger", dénonce Priscilla.
Aucune perspective d'évolution
Il n'existe pas de perspectives d'évolution pour Priscillia et la grille des salaires minimum n'a pas été renégociée depuis 2018. Or, comme le smic a augmenté entre temps, les premiers niveaux de salaires se retrouvent désormais en dessous du salaire minimum. Cela ne veut pas dire que les salariés sont payés moins que le smic, puisque c'est interdit. En revanche, il n'y a plus de différence entre une coiffeuse débutante, une coiffeuse confirmée et une coiffeuse qualifiée. Elles sont toutes payées au salaire minimum. Ce que dénonce Aurélie Flisar, de la CFDT Services : "Les salariés sortent de formation avec un savoir faire unique et en plus, ils continuent vraiment de se former et de se spécialiser tout au long de la carrière sans jamais voir la juste reconnaissance de ce savoir-faire."
"Qui a envie de s'engager dans un secteur d'activité qui offre peu de perspectives dans la profession, mais aussi d'évolution salariale ? À quoi bon ?"
Aurélie Flisar, de la CFDT Servicesà franceinfo
Mardi, lors d'une séance de négociations, le patronat a proposé de remettre le premier échelon de salaire au niveau du smic. Les suivants entre 0,5 et 1% au dessus. Pas suffisant pour les syndicats. Impossible de faire plus, rétorque Christophe Doré, président de l'Union nationale des entreprises de coiffure (Unec), la première organisation patronale du secteur. "Aujourd'hui, une entreprise de coiffure, elle est à 20% de TVA et sa marge nette à la fin est autour des 5% une fois qu'il a tout payé : ses coûts fixes et ses salaires, ce n'est pas tenable", dénonce Christophe Doré.
"On sort d'une période sanitaire terrible, c’est très dur. Donc, le gouvernement peut me parler d'une augmentation des salaires, je peux l'entendre, mais en face, je souhaite aussi une véritable diminution des charges."
Christophe Doré, président de l'Unecà franceinfo
Selon les chiffres du ministère du Travail, 33% des salariés de la coiffure sont au smic. C'est deux fois plus que dans l'ensemble des branches professionnelles.
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