40 ans de Canal+ : retour sur une première année difficile

Si la chaîne cryptée a connu des années fastes, sa première année d'existence a été particulièrement compliquée.
Article rédigé par Gérald Roux
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Pierre Lescure, fondateur de Canal +, lors d'une conférence de presse à Cannes en 1998 (PATRICK HERTZOG / AFP)

C'était il y a 40 ans, le 4 novembre 1984, la naissance de Canal+, la première chaîne privée, cryptée et payante en France, dans un paysage télévisuel à l'époque très réduit. Canal+ a connu des années très fastes, les fameuses "années Canal" qui ont dépoussiéré la télé française, mais on l'a un peu oublié : la première année de Canal+ a été particulièrement difficile.

Quand Canal+ commence à émettre, elle ne compte que 180 000 abonnés qui ont payé l'équivalent de 40 euros par mois pour une offre simple : "du cinéma et du sport". Le sport, c'est avant tout le championnat de France de football en direct, commenté par Michel Denisot et Charles Biétry. Côté cinéma, la chaîne inaugure les "multidiffusions" : le film L'as des as avec Belmondo passe quatre fois la première semaine.

L'écrasante majorité du programme est cryptée, sauf entre 19h et 20h30 : d'abord une émission de plateau présentée par Patrick Poivre d'Arvor, puis le "Top 50", le premier classement officiel des ventes de singles en France.

Mais très rapidement, de gros nuages s'amoncellent à l'horizon : d'abord des problèmes techniques entre le décodeur et certains téléviseurs, et surtout des programmes jugés trop plats par la presse écrite qui rebaptise la chaîne "Canal moins" ou "Banal+". Trois semaines après le lancement, un journal publie un schéma électronique pour fabriquer son propre décodeur, pirate. Et puis, en janvier 1985, c'est le "coup de massue" venu directement de l'Élysée : François Mitterrand annonce de nouvelles chaînes gratuites ! À quoi bon payer pour Canal+ ?

Aussitôt, le rythme des abonnements s'effondre : seulement 3 000 par semaine alors que la chaîne en attendait 3 000 par jour ! En mars, ça va mal, l'argent manque et il va falloir probablement licencier. La question d'une vente de la chaîne est posée.
Canal+ distribue des actions gratuites à ses salariés pour les retenir mais certains quittent le navire, sans avoir convaincu le public. C'est le cas de PPDA, qui est remplacé dans la "case" du soir par celui qui deviendra la grande figure de Canal : Michel Denisot, dans son émission "Zenith".

Au printemps, une éclaircie

Avec les beaux jours arrive (enfin) une éclaircie : en juin, près de 90% des abonnements sont reconduits ; le public apprécie les programmes de Canal+. Alors, dans la moiteur de l'été, la direction de la chaîne en profite pour diffuser quelques films érotiques ou carrément pornographiques, et le 31 août 1985 à minuit, elle institue la diffusion du film X du samedi soir.

À la rentrée, Canal+ frappe un grand coup : Coluche débarque en clair tous les soirs avec l'émission "un faux", dans laquelle l'humoriste se déguise régulièrement et enchaîne les blagues derrière son pupitre.

À la mi-journée, la chaîne ouvre une nouvelle plage en clair dans laquelle se glissent Philippe Gildas et son talk show "Direct". Le patron des programmes Pierre Lescure retrouve le sourire : en un an, Canal a perdu 500 millions de francs mais a gagné sa bataille contre le dépôt de bilan, avec 670 000 abonnés fin 1985. L'aventure peut se poursuivre. "L'année 1" se termine donc, place aux "années Canal".

40 ans de Canal+ : retour sur une première année difficile, avec Gérald Roux

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