Ce que contient l'avant-projet de loi du gouvernement sur la réforme des retraites
Le texte reprend quasiment en tous points le rapport de Jean-Paul Delevoye de juillet dernier, augmenté des ajustements qu'Edouard Philippe avait dévoilés en décembre.
Comment sortir de la crise sociale autour de la réforme des retraites ? Confronté à cinq semaines de grève et de manifestations, le gouvernement français a dévoilé son avant-projet de loi sur le sujet, vendredi 10 janvier. Mauvaise nouvelle pour les syndicats opposés à la réforme : le texte soumis au Conseil d'Etat – qui ne deviendra un projet de loi qu'une fois sur la table du Conseil des ministres – contient quelques dizaines de pages (64 articles) et reprend quasiment en tous points le rapport de Jean-Paul Delevoye rendu public en juillet dernier, amendé des ajustements qu'Edouard Philippe avait dévoilés le 19 décembre.
De nombreux points-clés encore en discussion feront toutefois l'objet d'ordonnances, comme "les règles de transition en matière d'âge de départ à la retraite et d'âge d'équilibre applicables aux anciens assurés des régimes spéciaux".
Age pivot ou d'équilibre, revalorisations salariales pour les profs... Voici les principales mesures, qui ont peu de chances de satisfaire les syndicats, actées dans ce texte, que le service économie de France Télévisions a pu consulter.
Un âge pivot instauré dès 2022, avec des spécificités selon les métiers
Vivement contestée par la CFDT et l'Unsa, la notion d'"âge d'équilibre" est bel et bien gravée dans le marbre de la loi. Cet âge pivot, assorti d'un bonus-malus au-delà de l'âge légal de départ à la retraite, sera créé en 2022, à moins d'une "délibération" différente des partenaires sociaux "avant le 1er septembre 2021".
Cet âge minimal pour une retraite sans décote "se mettra progressivement en place à partir de 2022 pour la génération 1960" et atteindra "64 ans pour la génération 1965 qui partira à la retraite à partir de 2027". Par la suite, cet âge d'équilibre évoluera "en fonction de l'espérance de vie".
Sur ce point, le cabinet de Laurent Pietraszewski, secrétaire d'Etat chargé des Retraites, martèle auprès du service économie de France Télévisions que "rien n'est figé", et que "le débat est ouvert". L'exécutif fait également savoir qu'un amendement sur l'âge d'équilibre est envisageable si les partenaires sociaux proposent d'autres solutions garantissant l'équilibre financier du futur régime universel de retraite.
Au nom de leur dangerosité, les métiers régaliens (policiers, gendarmes, militaires, agents de la navigation aérienne, douaniers et agents de la pénitencière) conserveront leur droit à un départ anticipé aux conditions actuelles. Parallèlement, l'âge d'annulation de la décote prévue en cas de durée de cotisation insuffisante, actuellement fixé à 67 ans, sera progressivement abaissé à 64 ans.
Une retraite par points gérée par une caisse "universelle"
Le système universel de retraite par points "entrera en vigueur dès 2022 pour la génération 2004, et à partir de 2025 pour la génération 1975", précise également le texte.
Une "caisse nationale de retraite universelle" (CNRU) sera ainsi mise en place "dès le 1er décembre 2020". Elle sera pilotée "par un conseil d'administration paritaire composé des organisations syndicales représentatives et des organisations professionnelles représentatives" incluant "les travailleurs indépendants, les professions libérales et les employeurs publics".
Elle fixera les paramètres du système, dans le respect d'une "règle d'or" imposant l'équilibre financier à horizon de cinq ans, à partir de 2025.
Le niveau de retraite des enseignants garanti
L'avant-projet de loi du gouvernement tente également de rassurer le corps enseignant, qui craint une importante chute du montant de ses pensions. La "mise en place du système universel de retraite" s'accompagnera ainsi d'une "revalorisation" de "la rémunération" des professeurs et des chercheurs, dans le cadre de lois de programmation qui concerneront spécifiquement l'éducation nationale et la recherche.
Il s'agit de garantir "un même niveau de retraite pour les enseignants et chercheurs que pour des corps équivalents de même catégorie de la fonction publique".
La pension de réversion mise en place dès 55 ans
Principale nouveauté, la pension de réversion, censée garantir le maintien de 70% des ressources du couple après le décès de l'un des conjoints, sera attribuée à partir de l'âge de 55 ans et non à 62 ans, comme annoncé par Edouard Philippe en décembre. Cette mesure ne s'appliquera "qu'à partir de 2037" pour les personnes ayant intégré le nouveau régime.
Pour les divorces prononcés avant 2025, les règles actuelles (pensions de réversion proratisées en fonction de la durée de mariage) seront conservées. Après cette date, "les modalités de garantie des droits pour les conjoints divorcés" restent à définir et seront détaillés par ordonnance.
Des droits familiaux garantis
Comme promis par l'exécutif, une "majoration en points de 5%" sera "accordée" pour chaque enfant "et dès le premier enfant", avec un coup de pouce de 2% pour le troisième enfant. Ce bonus se substituera aux règles actuelles, qui combinent l'obtention de trimestres gratuits et une majoration pour les familles nombreuses.
Pour les parents au foyer ou en congé parental, des points viendront "compenser les interruptions ou réductions d'activité des assurés (...) dans les premières années suivant la naissance de l'enfant".
Le texte indique que les actuelles "majorations" en trimestres accordées aux mères seront prises en compte pour le calcul des points acquis au moment de la bascule dans le "système universel" en 2025, dans des conditions qui seront précisées par ordonnance.
Une pension fixée à 1 000 euros minimum après une carrière complète
Les pensions des assurés "ayant effectué" une carrière complète seront portées à 1 000 euros net "dès 2022", à "83% du Smic net en 2023", 84% en 2024 et 85% en 2025.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.