Réforme des retraites : "Personne n’essaie de convaincre les gens", regrette le sociologue Jean Viard
Le sociologue Jean Viard, directeur de recherche associé au Cevipof, déplore dimanche sur franceinfo le manque de pédagogie du gouvernement sur la réforme des retraites.
"La pire des solutions ce serait de laisser pourrir le mouvement et que l’on impose cette réforme des retraites", estime dimanche 29 décembre, sur franceinfo, le sociologue Jean Viard, directeur de recherche associé au Cevipof (Centre de recherches politique de Sciences Po) – CNRS. "Je pense qu’une réforme sociale doit être partagée au moins avec un certain nombre des acteurs", poursuit-il. "Dans 10, 20, 30 ans, on racontera la naissance de cette réforme. Et cette naissance, il est important qu’elle ne se fasse pas aux forceps."
S’il se dit "favorable" à la réforme des retraites, Jean Viard plaide pour un système similaire à celui de la convention citoyenne pour le climat. "Est-ce qu’on peut pas tirer 150 personnes au sort ?, s’interroge-t-il. Leur donner six mois, créer des formes modernes de concertation, qui ne soient pas des rapports de force. Si on ne fait la réforme que dans un an, le monde ne va pas nous tomber sur la tête."
Des concertations, mais peu de pédagogie
S’il reconnait des concertations, Jean Viard relève un manque de pédagogie. "Personne n’essaie de convaincre les gens. C’est ce qui fait que la société est dans la violence", estime-t-il, regrettant qu’il n’y ait eu ni "Grenelle avec les grandes centrales syndicales", ni "grand débat à la télévision".
"On est dans des sociétés de changement, c’est de cela dont il faut discuter, qu’il faut expliquer", renvoyant à une certaine fracture sociale. Pour Jean Viard, il y a d’un côté "la partie haute de la société, la partie diplômée, la partie qui voyage, la partie numérique". "En gros, explique le sociologue, celle qui porte Emmanuel Macron. Elle comprend cette réforme parce qu’elle correspond à son mode de vie." D’après le sociologue cette partie haute a "une responsabilité" envers "les milieux plus populaires, plus fragiles, moins dotées en études, qui gagnent moins d’argent et ont tendance à s’accrocher à ce qu’ils ont".
La réforme doit ainsi, pour Jean Viard, faire comprendre qu’on "va avoir plusieurs métiers", prenant l’exemple des danseurs de l’opéra de Paris. "Il est évident qu’ils vont prendre un autre métier. Vous n’allez pas vous arrêter à 42 ans parce que vous ne pouvez plus danser." "La société y est déjà passée : les gens du privé manifestent très peu parce qu’ils savent déjà que cela change."
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