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Réforme des retraites : trois questions sur le système de retraite par capitalisation, dont le développement est défendu par des sénateurs

La majorité de droite au Sénat a voté, dimanche, un amendement au projet de réforme des retraites, proposant une étude sur l'introduction d'une part de capitalisation collective dans le système de retraites.
Article rédigé par franceinfo
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Des représentants syndicaux prennent part à une manifestation contre le projet de réforme des retraites, le 16 février 2023 à Albi (Tarn). (CHARLY TRIBALLEAU / AFP)

L'examen du projet de réforme des retraites se poursuit au Sénat. La chambre haute, à majorité de droite, a voté, dimanche 5 mars, un amendement visant à lancer une étude sur l'introduction d'une part de capitalisation collective dans le système de retraites par répartition. L'amendement, déposé par le sénateur Les Républicains de Meurthe-et-Moselle Jean-François Husson, a été adopté avec 163 voix "pour" et 126 "contre". 

Cette étude du gouvernement sur la retraite par capitalisation devrait être remise au Parlement avant le 1er octobre, selon l'amendement. "Le mouvement démographique est implacable, nous aurons moins de cotisants et plus de bénéficiaires, on a ce devoir de regarder de quelle manière le système de répartition perdure", a défendu Jean-François Husson. "On pourrait avoir une fusée à trois étages : le socle intergénérationnel [du système par répartition], le deuxième étage, ce sont les retraites complémentaires, et le dernier étage, c'est par capitalisation", a développé le sénateur de Vendée Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat. Le ministre du Travail, Olivier Dussopt, a toutefois rappelé que "le gouvernement a fait le choix de ne pas ouvrir le débat sur la capitalisation".

En quoi consiste le système de retraite par capitalisation ? Quels sont les modèles existant déjà en France et à l'étranger, et que proposent précisément les sénateurs LR ? Eléments de réponse. 

1 Qu'est-ce qu'un régime de retraite par capitalisation ? 

En France, le système des retraites fonctionne par répartition : les actifs versent des cotisations qui servent, la même année, à financer les pensions des personnes retraitées. Les cotisations versées dans le cadre de l'assurance vieillesse "sont immédiatement utilisées pour payer les pensions des retraités", et "son équilibre financier dépend du rapport entre le nombre de cotisants et celui des retraités", explique le site vie-publique.fr

Dans un système de retraite par capitalisation, "les actifs d'aujourd'hui épargnent en vue de leur propre retraite. Les cotisations font l'objet de placements financiers ou immobiliers", résume cette même source. Dans ce cas, les cotisations sont investies par exemple dans des fonds d'investissement, des actions ou des obligations, et les pensions touchées par les actifs sont liées aux performances de ces placements.

La capitalisation peut être individuelle ou collective. Comme le souligne Le Mondel'ensemble des pays européens comptent un système de retraite par répartition, qui est néanmoins complété, de manière très variable d'un pays à l'autre, par des dispositifs de retraite par capitalisation. Ce système est notamment particulièrement développé aux Pays-Bas

2 Ce modèle existe-t-il déjà en France ?  

En France, le système de capitalisation a été utilisé pour des retraites ouvrières et paysannes dans les années 1910, ou par les assurances sociales des années 1930, relève Le Monde (article réservé aux abonnés). Mais après la Seconde Guerre mondiale, le principe de solidarité s'est imposé. "Les ordonnances de 1945 créant la Sécurité sociale ont institué un régime par répartition, qui prévaut encore aujourd'hui pour les régimes de base et complémentaires", rappelle vie-publique.fr. Il existe néanmoins une poignée de régimes obligatoires de retraite fonctionnant par capitalisation en France, comme le rappelle le quotidien du soir. Il s'agit par exemple de la retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP), ou encore du régime géré par la Caisse d'assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP). Les pharmaciens libéraux ont en effet une retraite complémentaire comprenant "une part de capitalisation collective", comme l'explique la CAVP (document PDF).

Pour d'autres actifs français, un système facultatif vient compléter la retraite de base et la retraite complémentaire : il s'agit de la retraite supplémentaire. Contrairement aux retraites de base et complémentaire, qui fonctionnent par répartition, la retraite supplémentaire est basée sur le principe de la capitalisation. Il peut s'agir de dispositifs d'épargne salariale – comme le Plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) ou le Plan d'épargne entreprise (PEE) – ou de dispositifs individuels, comme le Plan d'épargne retraite populaire (Perp), détaille vie-publique.fr

Selon un rapport (document PDF) de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), les cotisations des dispositifs de retraite supplémentaire "représentent environ 5% de l'ensemble des cotisations (régimes publics légalement obligatoires et dispositifs facultatifs confondus)". Les actifs travaillant au sein de grandes entreprises ou les non-salariés "en bénéficient davantage en moyenne" en France, ajoute-t-elle. 

3 Que proposent les sénateurs ? 

Dans une tribune publiée par Le Figaro (article réservé aux abonnés) le 1er mars, quelques jours avant le vote de l'amendement de Jean-François Husson, 44 sénateurs ont appelé à s'"inspirer" du modèle de la Caisse d'assurance vieillesse des pharmaciens, ou encore de la retraite additionnelle de la fonction publique. Ces élus défendent "l'introduction de cette dose de capitalisation pour justement sauver notre système par répartition". "Préservons le système par répartition et une pension minimale garantie de 1 200 euros en l'adossant à une capitalisation minoritaire. L'Etat, qui garantit aujourd'hui le système par répartition, en serait là aussi le garant", ajoutent-ils. Les sénateurs proposent l'introduction d'une capitalisation "collective, car aujourd'hui la capitalisation par l'épargne-retraite est impossible pour les Français les plus modestes." 

L'amendement voté dimanche réclame au gouvernement un rapport qui "compare les conséquences pour les assurés et les pensionnés d'une affiliation à un régime par répartition et à un régime par capitalisation, à l'image de la Caisse d'assurance vieillesse des pharmaciens ou du régime additionnel de la fonction publique". L'étude devra se pencher sur "les modalités d'instauration d'un nouveau régime social applicable à des cotisations versées à un régime obligatoire d'assurance vieillesse par capitalisation, destiné aux salariés et aux indépendants, qui serait intégré dans le système des retraites". Elle visera également à détailler "la structure administrative" qui serait chargée de gérer "ce nouveau régime obligatoire". Pour les sénateurs, "la capitalisation collective pourrait être envisagée comme une opportunité en vue de garantir un avenir à notre régime de retraites." 

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