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Fichage de syndicalistes à FO : "C'est une erreur absolue, j'ai blessé du monde", admet Pascal Pavageau, l'ex-secrétaire général du syndicat

Interrogé lundi sur franceinfo, Pascal Pavageau revient sur l'épisode qui a donné lieu à sa démission du syndicat FO.

Article rédigé par franceinfo
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L'ex-secrétaire général de Force ouvrière, Pascal Pavageau, le 1er mai 2018 à Paris. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

"J'ai nui à l'image d'une organisation sous laquelle, depuis 28 ans, je m'engageais pour redorer l'image", lâche lundi 23 septembre sur franceinfo Pascal Pavageau, ancien secrétaire général de Force ouvrière, auteur de Allô Jupiter, ici la terre, livre d’entretien avec Laurent Neumann.

Dans ce livre publié aux éditions Kero, l'ex-secrétaire général de Force ouvrière Pascal Pavageau dénonce ceux qui ont révélé le fichage de syndicalistes, ce qui l'avait contraint à la démission. Les noms de 130 cadres de FO étaient mentionnés, tous accompagnés de commentaires sur leur comportement, leurs opinions, leurs caractères. 

franceinfo : Est-ce bien vous qui êtes à l'origine de ce fichier ?

Pascal Pavageau : Oui, c'est un document qui date de septembre 2016 pour former quelques personnes que je sollicite pour être élues ensuite dans la direction de Force ouvrière. Le problème c'est que le choix que je faisais, c'était de prendre des militants qui n'étaient pas issus de l'appareil. Il fallait les informer sur les difficultés, sur le cadre extrêmement violent et nauséabond qui existe au sein de cet appareil. L'erreur absolue qui a été la mienne, c'est que pour gagner du temps et dans un contexte de pressions extrêmement fortes, très rapidement on met noir sur blanc quelques annotations et quelques éléments subjectifs et on l'envoie à deux, trois personnes qui ne sont pas sur Paris. Ensuite, on n'en entend plus parler avant deux ans. C'est une erreur absolue, j'ai blessé du monde, y compris des amis et des proches, j'ai nui à l'image d'une organisation sous laquelle, depuis 28 ans, je m'engageais pour redorer l'image, donc c'est une connerie sans nom. Je ne me suis pas rendu compte.

Parmi les caractères on trouve : complètement dingue, trop intelligent, homosexuel. En quoi, cela pouvait-il vous aider à prendre le syndicat ?

C'était juste pour expliciter auprès de deux, trois personnes, les difficultés qu'avait ce camarade parce que, dans un environnement très homophobe et misogyne, il était très compliqué pour des camarades comme cela d'arriver à prendre des responsabilités et à pouvoir militer correctement. Ce camarade était l'un de ceux que j'avais déjà sollicités pour rentrer au niveau du bureau confédéral parce que ce qu'il vivait depuis des années l'avait rendu totalement libre et indépendant et justement écarté du reste de cet appareil. C'est un environnement qui est extrêmement violent, nauséabond. Ce document sert ensuite à quelques barons autoproclamés qui ont pris en otage, malheureusement, cette grande maison depuis quelques années, pour dire : "tu arrêtes ton audit financier".

C'est ça qui a tout déclenché ?

Il y a 1000 pages de textes, de procédures et de règles que l'on a mis en place entre février 2015 et mon élection. Au moment de mon élection, j'essayais de mettre des règles sur tout. Ce qui met le feu aux poudres de façon très forte, c'est lorsque je décide de faire un audit financier pour contrôler et mesurer tout ce qui se passe sur le plan financier. Là, évidemment, un certain nombre de vieux barons décident qu'il faut arrêter ça. Donc, ce document sur lequel ils remettent la main sera le moyen d'arrêter tout cela.

Pourquoi ne donnez-vous pas leur nom ?

D'abord parce que ce n'est pas mon rôle. Ce House of cards [série télé américaine] syndical, je vais le laisser derrière moi. Dans le livre, c'est moins de 10% sur FO et 90% d'analyse sur vers où nous emmène le mouvement. Il est évident que je ne pouvais pas échanger avec Laurent Neumann dans le cadre de ce livre sans avoir commencé par revenir sur ce qui s'est passé. Il n'y a pas d'accusation. J'ai fait un mail en partant auprès des militants, à chaud. J'ai cherché à ne pas nuire de façon supplémentaire à l'organisation, alors que ceux qui ont diffusé ce document y ont fortement contribué. Un an après, j'écris une vingtaine de pages pour revenir à froid, je ne cherche aucunement des poux dans la tête à qui que ce soit. Ils s'occupent eux-mêmes d'autodétruire Force ouvrière. Je cherche à aller de l'avant, je ne vis pas dans le rétroviseur. Maintenant s'ils veulent vraiment venir me chercher, ils me trouveront.

Dans ce livre vous chargez Emmanuel Macron. Les syndicats sont-ils trop tendres avec lui ?

Les syndicats ne proposent plus, ne font plus de préconisations. Ils sont attaqués de toute part, il y a souvent la posture de "on est contre", par contre ils ne contre-proposent rien. Ils ne sont pas capables de proposer ensemble. Emmanuel Macron se prend pour un PDG. Il a une intention, il a une ambition qui est de sauver la France, mais il ne s'intéresse pas à sauver les 67 millions de Français.

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