Au procès France Télécom, Didier Lombard "pleure", mais refuse de reconnaître "le mal-être généralisé"
L'ancien PDG de France Télécom est apparu ému, vendredi, à son procès pour harcèlement moral. Mais il a refusé de parler de "de souffrance (à l'échelle) de l'entreprise".
De longs silences et même des larmes. Pour la première fois en cinq semaines d'audience, les ex-dirigeants de France Télécom jugés pour "harcèlement moral" ont exprimé de l'émotion, vendredi 7 juin, alors que le tribunal examinait les conséquences de l'été 2009, pic de la crise sociale dans l'entreprise. Les prévenus, confrontés aux témoignages des parties civiles, avaient-ils été touchés par les premières semaines d'audience ? Ils l'ont en tout cas montré, vendredi.
L'ex-PDG Didier Lombard a raconté sa visite à Cahors en octobre 2009, où il a annoncé qu'il renonçait à la fermeture du site. Des employées lui avaient envoyé des mails auparavant, puis lui ont écrit pour Noël. "J'ai reçu ensuite des mails gentils de ces dames. C'est important pour moi", a-t-il raconté, ému. "Vous pleurez ou vous toussez M. Lombard ?" a interrogé la présidente Cécile Louis Loyant. "Je pleure", a-t-il répondu.
On pense que je n'ai pas de cœur mais ce n'est pas vrai.
Didier Lombardau procès France Télécom
L'ex-PDG est aussi revenu sur son "énorme bêtise", la fameuse phrase sur "la mode des suicides", qu'il a prononcée devant les médias qui l'attendaient à sa sortie du ministère du Travail, le 15 septembre 2009. "J'étais tétanisé par l'effet de contagion" des suicides. "Je ne voulais pas être agressif, au contraire, tout ce que nous avions en tête, c'était de désamorcer" la tension.
Après lui, est apparu à la barre Louis-Pierre Wenès, l'ex-numéro 2, directeur d'Opération France qui regroupait 80 000 des 120 000 salariés de France Télécom. "Je vis cette crise avec beaucoup d'émotion". Puis, après une pause de plusieurs secondes : "Cela me touche au plus profond de moi-même". Il a aussi affirmé avoir ressenti "un profond sentiment d'injustice", devant la couverture médiatique.
Les prévenus nient "la souffrance de l'entreprise"
Louis-Pierre Wenès a quitté l'entreprise début octobre 2009. "Je sais qu'il y a des pressions, notamment politiques, pour que quelqu'un parte. (...) La personne toute désignée, c'est moi. Nous avons une discussion avec Didier Lombard et nous décidons que je dois partir". Il affirme avoir "été sacrifié", parce qu'il était "une pièce rapportée" à France Télécom, où il n'était arrivé qu'en 2003. "Je vis cela comme une blessure qui ne s'est pas refermée."
Mais sur le fond, les lignes n'ont pas bougé. Louis-Pierre Wenès conteste "la globalisation" de la souffrance. "Certains ont souffert jusqu'à mettre fin à leurs jours. C'est dramatique. Mais je ne suis pas d'accord pour qu'on globalise ça et qu'on parle de la souffrance (à l'échelle) de l'entreprise". "Je ne crois pas que le mal-être ait été généralisé", a renchéri Didier Lombard.
Les ex-dirigeants se félicitent de leur bilan économique. Pour l'ex-PDG, "si on n'avait pas fait le plan NExT (qui a réorganisé l'entreprise de 2006 à 2008), aujourd'hui il n'y aurait plus France Télécom". Louis-Pierre Wenès "regrette une chose" : "ne pas avoir eu assez de contact avec les organisations syndicales. Je ne me souviens pas qu'on ait demandé à me voir". Mais côté partie civile, l'avocat Frédéric Benoist lui a rappelé que, dès 2006, les organisations syndicales l'ont interpellé.
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