"Gilets jaunes" : "En déclarant les manifestations, nous prenons le gouvernement à son propre piège : nous ne sommes pas des émeutiers"
Sophie Tissier, coordinatrice du groupe "gilets jaunes signataires", estime que les manifestations non déclarées laissent "le champ libre à Christophe Castaner".
À Paris, samedi 23 mars, le défilé des "gilets jaunes", déclaré en préfecture, s'est déroulé dans le calme. Ce dont se félicite dimanche Sophie Tissier, coordinatrice du groupe "gilets jaunes signataires", qui co-déclare ces manifestations depuis le mois de janvier. Mais elle regrette l'absence de retours du gouvernement et des médias.
franceinfo : Au lendemain du 19e samedi de mobilisation des "gilets jaunes", à Paris, des commerçants et des passants parlent de peur, de tristesse. Que leur répondez-vous ?
Sophie Tissier : Je déplore qu'ils soient tristes et qu'il y ait eu autant de violence. Nous manifestons depuis le 5 janvier, pacifiquement, sans qu'il y ait aucune casse, aucun heurt. Il y a eu des manifestations déclarées pendant tous les actes précédant l'acte fatal du samedi 16 mars. Elles se sont très bien déroulées. Même les forces de l'ordre nous félicitaient en fin de manifestation. Pour la première, nous étions 17 à co-déclarer. Samedi 23 mars, nous étions 28 cosignataires. Il y a plus de 60 personnes actives dans ce groupe et sur Facebook, il y a plus de 1 400 personnes qui nous suivent et qui soutiennent ces déclarations de manifestations, parce qu'elles ont compris qu'en laissant le champ libre à Christophe Castaner pour réprimer, lorsque les manifestations ne sont pas déclarées, ça dessert le mouvement.
Jouer la carte de la légalité, pour vous, c'est le meilleur moyen de faire passer le message ?
Bien sûr. Nous prenons le gouvernement à son propre piège, c'est-à-dire qu'il nous accuse d'être des émeutiers. Ce que nous ne sommes pas, évidemment. Beaucoup de "gilets jaunes" n'avaient pas connaissance des procédures administratives de déclaration des manifestations. La majeure partie des "gilets jaunes" sont pacifiques mais le problème, c'est que les manifestations déclarées ne sont malheureusement pas écoutées par le gouvernement et sont assez "invisibilisées" dans les médias. On a eu très peu d'interviews et d'images de manifestations déclarées et pacifiques. C'est important de dire que depuis deux mois et demi, les manifestations pacifiques se passent très bien. On voudrait que tout le monde puisse venir faire ses courses en parallèle des manifestations et puisse discuter avec nous. C'est notre but : pouvoir toucher toute la population et que les commerces soient ouverts. Nous-mêmes, nous faisons marcher les commerces, on va dans les brasseries, on va acheter des sandwichs... On fait tout pour faire marcher les commerces et discuter avec les gens pacifiquement, pour faire passer nos idées. Nous voulons plus de démocratie, la justice fiscale, la justice sociale, soutenir les services publics.
Il y a eu les 10 milliards d'euros de mesures et le grand débat national, dont on attend les conclusions. Qu'est-ce qui, demain, pourrait vous décider à arrêter le mouvement ?
Déjà, que l'Assemblée nationale soit dissoute. Que l'exécutif soit mis en suspension, c'est-à-dire qu'il y ait une vacance du pouvoir le temps de créer des "États généraux citoyens" avec tous les corps intermédiaires et des citoyens volontaire, tirés au sort, parmi lesquels des "gilets jaunes". Une démission du gouvernement, c'est réaliste. Il faut avoir conscience de la très grande crise démocratique que nous vivons. Il y a des injustices criantes qui ne sont plus vivables.
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