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Loi "anticasseurs" : "On pourra faire tout ce qu'on veut, à partir du moment où des gens soutiennent ces actes..." déplore un syndicat de police

Invité sur franceinfo mardi à réagir à l'annonce par le Premier ministre d'une nouvelle loi "anticasseurs", Jean-Marc Bailleul, secrétaire général du Syndicat des cadres de la sécurité intérieure, s'interroge sur la mise en application d'une telle mesure et appelle à la création d'un cadre légal pour l'organisation de manifestations.

Article rédigé par franceinfo
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Jean-Marc Bailleul, secrétaire général du Syndicat des cadres de la sécurité intérieure, invité sur franceinfo mardi. (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

Edouard Philippe a annoncé lundi 7 janvier une nouvelle loi "anticasseurs" avec un fichier à l'image de celui contre les hooligans. Il promet un dispositif de sécurité "considérable" pour l'éventuel acte 9 des "gilets jaunes", samedi. "Tout ce qui va renforcer la dissuasion pour les casseurs va dans le bon sens", a réagi sur franceinfo mardi 8 janvier Jean-Marc Bailleul, secrétaire général du Syndicat des cadres de la sécurité intérieure (SCSI).

franceinfo : Que pensez-vous de cette annonce d'une nouvelle loi "anticasseurs" ?

Jean-Marc Bailleul : Tout ce qui va renforcer la dissuasion pour les casseurs va dans le bon sens, après c'est la mise en application qui pose question. [...] On le demande depuis longtemps, mais la mise en application peut paraître problématique si vous avez 200 ou 300 personnes cagoulées. [...] Cela va être compliqué d'interdire à des gens d'aller à une manifestation qui n'a pas été déclarée et n'a pas d'existence légale au départ.

Qu'auriez-vous aimé entendre comme annonces ?

On aurait aimé que, comme en Allemagne, il puisse y avoir des marqueurs intégrés dans l'eau [lancée par les canons à eau] pour qu'on puisse identifier de façon formelle ceux qui sont les casseurs et les provocateurs. Cela n'a pas été annoncé. Sur le port des cagoules qui devient un délit, c'est une bonne chose quand on arrive à identifier les casseurs cagoulés. Il faut systématiquement demander aux "gilets jaunes" responsables de déclarer leurs manifestations. Cela donne un cadre légal qui nous permet de prévoir mieux les effectifs à mettre en place. Il faut que derrière, il y ait des sanctions exemplaires. Evidemment.

On ne peut donc pas gérer des casseurs comme des hooligans ?

Non, parce que le hooligan est circonscrit à un trajet ou à un stade. Une manifestation n'est pas forcément déclarée, on l'a vu ces dernières semaines, et par définition un casseur identifié ne va pas forcément dire qu'il va à une manifestation qui n'existe pas sur le papier. Et puis cette cagnotte qui a été lancée pour le "boxeur" [l'homme qui est soupçonné avoir frappé samedi deux gendarmes mobiles] nous rend un peu fatalistes. Ce "boxeur" n'aurait pas été dans le fichier des casseurs puisque jusque-là il n'avait pas été identifié comme tel. [Le succès de la cagnotte en ligne] cela veut dire qu'une frange de la population soutient des gens qui délibérément ont frappé des représentants des forces de l'ordre. C'est inquiétant pour nous qui sommes sur le terrain. On se rend compte qu'il y a des gens qui trouvent légitime de frapper, comme ça, devant les caméras de télévision. On pourra faire tout ce qu'on veut, à partir du moment où des gens soutiennent ces actes...

Un policier a également fait preuve de violence à l'égard des manifestants, à Toulon. Qu'en pensez-vous ?

Ce qui me gêne, l'enquête le révèlera, c'est qu'on a montré certaines images, sachant que ce policier se savait filmé. A Toulon, ils étaient 40 policiers par rapport à des centaines de "gilets jaunes". Il n'y avait pas de CRS, pas de gendarmes mobiles en renfort, donc ils étaient exténués. Le matin sur l'autoroute, ce commandant de police a été mis à terre et frappé à terre. Ces images-là, personne ne les montre. Donc elles sortiront et on verra si on ne remet pas l'église au milieu du village.

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