Les concessionnaires d'autoroutes appelés à investir 10 milliards d'euros pour les rendre en bon état
Les sociétés concessionnaires d'autoroutes vont devoir mettre la main à la poche. L'Autorité de régulation des transports (ART) estime à plus de 10 milliards d'euros le montant d'investissements nécessaires pour rendre les autoroutes en bon état d'ici à la fin des concessions, qui s'échelonne entre 2031 et 2036. C'est un "chantier inédit et complexe", annonce l'ART dans un rapport publié samedi 30 novembre. A noter que le régulateur fait des préconisations, mais qu'in fine, ce sera à l'Etat de trancher.
Comment s'assurer que les sociétés ne freinent pas leurs investissements à l'approche de l'expiration des contrats, laissant à leurs successeurs le soin de gérer les problèmes ? "Les obligations de fin de contrat doivent être précisées pour permettre leur achèvement dans de bonnes conditions", insiste l'ART. Car les contrats sont "incomplets". Ils ne proposent pas de définition objective du "bon état de l'autoroute à sa restitution", et ils sont "ambigus" en laissant une marge d'interprétation "quant aux obligations d'investissement restant à la charge du concessionnaire".
Un modèle économique jugé "efficace"
L'état des autoroutes concédées "est objectivement bon", souligne l'ART, avec des ouvrages d'art, comme les tunnels et les ponts, en meilleur état que sur le réseau non concédé. Ce modèle économique n'est pas remis en cause parce que c'est "un système efficace, où l'usager est le payeur", permettant des investissements et un entretien de qualité, note l'ART.
D'après ses calculs, les sociétés d'autoroutes "dépensent aujourd'hui 800 millions d'euros par an pour entretenir l'infrastructure". Il faudrait donc qu'elles consacrent 4 milliards sur les cinq dernières années de leurs contrats. Par ailleurs, l'ART recommande "un effort supplémentaire d'entretien" estimé à 1,2 milliard d'euros "sur le seul périmètre des chaussées et ouvrages d'art". Ils ne sont pas dangereux aujourd'hui, mais pourraient "présenter un risque à terme et (...) nécessiter des travaux coûteux après l'échéance des concessions", explique le président de l'ART, Thierry Guimbaud, dans un entretien au Monde. Cette évaluation a d'ailleurs été revue en baisse après des remarques formulées par les sociétés d'autoroute, précise-t-il.
Certains investissements jamais réalisés
Enfin, et c'est là où le contentieux pourrait émerger, l'ART note que les contrats de concession prévoient des investissements, comme par exemple des élargissements de voie (passage de 2x2 à 2x3 voies), qui n'ont jamais été réalisés. Ceux-ci "ne sont plus pertinents, en particulier lorsque le trafic n'a pas atteint le niveau prévu", reconnaît Thierry Guimbaud. Mais "le prix du péage intègre leur financement. L'ART pense donc que l'argent récolté peut être utilisé pour un autre investissement, par exemple en faisant des aires de covoiturage", poursuit-il. Cela représente un montant de 5,1 milliards d'euros supplémentaires à payer pour les sociétés d'autoroutes.
Interrogé sur l'avenir du modèle autoroutier et une éventuelle baisse du prix des péages à la fin des contrats, Thierry Guimbaud appelle à la prudence. "Si on le baisse, cela peut créer un appel d'air vers la route, au détriment du ferroviaire", prévient-il. C'est pourquoi il suggère qu'une partie des revenus tirés des péages participe au financement du rail.
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