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Suspension du train des primeurs Perpignan-Rungis : "Il n’y a pas de politique sur le long terme" en faveur du fret ferroviaire

Gilles Dansart, directeur de Mobilettre, site spécialisé dans les mobilités, déplore des discours sans actes des gouvernements successifs.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Des employés chargeaient encore le train des primeurs le 12 juillet en gare de Perpignan, à destination de Rungis. (RAYMOND ROIG / AFP)

Le train des primeurs Perpignan-Rungis est suspendu jusqu'au 1er novembre a annoncé mercredi 17 juillet la région Occitanie. La SNCF menaçait déjà de fermer cette ligne de marchandises quotidienne au début du mois de juin. Depuis le début de semaine, le train roule à vide pendant que les marchandises sont acheminées en camion. "Le problème est qu’il n’y a pas de politique sur le long terme pour favoriser économiquement ce mode de transport", a réagi jeudi sur franceinfo Gilles Dansart, directeur de Mobilettre, site spécialisé dans les mobilités. "On aurait pu anticiper [les travaux de remise aux normes des wagons] bien avant, avoir une programmation du réinvestissement et associer d’autres acteurs que les fruits et légumes pour sauver cette ligne", a-t-il ajouté.

franceinfo : Cette suspension du train des primeurs est-elle le symbole de l'échec du ferroviaire ?

Gilles Dansart : Oui, c’est le symbole de 40 ans pendant lesquelles les slogans ont remplacé les actes pour le fret ferroviaire. Tous les gouvernements sans exception ont toujours clamé qu’il fallait du fret ferroviaire et mettre des camions sur les trains pour réduire le nombre de poids lourds sur les routes, mais en coulisse rien ne se faisait. La part de marché du fret ferroviaire a continué à baisser pour aller sous les 10 %. Le problème est qu’il n’y a pas de politique sur le long terme pour favoriser économiquement ce mode de transport. Le grand concurrent du fret ferroviaire, c’est la route et pour que les acteurs mettent leurs marchandises sur le train il faut les encourager. Sur un certain nombre de liaisons, le train est compétitif, notamment ce qu’on a appelé les autoroutes ferroviaires c’est-à-dire les trains qui circulent de façon très régulière et emmènent les marchandises d’un bout à l’autre de la France. Ces autoroutes ferroviaires bénéficient vraiment d’une politique et d’un encouragement. D’un point de vue environnemental, évidemment c’est plus intéressant : ça ne dégage pas ou très peu de CO2. Il faut encourager ces autoroutes ferroviaires.

La ministre des Transports, Élisabeth Borne, devenue ministre de l’Écologie a décidé de suspendre cette ligne jusqu’au 1er novembre, le temps de trouver une solution économiquement viable. Est-ce un enterrement déguisé ?

Le problème, c’est qu’on peut difficilement forcer les acteurs privés à mettre des marchandises s’ils considèrent que c’est plus cher ou s’ils considèrent que la SNCF ne leur facilite pas les choses. Ce n’est pas un jeu entre l'État et les chargeurs. C’est un jeu compliqué à trois, voire à quatre acteurs : il y a la SNCF qui est transporteur, mais il y a aussi la SNCF avec ses infrastructures. Il y a également le problème des sous-investissements dans les wagons. Là, on paie encore une fois des décennies d’approximation.

Y a-t-il un problème de fiabilité sur ce marché ?

Sur ces destinations, le problème depuis quelques années, et ça va durer encore quelques années, ce sont plutôt les travaux. Il y a beaucoup de travaux à faire parce qu’on a laissé se dégrader la voie donc il peut y avoir quelques irrégularités. Il y a aussi le problème de sous-investissement du wagon : on ne peut pas dire à des acteurs qu’on arrête dans un mois parce que les wagons ne sont plus aux normes. On aurait pu l’anticiper bien avant et avoir une programmation du réinvestissement et associer d’autres acteurs que les fruits et légumes pour sauver cette ligne.

Selon les opposants à la fermeture de cette ligne, 25 000 camions seront lancés sur les routes si cette ligne s’arrête. Est-ce vrai ? 

On n’est pas loin de ça. Ce sont des gros volumes puisque Rungis est l'un des plus importants marchés européens d’alimentation. Le nombre de camions est gigantesque mais ce qui choque, c’est que la ligne est régulière et traverse une grande partie de la France. On pourrait trouver d’autres marchandises, mais ça veut dire aussi une force commerciale, une volonté et un encouragement fort. La collectivité locale, la région Occitanie, commence à faire son travail pour supplier un État qui finalement ne voyait les choses que d’un angle financier : Bercy considère qu’il faut rationnaliser tout ça et que s’il y a des camions tant pis. Cette conception de l’État doit changer au bénéfice d’une vision plus environnementale des choses.

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