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Municipales : les trois erreurs de François Hollande

Les mines déconfites des barons socialistes, dimanche soir, racontent leur surprise face à l'ampleur du désaveu qu'ils ont subi. Décryptage. 

Article rédigé par Salomé Legrand
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
(De G à D) Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, et François Hollande, président de la République, et Kader Arif, ministre des Anciens Combattants, le 14 février 2014, à l'Elysée (Paris).  (REVELLI-BEAUMONT / SIPA)

"C'est un avertissement sévère pour la politique gouvernementale. Une partie des électeurs de gauche nous a dit : 'Arrêtez vos conneries !'" Voilà comment François Rebsamen, maire de Dijon et proche de François Hollande, analyse les résultats du premier tour des municipales, dimanche 23 mars, raconte Le Parisien

A Quimper, Nancy, Reims, Saint-Etienne, Toulouse, les candidats PS sont en ballottage défavorable. Pire, ils sont laminés à Nîmes, Pau, Amiens, Béziers… sans compter Marseille où les socialistes arrivent troisième, derrière l'UMP et le FN. L'exécutif s'attendait à de mauvais résultats, mais pas à une telle débâcle. Comment a-t-elle été rendue possible ? Francetv info a interrogé plusieurs élus de la majorité pour identifier les erreurs du tandem Hollande-Ayrault.

1 Il a sous-estimé la dimension nationale du vote

"Les maires socialistes ont bien géré leurs villes, et sont proches de leurs habitants", se rassurait un poids lourd du gouvernement cité par Le Monde en décembre. Et le gouvernement, comme les barons locaux, n'a eu de cesse de séparer enjeux locaux et nationaux. Encouragés en ce sens par différents spécialistes et sondages, comme dans Le Figaro ou Les Echos

Finalement, "le premier tour a pris une dimension politique et nationale forte, les électeurs de gauche ont été très absents", reconnaît la sénatrice PS Laurence Rossignol, interrogée par francetv info. "La logique qui consiste à accroître la pression fiscale sur le citoyen et faire des cadeaux aux entreprises, le pouvoir d'achat qui est stagnant, ça pèse..." énumère, intarissable, la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann, qui lâche : "Contrairement à ce qu'on croit, en France, les gens votent politique, ou avec les pieds, c'est-à-dire qu'ils s'abstiennent."

La porte-drapeau de l'aile gauche du PS fulmine : "Prenez Arras et Marseille, des villes où il y a beaucoup de fonctionnaires. On leur dit qu'on va réduire le budget de l'Etat de 50 milliards d'euros et après on s'étonne que les fonctionnaires ne votent pas pour nous ? Comment s'étonner qu'à Florange, le maire PS soit battu ?" "Ceux qui sont étonnés des résultats, c'est qu'ils sont dans une bulle, et c'est peut-être le problème de notre parti aujourd'hui", abonde le député d'Ardèche Pascal Terrasse.

2 Il n'a pas encore eu de résultats

"On s'y attendait, les résultats du redressement sont moins rapides que le mécontentement", analyse prudemment le député de Paris Jean-Christophe Cambadélis sur son blog. "Les Français veulent sortir de la crise, et cela ne va pas assez vite", confirme Laurence Rossignol, de la Gauche durable : "Le gouvernement fait une politique de redressement des comptes publics, avec des avancées sociales, et elles ne sont pas encore arrivées dans les assiettes de Français." Et de marteler : "La France n'est pas passée à droite. On a un électorat de gauche qui veut plus, plus de réforme, plus de redistribution sociale, plus de réduction des inégalités." 

"Nos électeurs des précédentes échéances ne sont pas allés voter, soit parce qu'ils sont déçus, soit parce qu'ils sont impatients de voir des résultats", détaille Olivier Dussopt, l'un des rares socialistes réélus dès le premier tour, à Annonay (Ardèche)"Sur les marchés, on m'a parlé d'emploi, de difficulté à boucler les fins de mois", explique le "rescapé" du naufrage, qui note deux griefs récurrents : ne pas avoir rétabli la demi-part fiscale pour les veufs, et le gel des retraites complémentaires, décidé à 15 jours du premier tour. "L'électorat de François Hollande a fondu comme neige au soleil. Depuis le début, c'est mal parti avec le choix de l'austérité", assène encore la sénatrice de Paris Marie-Noëlle Lienemann. 

"L'électorat de gauche (...) s'est abstenu. Parce qu'il est mécontent de la gauche qui gouverne et voulait lui mettre une taloche", enchaîne Jean Glavany. Le député et ancien ministre socialiste avait réclamé un "changement de cap" vers "le chemin de l'autorité-cohérence-clarté-exemplarité" dès octobre. "Les Français ne veulent pas des réformes sociétales :  ils veulent des réformes de fond, sur l'emploi, sur la sécurité", analyse pour sa part Pascal Terrasse, qui n'entend surtout "pas une demande de gauche, mais une demande d'ordre".

3 Il n'a pas su tenir son camp

"Il aurait dû changer le gouvernement à la fin de l'année", estime un ténor de la majorité cité par Le Parisien. A défaut, "il faut plus de clarté : les gens ont le sentiment qu'il y a une forme d'amateurisme, un manque de solidité" au plus haut sommet de l'Etat, concède un élu socialiste du Sud-Est qui ne compte plus les couacs : procréation médicalement assistée, droit de vote des étrangers, nucléaire, fiscalité, affaire Leonarda...

"Il faut que le PS dise les choses, nomme les choses et fasse les choses", martèle Pascal Terrasse, fidèle hollandiste. "Le PS a une vision trop comptable et pas assez politique", regrette-t-il. "Ce ne sont pas les bonnes personnes au bon endroit, Harlem Désir [premier secrétaire du PS], Bruno Le Roux [président du groupe PS à l'Assemblée] et Jean-Pierre Bel [président du Sénat] ne sont pas à leur place", attaque un autre socialiste, qui déplore : "On manque de courage, il faut un discours clair, pas sur de la moitié ou de l'à peu près".

"Tout le monde se méfie de tout le monde : le PS se méfie des présidents des groupes au Sénat et à l'Assemblée qui se méfient du gouvernement qui se méfie du PS", glisse-t-il. "Si on ne veut pas plonger durablement, il faut travailler ensemble derrière le chef de l'Etat", prévient encore Pascal Terrasse. Et Laurence Rossignol d'abonder : "Les électeurs veulent savoir où on va, et surtout qu'on y va fermement." 

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