A ECOUTER. Emmanuel Macron, de faux pas en provocations
De son entrée au gouvernement à sa démission ce mardi, Emmanuel Macron, l'ex-ministre de l'Economie n’aura cessé de s’émanciper et de provoquer, tantôt à dessein, tantôt par maladresse.
Le fossé s'était de plus en plus creusé. Entre Emmanuel Macron et la gauche d’abord. Puis entre Emmanuel Macron et François Hollande ensuite. Dès son entrée au gouvernement, le jeune ministre n’a cessé de s'émanciper et de provoquer, multipliant à l’envi les déclarations chocs et polémiques.
Il y a dans la société, GAD, une majorité de femmes. Il y en a qui sont, pour beaucoup, illettrées
Le roi des petites phrases est un client en or pour les sujets archives… Remontons dans le temps : en septembre 2014, à peine nommé, pour sa première intervention dans les médias, Emmanuel Macron met le feu aux poudres lors d'un déplacement à l'abattoir Gad en Bretagne. "Il y a dans la société, GAD, une majorité de femmes. Il y en a qui sont, pour beaucoup, illettrées. Pour beaucoup, on leur explique "Vous n’avez plus d’avenir à Gad, ou aux alentours". Aller travailler à 50 ou 60 km… Ces gens là n’ont pas le permis de conduire."
Les illettrés de Gad, premier faux-pas pour le jeune ministre obligé de se rendre sur place pour s'excuser. Ce n'est pas la seule fois qu’Emmanuel Macron sera accusé de mépris de classe.
Quand on me dit « les pauvres voyagent en autocar », j’ai tendance à penser que c’est une caricature. Mais les pauvres qui voudront voyager voyageront plus facilement.
Un mois plus tard, il annonce vouloir développer le transport en autocar. Une libéralisation du marché au coeur de la loi qui porte son nom. "Quand on me dit « les pauvres voyagent en autocar », j’ai tendance à penser que c’est une caricature. Mais les pauvres qui voudront voyager voyageront plus facilement. Parce que l’autocar c’est huit à dix fois moins cher."
Emmanuel Macron qui aime les cars, mais aussi les costards. Ainsi, au mois de mai dernier, lors d’une discussion avec deux militants CGT lors d'un déplacement dans l'Hérault, le ton monte... "Vous n'allez pas me faire peur avec votre tee-shirt" lance-t-il aux syndicalistes…"La meilleure façon de se payer un costard, c’est de travailler", entend-on de la bouche du ministre.
Dix jours plus tard, toujours en costard et un peu hagard, Emmanuel Macron essuie des jets d'oeufs lors d'un déplacement hautement symbolique à Montreuil : les 80 ans du Front Populaire. Emmanuel Macron accusé d'être du côté des patrons... Procès entretenu aussi par ses déclarations sur le fond.
La vie d’un entrepreneur est bien souvent beaucoup plus dure que celle d’un salarié
En janvier dernier, nouvelle interview choc pour l'ancien banquier d'affaire : "La vie d’un entrepreneur, elle est bien souvent beaucoup plus dure que celle d’un salarié, il ne faut jamais l’oublier. Il peut tout perdre et il a moins de garantie". Effet assuré. Nouvelle avalanche de réactions courroucées.
La gauche de la gauche est vent debout comme deux mois plus tôt sur un autre sujet : la fonction publique. "On a besoin de fonctionnaires. C’est essentiel. On a besoin d’un statut de la fonction publique pour garantir sa neutralité et son impartialité. Maintenant, regardez la réalité des choses : il y a beaucoup de fonctions qu’on donne à des fonctionnaires à des gens qui ne le sont pas. Et on garantit des emplois à vie de manière parfois indue sans même parfois passer par des concours."
Des "emplois à vie de manière indue" : l'expression fait des ravages chez les fonctionnaires majoritairement de gauche. D'autant que l'ex-ministre en profite pour avancer une autre proposition : davantage de salaire au mérite dans la fonction publique. Mais le trublion du gouvernement ne s'en tient pas là : il exerce son droit d'inventaire sur la politique économique de la gauche.
L'honnêteté m'oblige à vous dire que je ne suis pas socialiste"
Fait aggravant pour ses détracteurs : il le fait devant le patronat, à peine nommé. Août 2014, à l'université d'été du Medef dans les Yvelines. Ironie de l'histoire, il démissionne ce mardi, le jour de son coup d'envoi.
"L'honnêteté m'oblige à vous dire que je ne suis pas socialiste", déclare l'homme, au titre de son dernier fait d’arme, sa dernière déclaration tonitruante, lors d'une visite au Puy-du-Fou du très droitier Philippe de Villiers. Il n'était pas socialiste. Il n'est donc désormais plus ministre.
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