Présidentielle : invectives, répliques chocs, moments forts... Ce qu'il faut retenir du débat Le Pen-Macron sur France 2 et TF1
A quatre jours du scrutin, les deux candidats qualifiés pour le second tour de l'élection présidentielle ont débattu pendant plus de deux heures.
Face-à-face. Marine Le Pen et Emmanuel Macron ont débattu pendant près de deux heures et demie, mercredi 3 mai, à quatre jours du second tour de l'élection présidentielle. Les deux finalistes ont tenté de convaincre les Français dans la dernière ligne droite en détaillant leur programme, mais aussi en installant leur stature présidentielle. Franceinfo a compté les points.
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Le style
Marine Le Pen. La candidate du Front national a choisi un ton très agressif. Elle n'a eu de cesse d'invectiver Emmanuel Macron sur son programme ou sur ses déclarations passées. Avec beaucoup d'audace, elle s'est montrée combative pendant plus de deux heures, n'hésitant pas à railler ou à rabrouer son adversaire avec un certain mépris. Mais ce style offensif lui a parfois coûté en précision. La présidente (en congé) du FN a beaucoup cherché dans ses notes et est apparue en difficulté sur certains dossiers, notamment sur la politique industrielle.
Emmanuel Macron.;"Madame Le Pen, vous pouvez me laisser répondre de manière posée aux choses ? Je vous remercie." La phrase, lâchée par Emmanuel Macron après plus d'une heure de débat, résume bien l'attitude du candidat d'En marche ! Face à Marine Le Pen, il a dû répondre à d'incessantes attaques. Il y a fait face sur un ton souvent professoral, tranchant avec les critiques tous azimuts proférées par son adversaire. Ironique, parfois moqueur, il a globalement donné l'image d'un candidat en maîtrise.
La stratégie
Marine Le Pen. Dès les premières minutes, la candidate du FN a choisi l'attaque. "Monsieur Macron est le candidat de la mondialisation sauvage, de la guerre de tous contre tous, de l’ubérisation, du dépeçage de la France", a-t-elle dit d’emblée. En répétant en boucle ses arguments, elle a cherché à lui faire porter le bilan du quinquennat Hollande : "Vous êtes soutenu deux fois par jour par François Hollande, dont vous êtes l'héritier." Elle est allée à plusieurs reprises sur le terrain des attaques personnelles, reprochant par exemple à son adversaire "sa froideur de banquier d'affaires".
Marine Le Pen a utilisé des questions rhétoriques pour tenter de mettre en difficulté son interlocuteur, comme pour souligner les soutiens hétéroclites du candidat d'En marche ! : "Madame Parisot sera peut-être votre Premier ministre, (…) Madame Taubira alors ?" Marine Le Pen a ainsi sorti tous les dossiers polémiques liés au candidat, quitte à parfois tomber dans la caricature. Elle n'a pas hésité non plus à se livrer à des insinuations : "J'espère qu'on n'apprendra pas que vous avez un compte au Bahamas… j'espère !"
Emmanuel Macron. Il n'a rien laissé passer. "Vous n'êtes pas la candidate de la finesse d'esprit", a-t-il envoyé dès sa première réplique. Face aux attaques, souvent imprécises, de sa rivale, il a tout fait pour décrédibiliser son adversaire et afficher sa maîtrise des dossiers. A de nombreuses reprises, il a accusé Marine Le Pen de mentir et de "dire de grandes bêtises", dénoncé son "impréparation crasse" ou le "grand n'importe quoi" de certains points de son programme.
Soulignant les lacunes de Marine Le Pen sur les questions économiques et industrielles, il s'est montré à son avantage quand sa rivale s'est emmêlée les pinceaux en confondant les ventes d'Alstom et de SFR. "Il y en a un qui fait des téléphones et l'autre des turbines", lui a-t-il lancé avec une pointe de mépris.
La réplique choc
Marine Le Pen. "Vous êtes jeune à l’extérieur, mais vieux à l’intérieur, parce que vos arguments ont le double de votre âge."
Emmanuel Macron. "La grande prêtresse de la peur, elle est en face de moi."
Le moment fort
Marine Le Pen. Certaines attaques de la candidate ont parfois fait mouche. Après avoir accusé Emmanuel Macron d'être soumis à "des intérêts privés", elle s'est interrogée sur la présence dans l'équipe santé du candidat d'un collaborateur du groupe pharmaceutique Servier - une référence à Jean-Jacques Mourad, ancien conseiller du candidat qui a démissionné en mars pour des conflits d'intérêt avec le laboratoire.
"Il y a un bras de fer à faire avec les laboratoires. Il faut avoir de la volonté politique et arrêter de défendre les intérêts privés, contrairement à Monsieur Macron, qui avait quelqu'un qui travaille avec Servier", a ainsi lancé la candidate. Elle s'est ainsi interrogée sur la proposition du candidat de rembourser les médicaments contre l’hypertension artérielle, un marché important pour Servier. Emmanuel Macron a choisi de ne pas répondre à cette attaque. Interrogé par Le Monde, un porte-parole du candidat avait lui évoqué une "mesure de bon sens pour les malades".
Emmanuel Macron. Il a attendu la fin du débat pour attaquer Marine Le Pen sur le terrain des affaires. "Le parti des affaires c'est le vôtre, pas le mien. Le parti qui ne va pas devant les juges, c'est le vôtre", a-t-il lancé. Attaqué sur les doutes qui entourent son patrimoine, il a renvoyé son adversaire dans les cordes : "La différence entre vous et moi c'est que vous êtes, vous, sous le coup d'une procédure judiciaire."
Alors que Marine Le Pen a frôlé la diffamation en se demandant si l'on ne découvrira pas bientôt "un compte aux Bahamas", il lui a sèchement répondu : "Vous, en tout cas, on sait que vous avez un patrimoine sous-évalué."
Le passage à vide
Marine Le Pen. La candidate est apparue brouillonne dans la maîtrise de certains dossiers, notamment sur la politique industrielle. Marine Le Pen a ainsi pointé la responsabilité d'Emmanuel Macron en tant que ministre de l'Economie dans la vente de SFR à Numericable. Or, comme le rappelle le Huffington Post, le candidat n'était alors pas membre du gouvernement mais seulement conseiller de François Hollande.
Pourtant la candidate FN n'a pas voulu abandonner et est allée chercher dans ses fiches pour contredire son adversaire. Mais elle s'est retrouvée à citer un autre dossier, celui de la vente d'une partie d'Alstom à l'entreprise General Electric."Vous êtes en train de lire une fiche qui ne correspond pas au dossier que vous avez cité. C'est triste pour vous. cela montre votre degré d'impréparation pour ce débat !", a rétorqué Emmanuel Macron.
Emmanuel Macron. Marine Le Pen n'a pas manqué d'attaquer Emmanuel Macron sur ses liens supposés avec l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), association dont elle réclame la dissolution. "Vous avez une complaisance pour le fondamentalisme islamiste. Il faut éradiquer cette idéologie et vous ne le ferez pas car vous êtes soumis à eux, ils vous tiennent", a-t-elle accusé, sans apporter de preuve.
Emmanuel Macron a dû attendre plus de cinq minutes pour répondre à cette mise en cause, sans être totalement convaincant. "Si l'UOIF mène des activités qui sont contraires aux lois de la République, je le ferai interdire", a-t-il assuré, laissant entendre que tel n'était pas le cas. Mais dans la foulée, il a immédiatement pris ses distances en affirmant : "Ces gens-là, je ne les connais pas et je n'ai pas de relations avec eux." Conclusion : on ne sait toujours pas vraiment ce que pense Emmanuel Macron de l'UOIF.
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