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Millas : "C'est la personne la plus repliée qui sera la plus à surveiller" dans l'accompagnement des collégiens

Christian Navarre, psychiatre, était l'invité de franceinfo vendredi pour détailler la prise en charge de l'entourage des victimes après la collision mortelle entre un TER et un car scolaire jeudi à Millas, dans les Pyrénées-Orientales. 

Article rédigé par franceinfo
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Après la collision mortelle entre un car scolaire et un TER sur un passage à niveau à Millas jeudi, parents et enfants ont été pris en charge vendredi par une cellule psychologique mise en place au collège Christian Bourquin.  (MAXPPP)

Après la collision mortelle entre un car scolaire et un train, jeudi 14 décembre à Millas (Pyrénées-Orientales), les élèves du collège Christian-Bourquin, où étaient scolarisées les victimes, ont été pris en charge par une cellule médico-psychologique. Christian Navarre, psychiatre, responsable de la cellule d'urgence médico-psychologique de Haute-Normandie, a estimé sur franceinfo que "c'est la personne la plus repliée qui sera la plus à surveiller" dans l'accompagnement des adolescents.

franceinfo : Quelles sont les priorités dans des cas comme ceux-là ?

Christian Navarre : Il y a cette phase de choc, une confrontation brutale au réel de la mort, avec une effraction dans notre illusion d'immortalité. Tout s'est écroulé en quelques instants. Dans ces moments-là, c'est une phase de stupeur, il faut accompagner, être présent, avec une façon bienveillante d'apporter un soutien, même si nous n'avons évidemment pas des solutions toujours pratiques. Il faut permettre aux gens d'exprimer leurs émotions, de verbaliser, même de pleurer. Les gens qui s'effondrent, c'est une façon aussi de libérer leur angoisse. Peu à peu, il faut les remettre dans la réalité, puisque l'objectif est de reprendre une vie normale. Avec, bien sûr, un suivi pour les personnes les plus traumatisées. Ce sas pour se reconstruire leur permet d'acquérir une résilience. Il faut bien mettre à part les personnes qui ont perdu un enfant : là le système de deuil n'est pas tout à fait la même chose. Perdre un enfant est extrêmement dramatique et ce n'est pas la même prise en charge sur le long terme.

Y a-t-il des spécificités pour les psychologues quand on s'adresse à des collégiens ?

Dans la mesure où ils sont capables de s'exprimer, le but est de leur permettre de travailler ensemble pour raconter ce qu'ils ont vécu, les façons dont ils ressentent leurs émotions. Étrangement, ce sont des situations assez faciles à gérer, parce que les gens ont besoin de parler, d'échanger, ils ont vécu la même chose, ils font partie d'un néo-groupe. Cela leur apporte même une sorte de solidarité. D'une certaine façon, il est parfois plus simple de prendre un groupe en charge qu'un individu. C'est la personne qui fera le moins de bruit, la plus repliée, qui sera la plus à surveiller. C'est justement dans ces moments que la solidarité nationale est un soutien réel pour les victimes.

Quels sont les signes qui doivent alerter les psychologues qui font partie de ces cellules d'accompagnement ?

Ces psychologues, qui sont des volontaires pour les sites d'urgence médicopsychologiques, les urgences du Samu, pour l'Education nationale, sont des professionnels. Ils connaissent déjà le milieu, ils sont entraînés. Des infirmiers en psychiatrie, des psychiatres, ont déjà l'habitude de prendre en charge des gens qui ont vécu des traumatismes. Ce qui fait la différence aujourd'hui, c'est le nombre, c'est l'impact collectif. Ceux qui sont les plus inquiétants sont ceux qui se replient, qui ne disent rien, qui sont dans leur coin, et le but c'est de les réintégrer directement dans le groupe pour qu'ils puissent échanger entre eux. Le fait que les familles soient présentes est quelque chose de très positif puisque les adultes sont là pour renforcer les défenses des enfants. C'est une expérience qui va leur servir pour plus tard, pour affronter l'existence.

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