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Mineurs délinquants : "Il faut un impact sur le portefeuille des parents, c'est la seule méthode pour qu'ils comprennent", estime le maire de Valence

Le président de la République envisage de sanctionner financièrement les familles des mineurs auteurs de troubles dans les quartiers.
Article rédigé par franceinfo
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Nicolas Daragon, maire de Valence, lors d'une conférence de presse le 12 décembre 2022. (NORBERT GRISAY  / MAXPPP)

"Il faut qu'il y ait un impact sur le portefeuille des parents parce que c'est la seule méthode pour qu'ils comprennent", a estimé mercredi 5 juillet sur franceinfo Nicolas Daragon, maire Les Républicains de Valence (Drôme). L'élu local a fait adopter en décembre 2020 en Conseil municipal des mesures visant à supprimer les aides de la ville à des parents de délinquants. Emmanuel Macron envisage de sanctionner financièrement les familles des mineurs auteurs de troubles dans les quartiers. La majorité "prend enfin conscience des nécessités d'une société qui a beaucoup changé", note le maire de Valence.

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franceinfo : Quelles aides avez-vous supprimées à Valence ?

Nicolas Daragon : En décembre 2020, nous avons pris une délibération pour suspendre les aides facultatives que verse la ville aux familles de mineurs délinquants qui n'assument pas l'éducation de leurs enfants. Le chèque sport, le chèque culture, le contrat municipal étudiant, mais aussi la remise en cause du bail d'habitation lorsque les familles sont logées chez le bailleur social, lorsqu'ils perturbent la totalité du quartier. On a voté cette délibération. J'ai eu droit à des recours de La République en marche drômoise. J'ai eu droit à une transmission à la Défenseure des droits par la députée LREM de la circonscription. Et j'ai surtout eu droit à un merveilleux tweet de Monsieur Véran qui disait que c'était scandaleux.

Vous avez l'impression que la majorité présidentielle suit votre chemin ?

Elle prend enfin conscience des nécessités d'une société qui a beaucoup changé et où la protection des mineurs, ça compte évidemment, mais il y a aussi la responsabilité des parents qu'il faut mettre en cause et aussi revoir ces lois qui exonèrent de toute responsabilité un certain nombre de mineurs. Bien sûr qu'en dessous de 14 ans, c'est compliqué de prononcer des condamnations. À partir de 15, 16 ou 17 ans quand on a affaire à des mineurs qui sont armés, il faut changer la loi et il faut la durcir.

La Défenseure des droits vous a demandé de suspendre ce dispositif ?

Elle m'a demandé de le suspendre parce que ça nuit beaucoup aux enfants. Lesquels enfants, on les retrouve dans la rue en train de tirer des coups de mortier sur la police municipale ou sur la police nationale, voire sur les sapeurs-pompiers. C'est dire si ça nuit alors à leur santé et à leur éducation.

"Je vise des mineurs délinquants qui perturbaient 99,9 % des habitants des quartiers dans lesquels ils sévissent, qui se comportent bien et qui en ont marre de payer des impôts pour venir aider les parents qui n'assument pas l'éducation de leurs enfants."

Nicolas Daragon, maire LR de Valence (Drôme)

à franceinfo

Sur quels critères vous sanctionnez les parents ?

C'est le Conseil des droits et des devoirs des familles qui reçoit les familles lorsque les enfants sont en train de dériver. Il propose des mesures éducatives. On a affaire à trois types de familles. Celles qui acceptent les mesures éducatives et qui comprennent. Celles qui ne comprennent pas parce qu'elles n'ont pas les moyens de comprendre. On leur explique et en général, elles acceptent. Et puis celles qui comprennent parfaitement et qui font de la provocation en nous expliquant que leurs enfants sont merveilleux. Dans ce cas-là, on suspend.

Combien de sanctions avez-vous exécuté depuis deux ans dans votre ville de Valence ?

Une vingtaine de familles a été reçue à chaque fois. Nous avons menacé de suspendre les aides facultatives à chaque fois, alors que les parents étaient dans le doute par rapport à leur enfant, soudain, ils ont réalisé que leurs enfants étaient potentiellement les auteurs et ils ont accepté les mesures éducatives. Ce qui veut dire que la dissuasion fonctionne.

Faut-il changer la loi pour appliquer la suspension des allocations familiales à l'échelle nationale ?

Bien sûr qu'il faut modifier la loi. Les aides que nous versons, ce sont des aides facultatives qui sont résiduelles. Si on y regarde de plus près, beaucoup de communes n'ont pas le chèque sport, le chèque culture ou le contrat municipal étudiant. La seule façon d'agir, c'est d'agir sur les aides principales, celles versées par l'État.

Mais il faut pour cela aussi mettre en cause la responsabilité des parents, donc leur expliquer que s'ils acceptent les mesures éducatives, on les accompagne. Ça n'est pas une suspension automatique. Et d'autre part, agir de façon proportionnée, ça veut dire qu'on ne va pas tout supprimer à une famille qui ne pourrait plus se loger, ne pourrait plus se nourrir. Mais il faut qu'il y ait un impact sur le portefeuille des parents parce que c'est la seule méthode pour qu'ils comprennent.

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