Ce que l'on sait de l'immolation par le feu d'un étudiant à Lyon
Un jeune homme de 22 ans s'est immolé par le feu en pleine rue, devant un restaurant universitaire. Son pronostic vital est engagé.
Il s'est aspergé de liquide inflammable et a mis le feu à ses vêtements. Un étudiant de 22 ans s'est immolé par le feu, vendredi 9 novembre, devant un restaurant universitaire de Lyon (Rhône). Ce geste, qu'il a justifié par ses conditions de vie précaires, a suscité une vive émotion. Des syndicats étudiants, dont Solidaires et l'Unef, appellent à manifester mardi 12 novembre devant les Crous de France. Franceinfo fait le point sur cette tentative de suicide.
Que s'est-il passé ?
Vendredi après-midi, peu avant 15 heures, un étudiant de 22 ans a été grièvement brûlé à Lyon après s'être immolé en pleine rue devant un restaurant universitaire situé dans le 7e arrondissement. Selon France 3 Auvergne-Rhône-Alpes, il s'est aspergé d'un liquide inflammable. Le Progrès rapporte qu'un témoin de la scène, qui travaillait sur un chantier, s'est précipité pour éteindre les flammes, avant l'arrivée des secours. Prévenue du geste de son compagnon par un sms, c'est la petite amie de la victime, étudiante à Lyon 2, qui les avait alertés. Le jeune homme, brûlé à 90%, se trouve actuellement "entre la vie et la mort" au Centre des brûlés de l'hôpital Edouard-Herriot de Lyon, selon le syndicat étudiant Solidaires.
Comment a-t-il expliqué son geste ?
La victime a laissé un message sur son compte Facebook, relayé après son geste par le syndicat Solidaires de Lyon. Dans ce texte, il explique avoir choisi sciemment le bâtiment du Crous de Lyon : "Je vise un lieu politique, le ministère de l'Enseignement supérieur et par extension le gouvernement." Le jeune homme évoque ensuite la précarité de sa situation et revendique "le salaire étudiant et d'une manière plus générale, le salaire à vie, pour qu'on ne perde pas notre vie à la gagner". Il termine son message en accusant "Macron, Hollande, Sarkozy et l'UE de [l'] avoir tué". "J'accuse aussi Le Pen et les éditorialistes d'avoir créé des peurs plus que secondaires", écrit-il.
À l'instar de notre camarade, nous vous invitons à témoigner de la précarité étudiante sur #LaPrécaritéTue. pic.twitter.com/iQ5bTASA0a
— Solidaires Étudiant-e-s Lyon (@SolEtuLyon) November 9, 2019
Qui est la victime ?
Originaire de Saint-Etienne (Loire), le jeune homme militait au sein du syndicat Solidaires étudiant-e-s de Lyon. Comme le raconte Libération, il triplait sa deuxième année de licence en sciences politiques et ne touchait donc plus aucune bourse. Interrogée par le quotidien, l'une de ses camarades témoigne de sa grande précarité : "Déjà l'an dernier, il avait du mal à payer ses factures avec sa seule bourse. En plus, son logement étudiant était insalubre, avec des punaises de lit, des cafards, mais il n'aimait pas s'attarder sur sa situation personnelle."
Quelles sont les réactions ?
Le syndicat Solidaires a dénoncé dans un communiqué "la précarité" qui "détruit nos vies". "Ce sont bien ces institutions inhumaines, cette précarité, cette violence trop commune que l'Etat et l'université exercent contre les étudiants dans l'indifférence générale qui ont guidé son geste, profondément politique, acte désespéré mais aussi et surtout geste de lutte contre un système fascisant et raciste qui broie", écrit l'antenne lyonnaise, qui appelle à manifester mardi.
Ce syndicat a été rapidement rejoint par les autres organisations étudiantes. Interrogée sur franceinfo, Orlane François, présidente de la Fédération des associations générales étudiante (Fage), a appelé le gouvernement à prendre "des mesures fortes" pour aider "des étudiants dans la détresse la plus totale". "20% des étudiants vivent sous le seuil de pauvreté en France en 2019. Des étudiants atteignent à leurs jours parce que ce n'est plus vivable, c'est trop dur pour eux. Il faut que le gouvernement ait un sursaut très rapide sur ses questions", explique-t-elle.
L'Unef a également repris l'appel à manifester. "Par notre présence, nous nous adresserons au gouvernement afin de réaffirmer notre revendication d'un plan d'urgence de réforme des aides sociales et lui rappeler cette cruelle vérité qu'il refuse d'entendre, écrit le syndicat dans un communiqué. Depuis le début du quinquennat d'Emmanuel Macron, la situation s'aggrave : gel des bourses, baisse puis gel des APL."
De son côté, la ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal s'est rendue samedi matin à Lyon pour rencontrer la présidente de l'université et les équipes du Crous pour leur faire "part de sa profonde émotion face à l'acte dramatique" du jeune homme, "auquel elle a adressé ses premières pensées", selon le ministère. "Nous n'avions pas connaissance de difficultés personnelles concernant cet étudiant, très impliqué au sein des instances de l'établissement, a déclaré à l'AFP Nathalie Dompnier, la présidente de Lyon 2. L'université lui exprime tout son soutien, ainsi qu'à sa famille, à ses proches et à tou.tes ses camarades", a écrit également la présidente dans un communiqué.
Quel est le dispositif mis en place pour les étudiants ?
Un cellule psychologique a été mise en place avec les services d'urgence, tandis qu'une cellule d'écoute sera mise en place dès mardi sur le campus de Bron pour les étudiants et les équipes, en précisant qu'un numéro vert spécifique devrait aussi être mis en place la semaine prochaine.
[Soutien psychologique]Un étudiant #lyon2 a voulu mettre fin à ses jours ce vendredi. Une cellule d'écoute sera mise en place mardi 12/11 à 14h campus PDA. Dans l'attente vous pouvez contacter le 15 informé de la situation ou l'unité psy d'urgence et de liaison UPUL au 0478618642
— Université Lyon 2 (@univ_lyon2) November 8, 2019
Si vous avez besoin d'aide, si vous êtes inquiet ou si vous êtes confronté au suicide d'un membre de votre entourage, il existe des services d'écoute anonymes. La ligne Suicide écoute est joignable 24h/24 et 7j/7 au 01 45 39 40 00. D'autres informations sont également disponibles sur le site du ministère des Solidarités et de la Santé.
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