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Procès de Nordahl Lelandais : un téléphone détruit par l'accusé au cœur des suspicions

Article rédigé par Juliette Campion - Envoyée spéciale à Grenoble (Isère)
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Des gendarmes positionnés près du domicile des parents de Nordahl Lelandais, perquisitionné le 6 juin 2018, à Domessin (Savoie).  (JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP)

Le prévenu a nié, mercredi, s'être débarrassé en urgence d'un téléphone portable parce qu'il aurait contenu des images le montrant en train de tuer la petite Maëlys. Il assure que le portable, qu'il avait volé lors d'une soirée, n'a jamais fonctionné.  

La scène a de quoi intriguer. C'est Yacin, un ancien ami de Nordahl Lelandais, qui la raconte. Mercredi 9 février, face à la cour d'assises de l'Isère, à Grenoble, ce trentenaire explique comment l'accusé a détruit un téléphone portable en sa possession, à l'issue de sa première garde à vue, le 31 août 2017. "Il ne faut pas que les flics le retrouvent", lui avait alors confié l'ancien maître-chien.

C'est en se rendant au lac du Bourget (Savoie) que l'accusé s'en est débarrassé, sous les yeux étonnés de Yacin. Une fois les deux hommes arrivés là-bas, Nordahl Lelandais "sort le téléphone, il le pose contre le ponton, il prend une pierre et il commence à le casser. Ça a duré longtemps. Au bout d'un moment, j'ai pris le téléphone et je l'ai jeté dans le lac. Il a hurlé en me disant : 'Pourquoi tu ne l'as pas jeté plus loin ?'".

Interrogé par la présidente Valérie Blain, le prévenu explique avoir voulu s'en débarrasser au cas où une perquisition aurait lieu chez lui par la suite. "Que vous ayez peur qu'on vous cherche des ennuis pour un téléphone volé, alors que vous savez que vous avez tué Maëlys, c'est un peu difficile à comprendre…", lui fait-elle remarquer.

"Il n'a jamais fonctionné" 

Lui assure qu'il l'a détruit uniquement parce que c'était un téléphone volé "lors d'une soirée" et qu'il avait peur que cela entraîne de nouvelles questions de la part des enquêteurs, pour qui il était déjà le suspect numéro un. "Je sais que ça peut sembler difficile à comprendre, mais au moment de l'enquête, j'essayais de tout faire pour ne pas que l'on sache que c'était moi. Tout ce qui est illégal devient une urgence : ne pas parler de la cocaïne, ne pas parler d'un téléphone volé…", tente-t-il de justifier.

Face aux questions pressantes de la cour, il assure que ce mystérieux téléphone "n'a jamais fonctionné, il a été bloqué tout de suite, parce que les iPhone, on peut les bloquer à distance". Dans ce cas, pourquoi le gardait-il ? "Je récupérais les pièces dessus", assure le prévenu.

Ce téléphone est le troisième qu'il possédait. L'enquête a révélé qu'il en avait deux autres en sa possession, qu'il utilisait aléatoirement. Il avait recours à une application permettant de cacher et chiffrer une partie des photos et des vidéos qu'ils contenaient. Pas moins de 133 fichiers ont été retrouvés dans le premier et 181 dans le second, principalement des photos pornographiques. Une image répertoriée comme pédopornographique par Interpol a également été découverte. Surtout, ces téléphones lui ont servi à filmer les agressions sexuelles de deux de ses petites cousines. 

"Combien d'autres petites filles sur ce téléphone ?"

Alors forcément, ce troisième portable intrigue la cour : pourquoi un tel acharnement au moment de sa destruction s'il n'avait rien à cacher ? Aurait-il pu contenir les derniers instants de Maëlys ? C'est la question que lui a posée Caroline Rémond, l'avocate qui représente les parents des petites cousines abusées par le prévenu. "On a vu lundi des images extrêmement bouleversantes de Maëlys de Araujo en train de danser dans les bras de son père [au mariage]. Est-ce que ce sont les dernières images qui ont été tournées d'elle ?", lui demande-t-elle de façon légèrement détournée. "Je ne l'ai pas filmée, si c'est la question", répond Nordahl Lelandais.

"S'il n'y a rien sur ce téléphone, je ne vois pas ce que ça change de le casser, pourquoi ne pas juste le jeter ?"

Caroline Rémond, avocate des parents des petites cousines de Nordahl Lelandais

aux assises de l'Isère

"Allez le chercher, regardez ce qu'il y a dedans si vous voulez !", s'agace le prévenu debout dans son box, alors que les recherches pour retrouver le téléphone sont restées vaines. "Il y avait combien d'autres petites filles sur ce téléphone ?", tente Caroline Rémond dans un dernier élan. "Je répète encore une fois : ce téléphone ne fonctionnait pas", lâche froidement l'accusé.

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