Mort de Steve Maia Caniço : un Nantais affirme que son témoignage a été passé sous silence par le rapport de l'IGPN
Pour son avocat, il y a eu "un manque de zèle criant" de la part de la police des polices.
Une "mascarade". C'est ainsi que Romain G., 33 ans, qualifie le rapport de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) sur la mort de Steve Maia Caniço, dans Le Monde, jeudi 1er août. Ce Nantais, dont le nom figure dans le rapport, était présent la nuit de la disparition du jeune animateur périscolaire.
Le rapport note en effet qu'un seul témoin s'est signalé à l'IGPN "pour se plaindre des jets de lacrymogènes de la part des forces de l'ordre, ayant entraîné des chutes et autres malaises", mais que l'intéressé n'a pas donné suite aux sollicitations de la police des polices. Un "mensonge", affirme Romain G. au quotidien.
Récépissé à l'appui, il affirme avoir effectué un signalement à l'IGPN le 27 juin. Conformément aux recommandations de la police des polices, il déclare s'être rendu, le même jour, au commissariat central de Nantes, pour déposer plainte pour "mise en danger de la vie d'autrui". Un spécialiste du Code pénal interrogé par Le Monde estime que cette indication prête à confusion puisque la plainte, ainsi formulée,"aurait pu cibler 'la Mairie de Nantes' et non les policiers".
"Tout le monde courait n'importe où"
Dans son procès-verbal, Romain G. indique être arrivé à 3 heures du matin sur le quai Wilson, lieu de la disparition de Steve Maia Caniço, avec sa compagne et la jeune sœur de cette dernière.
"Côté bunker, le son a été coupé puis un morceau est reparti. On était tous contents, car l'ambiance était joyeuse. L'embrouille a dû démarrer un peu plus loin, à hauteur du son installé près d'une tonnelle. Je n'ai rien vu venir", raconte-t-il au quotidien, paraphrasant son dépôt de plainte. "Un fumigène a atterri à mes pieds. Tout de suite, on a suffoqué, on a compris qu'il s'agissait de lacrymo. Je me suis accroupi pour être sous le nuage. Tout le monde courait n'importe où. J'ai cherché ma compagne et je l'ai vue dans sa robe verte, qui se dirigeait vers la Loire. Je l'ai rattrapée à 50 cm du fleuve. C'est terrible, car, à ce moment-là, on a croisé des gens, j'ai crié : 'N'avancez pas, il y a la Loire.' On n'a rien pu faire, j'ai entendu les cris et le bruit des corps qui tombaient dans l'eau".
Une procédure de plainte très opaque
D'après ce photographe de profession, son dépôt de plainte s'est avéré compliqué. Au bout de "deux heures d'attente" et alors que l'IGPN est dans les locaux, c'est un brigadier qui enregistre sa plainte. Elle sera ensuite transmise au procureur de la République, qui indique l'avoir jointe avec celles des 89 participants à la soirée techno.
Le service d'information et de communication de la police nationale assure qu'il était impossible à l'IGPN d'intégrer "la plainte judiciaire à la procédure administrative" et que Romain G. sera donc entendu ultérieurement. La police assure ensuite l'avoir relancé "par e-mail, le 28 juin, à 8 h 56 et 30 secondes", afin qu'il apporte une éventuelle contribution à l'enquête administrative, ce que réfute l'intéressé, qui certifie n'avoir "jamais reçu ce mail".
Son avocat Pierre Huriet réfute l'argument de la séparation entre enquêtes administrative et judiciaire. "On joue avec les mots. Lorsqu'il s'agit d'instruire des dossiers d'assignation à résidence, par exemple, procédures qui relèvent de la police administrative, les autorités intègrent évidemment des éléments judiciaires", affirme-t-il au quotidien nantais Presse Océan.
"Tout est délirant dans ce dossier", constate Pierre Huriet. Selon lui, l'IGPN n'a pas "fait beaucoup d'efforts" pour tenter de contacter Romain G. Il dénonce un "manque de zèle criant. Car ce n'était pas à mon client de vérifier en cours d'enquête le travail de l'IGPN".
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