Cet article date de plus de deux ans.

Stade de France : "Il y a une dernière tentative de garder une zone de flou", dénonce Pierre Barthélemy, avocat de groupes de supporters

"À aucun moment, on ne s'est soucié du sort des supporteurs qu'on a vu pendant des heures sur des bandes de vidéo-surveillance, victimes de très graves agressions et de vols répétés", déplore sur franceinfo l'avocat.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Le préfet de police de Paris, Didier Lallement, le 9 juin 2022 à Paris. (ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP)

"Il y a une dernière tentative de garder une zone de flou", dénonce ce jeudi sur franceinfo Pierre Barthélemy, avocat de groupes de supporters. Lors de son audition devant le Sénat pour s'expliquer sur les incidents en marge de la finale de Ligue des champions le samedi 28 mai dernier, Erwan Le Prévost, directeur des relations institutionnelles de la Fédération française de football (FFF) a déclaré que les images de vidéosurveillance du Stade de France avaient été détruites.

>> Vidéos effacées, "échec", "main trop lourde de la police" : ce qu'il faut retenir des auditions au Sénat sur les incidents au Stade de France

"C'est assez surprenant", réagit Pierre Barthélémy. Ces images ont été effacées parce que le parquet de Bobigny n'a été saisi d'aucune plainte concernant les violences au Stade de France. L'avocat s'étonne qu'il y ait "eu une précipitation à déposer plainte pour cette histoire de faux billets" mais que personne ne se soit "soucié du sort des supporteurs victimes de très graves agressions et de vols répétés". Pierre Bathélemy y voit une manoeuvre "pour couvrir ce faux argument des faux billets."

franceinfo : Lors de cette audition au Sénat, nous avons appris que les images de la soirée ont été automatiquement détruites par le Stade de France. Cela vous étonne ?

Pierre Barthélemy : Oui, c'est très surprenant parce qu'il y a eu une précipitation à déposer plainte, dès le samedi soir ou le dimanche matin, pour cette histoire de faux billets. Puis, on apprend aujourd'hui que pendant toute la soirée au PC sécurité, ils ont constaté qu'ils ont assisté à des scènes d'une extrême violence mais aucune procédure judiciaire n'a été initiée par la préfecture de police ou par d'autres personnes présentes. Ce qui en découle au bout de sept jours, c'est la disparition des vidéos. Donc, on a l'impression que la procédure judiciaire n'a été utilisée que pour couvrir ce faux argument des faux billets. Mais qu'à aucun moment, on ne s'est soucié du sort des supporteurs qu'on a vu pendant des heures sur des bandes de vidéo-surveillance, victimes de très graves agressions et de vols répétés.

Vous avez entendu, les résumés des auditions au Sénat ce jeudi. Avez-vous été convaincu par les différents protagonistes ?

Le préfet de police a été plutôt convaincant. Il a constaté que c'était un échec et ça, personne ne peut le contester. On a aussi le sentiment qu'il a décidé de servir de fusible. Il a dit qu'il était le seul responsable, que toutes les choses qui ont pu être faites sur le terrain ou dans la communication sont de son fait et que le ministre (de l'Intérieur) n'a fait que défendre. Mais c'est quand même une inflexion par rapport aux premières réactions politiques juste après le match. Il y a aussi un élément très fort : il dit qu'il assume ce chiffre de 40 000 faux billets, mais il l'assume sans le démontrer.

"Il assume d'avoir donné un mauvais chiffre et donc une mauvaise explication aux incidents. En revanche, il n'essaie pas de s'en justifier davantage."

Pierre Barthélemy, avocat de groupes de supporters

à franceinfo

Et ce qui nous a un peu étonné, c'est que l'après-midi la Fédération française de football (FFF) est repartie tête baissée sur cette histoire de faux billets. Des chiffres qui ne concordent pas à ceux qui ont été donnés par les opérateurs de transport à la presse. Il y a encore ce sentiment d'une improvisation et d'un amateurisme un peu partout. Ce qui a conduit non seulement aux problèmes le soir du match mais aussi à ces erreurs de communication répétées et ce fiasco de gestion de crise depuis maintenant presque deux semaines.

Vous avez le sentiment que la vérité a été maquillée ?

Je crois que ça ne fait plus aucun doute. Cela fait quand même deux semaines qu'ils annoncent qu'il y aura des preuves sur cette histoire des faux billets. Mais ils n'arrivent pas à démontrer. Les chiffres changent d'une semaine à l'autre, d'un interlocuteur à l'autre. Je pense qu'aujourd'hui, tout le travail qui a été fait, notamment par la presse française et britannique, pour collecter des vidéos, des témoignages et des chiffres auprès des opérateurs de transports ou d'autres personnes présentes sur place, démontre bien que ce n'était pas cette histoire de 30 à 40 000 faux billets, mais que c'était bien un problème de gestion des flux de supporteurs depuis la sortie du RER D jusque vers les points de pré-filtrage du stade. Il y a une sorte de dernière tentative avant les législatives de garder une zone de flou, mais cette zone de flou devient aujourd'hui très claire pour tout le monde.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.