Reportage "Il y a une vraie mafia des déchets" : à Marseille, élus et associations luttent, en vain, contre les dépôts sauvages

Cet été encore, la région est particulièrement touchée par des cas dépôts illégaux d'hydrocarbures, de voitures, de déchets de bâtiments, et de détritus en tous genres. La municipalité tente d'y mettre fin, ainsi que les associations, avec l'aide de la population.
Article rédigé par franceinfo - Paul Tillez
Radio France
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Jean-Yves Sayag, élu à la métropole Aix-Marseille, montre une décharge sauvage. (PAUL TILLIEZ / RADIOFRANCE)

"Poubelle la vie", un slogan dont la ville de Marseille n'arrive pas à se défaire. La faute, peut-être, aux décharges illégales qui se multiplient. Pas plus tard que le 20 août, 8 000 litres d'hydrocarbures ont été déversés en pleine nature dans une rivière, le Jarret, bordant le parc du Bocage au nord de Marseille. Les dépôts sauvages sont aussi nombreux, à l'image d'une décharge illégale, tout au nord de Marseille, à l'Estaque, dans les collines de la Nerthe.

La vue sur la rade de Marseille est imprenable, mais en contrebas, "l'apothéose, elle est là : on est face à peu près à 300 à 400 véhicules désossés", pointe Jean-Yves Sayag, élu à la métropole Aix-Marseille, en charge des dépôts sauvages. Il invite à enfiler des baskets pour "descendre à peu près 80 mètres". Sur le trajet, les bouts de verre craquent sous les pieds et après une chute et quelques coupures, c'est l'arrivée en bas.

"Ce sont des véhicules volés, reprend Jean-Yves Sayag. Ils prennent tout ce qu'il y a à prendre et après, ils les découpent et ils les jettent ici. Ce sont des carrossiers qui sont très bien organisés et qui font des trafics avec le Maghreb, puisqu'on a le port pas très loin. Ils prennent les pièces à l'intérieur et tout le reste, pour ne pas qu'on puisse les identifier, ils viennent les jeter ici."

Déchets de bâtiments

Outre les carcasses de voitures, on trouve de tout, même "une arme", mais surtout des déchets du bâtiment : "C'est rempli d'amiante, on le voit", pointe l'élu. Les entrepreneurs préfèrent se débarrasser de ces déchets en pleine nature plutôt qu'en déchetterie, Jean-Yves Sayag explique leurs raisons : "Ils ne veulent pas le faire parce qu'ils sont quand même identifiés. On sait que l'entreprise X a jeté à l'année, par exemple, 112 tonnes de déchets, alors qu'ils n'en déclarent que 12 aux impôts. Il faudrait expliquer la différence et, comme ils ne seraient pas capables de le faire, c'est beaucoup plus facile de passer par la petite main-d’œuvre, moyennant un petit billet."

Un trafic contre lequel lutte l'association France Nature Environnement en Provence-Alpes-Côte d'Azur et sa directrice Nathalie Chaudon : "On s'aperçoit qu'il y a une vraie mafia des déchets sur toute la ligne littorale, sur l'ensemble de la région. Nous portons plainte, parfois, pour des décharges importantes et quand on retrouve l'auteur, on se constitue partie civile." Elle ajoute que ces dépôts sauvages ont de graves conséquences environnementales : "Ce sont souvent des domaines agricoles donc ils détériorent aussi le sol au niveau agronomie."

"Cela a des conséquences aussi sur les terres agricoles et naturelles."

Nathalie Chaudon, présidente de France Nature Environnement PACA

franceinfo

Pour lutter contre cette pollution, France Nature Environnement a lancé l'application "Sentinelles de la nature" pour que les particuliers géolocalisent ces décharges illégales. Depuis 2020, sur cette application, France Nature Environnement PACA a reçu 460 signalements pour des décharges illégales, soit une dizaine de signalements tous les mois.

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